Folia Canonica 9. (2006)
STUDIES - Georges Ruyssen: Les positions des Eglies/Communautés ecclésiales en matiere de communicatio in sacris dans l'eucharistie
COMMUNICATIO IN SACRIS DANS L’EUCHARISTIE 27 ques étaient uniquement considérés dans leur situation individuelle par rapport à l’Eglise catholique et non dans leur contexte ecclésial propre, appartenant à une autre Eglise ou Communauté non catholique. Il est vrai que le modèle œcuménique de l’unité des chrétiens était celui du “retour au bercail catholique” de la part des frères séparés.59 Au cours du Concile, se manifeste l’intuition que le lien au Christ peut aussi être donné à d’autres que les catholiques, surtout par le biais du baptême, qui implique par sa nature même une communion réelle au Christ (régénération), ainsi qu’une incorporation ecclésiale.60 Il y a eu une réflexion parallèle sur l’appartenance au Corps du Christ dans le cas des chrétiens qui ne sont pas en communion avec le Siège romain. Cette réflexion a permis d’élargir en quelque sorte la compréhension de l’Encyclique Mystici Corporis sur l’appartenance à l’Eglise. On pourrait la résumer comme suit : Personne ne peut appartenir au Christ sans appartenir à l’Eglise, puisque le Corps du Christ est l’Eglise. On peut en conclure que quiconque appartient au Christ appartient à l’Eglise et que, par conséquent, les limites de celle-ci sont coextensives à celles de l’appartenance au Christ. L’Eglise en tant que Corps du Christ, dans lequel sont incorporés tous les baptisés, déborde donc nécessairement les frontières visibles et juridiques de l’Eglise catholique.61 Au-delà d’une 59 Sur la discipline préconciliaire en matière de c.i.s. voir P. Gouyon, L ’intercommunion est-elle possible?, Paris 1976, 21-26; M. Wijlens, Sharing the Eucharist - A Theological Evaluation of the Post Conciliar Legislation, Lanham-New York-Oxford 2000, 37-74 et T. Broglio, "Communicatio in sacris ” as it is Treated in Canon 797 of the Proposed Schema of the Code of Canon Law (c. 844 of the new CIC) in Relation to Ecclésial Communities of the West, Tesi Gregoriana n° 3113, Rome 1983, 31-56. 60 Citons, par exemple, 1 ’intervention de Mgr Elchinger, alors encore Evêque coadjuteur de Strasbourg, lors de la deuxième Session du Concile Vatican II au sujet du de Ecclesia: “Affirmer que l’Eglise catholique, la seule qui soit l’Eglise du Christ, ne s’étend pas au-delà de ses limites visibles, contredit plusieurs vérités admises... 1. Il est dit que l’Eglise du Christ s’étend d’une certaine manière sur tous les hommes... 2. Il est dit que là où est l’Eglise, là est l’Esprit et... là où est l’Esprit, là est l’Eglise. Or l’Esprit et la grâce sont aussi donnés aux chrétiens de bonne foi qui sont juridiquement séparés de Rome. 3. Il est dit implicitement que les chrétiens de bonne foi, bien que séparés de Rome, peuvent être sauvés. Or seule l’Eglise du Christ qui est l’Eglise catholique est l’arche du salut. 4. Le baptême et l’eucharistie, reçus avec foi et charité par un chrétien de bonne foi séparé de Rome, l’unissent au Corps du Christ. Or, où est le Corps du Christ, là est l’Eglise catholique....” Acta Synodalia Vol. II Pars I 657. 61 Comme le disait très laconiquement le Cardinal Liénart au cours de la première Session du Concile Vatican II: “Il faut absolument éviter des formules et des manières de parler de l’Eglise qui portent atteinte à son mystère. Ainsi, par exemple, il ne faut pas énoncer la relation de l’Eglise romaine et du Corps mystique, et leur identité, comme si le Corps mystique était totalement inclus dans les limites de l’Eglise romaine. L’Eglise romaine est le vrai Corps du Christ, mais ne l’épuise pas. Tous ceux qui sont justifiés appartiennent à ce Corps mystique du Christ, car aucune grâce n’est donnée aux hommes qui ne soit la grâce du Christ... Mais ils n’appartiennent pas à l’Eglise romaine, sauf s’ils lui ont été agrégés par le sacrement du bap-