A Magyar Nemzeti Galéria Évkönyve 3. szám. (MNG Budapest, 1980)

LE TABLEAU DE PLAFOND DE MIHÁLY MUNKÁCSY DANS L'ESCALIER DU KUNSTHISTORISCHES MUSEUM DE VIENNE « . . . on traverse en hate le vestibule et, après avoir gravi quelques marches, on se trouve dans le magnifique escalier qui se termine par le plafond de Munkácsy, lequel, par sa perspective hardie, semble rehausser encore l'espace. Là, l'empereur s'arrêta fasciné, transporté d'admi­ration pendant quelques secondes. » (Neue Freie Presse, 17 octobre 1891. Tiré du feuilleton de E.M. Ranzoni, sur l'inauguration du Kunsthistorisches Hofmuseum par l'empereur François­Joseph.) Il y a certaines époques où, sous l'influence accéléra­trice de l'enrichissement d'une certaine ambiance cultu­relle, l'art semble entrer en compétition avec la luxu­riance de la nature. A Vienne, les années dites « période de fondation » signifient pour les arts une féconde et brillante période, ce dont témoignent les monumentales constructions de la « Ringstrasse », avec en premier lieu le forum impérial et les deux musées, derniers docu­ments de l'empire autrichien. De même, le programme d'ornementation sculpturale des deux musées, conçu dès 1874 par Gottfried Semper, comprenait plus de quatre-vingt grandes statues, rien que pour la décoration extérieure du Kunsthistorisches Museum — et autant pour le Naturhistorisches Museum — statues qui furent d'ailleurs exécutées dans les années qui suivirent. L'am­pleur de la décoration picturale projetée pour les salles d'exposition des deux édifices — dont le programme fut élaboré une dizaine d'années plus tard par les directeurs des collections, en 1885, au moment où Hasenauer dirigeait les travaux de construction — mon­tre le rendement extraordinaire que l'on exigeait, en ce temps-là, des artistes. 1 La situation est bien mise en lumière par la lettre que le professeur de Dresde, E.S. Haehnel, adressa le 23 mars 1874 au célèbre archi­tecte Semper : d'une part, les proportions gigantesques du projet éveillent en lui de sérieux doutes en ce qui concerne la réalisation des buts fixés, d'autre part, elles lui font émettre un pronostic : «dans dix ans, Vienne sera la ville la plus agréable et la plus belle du monde, dit-il, si les sculpteurs et les peintres avancent de pair avec les architectes », c'est-à-dire dans la mesure où ils réussiront à mener à bien les projets de ces derniers. 2 Il est facile de comprendre que depuis le jour où ces imposantes créations furent achevées — et en un temps record — on admira, outre leur forme monumentale représentative, l'effet d'ensemble de leur richesse, de leur éclat et de leur pompe, et fort peu les différentes parties de l'œuvre artistique ; ainsi, c'est seulement de nos jours, que nous commençons à remarquer petit à petit les divers détails, à les classer selon les règles de l'histoire de l'art, et peut-être à les mieux apprécier : tel fut le cas pour les escaliers des deux musées — noyau de l'ensem­ble architectural — qui, par le déploiement libre de la pompe, sont for représentatifs, surtout celui du Kunst­historisches Museum qui, même à première vue, est beaucoup plus riche. En prenant comme objet de notre étude le tableau de plafond, par Munkácsy, de l'escalier du Kunsthistorisches Museum, nous avons choisi, comme nous le verrons plus loin, une œuvre particulièrement intéressante, non seulement dans le cadre de la con­ception d'ensemble, mais dans sa genèse fertile en enseignements : un des chefs-d'œuvre du maître. Chaque fois qu'un visiteur traverse le vestibule du musée et monte quelques marches du grand escalier, on le voit s'arrêter un moment au-dessous du plafond, pour essayer de comprendre les nombreux détails, d'évaluer les dimensions et de s'orienter dans cette luxuriante magnificence (Fig. 33). A mesure que l'on gravit les marches, l'escalier d'honneur devient plus large et plus majestueux; sur le palier central, là où il prend une double volée, on est saisi par la blancheur éclatante du groupe de Canova — Thésée terrassant un centaure — qui ressort sur le fond constitué de panneaux de revêtement en stucco lustro polychrome, par les riches colonnes de marbre ornées de bronze autour de la galerie du premier étage, par les peintures étincelantes d'or au-dessus de la corniche et enfin, tout en haut, pour terminer et pour ouvrir l'espace, dans le caisson carré, par la toile du plafond, laquelle donne l'illusion d'une coupole — ouverte vers le ciel — surmontant un édifice circulaire , nous y voyons rassemblés les grands artistes de la Renaissance : à gauche, au premier plan, un vieil­lard tenant un rouleau de parchemin et un jeune homme avec un carton à dessin sous le bras — Léonard de Vinci et Raphaël - descendent l'escalier en conversant ; à droite, derrière la balustrade, au milieu de quelques hommes, Michel-Ange, un marteau à la main, à l'air pen­sif ; en haut de l'escalier, à gauche, un peintre sur un échafaud travaille à une énorme toile, c'est Veronese ; plus haut, sur le palier suivant, au deuxième plan, Titien tourné vers deux modèles nus - deux belles femmes dont

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