Csengeryné Nagy Zsuzsa dr. – Doroghyné Fehér Zsuzsa dr. szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Évkönyve 2. szám. (MNG Budapest, 1974)

Ces idées ont trouvé un accueil favorable dans les deux pays dans les années 1780. Les meilleurs représentants de la noblesse ont élevé la voix en faveur d'une transforma­tion démocratique bourgeoise. La Société Liberté et Egalité, fondée par Martinovics et ses partisans avait proclamé le même programme que Radientchev a proposé dans son livre, Voyage de Saint-Pitersbourg à Moscou, publié en 1790. Mais ce programme n'a pu être réalisé dans aucun des deux pays. La noblesse jalouse de ses privilèges et effrayée des suites de la Révolution Française, s'est groupée autour du monarque. L'ajournement de l'émancipation des serfs constituait toujours une entrave à l'évolution urbaine et à la formation de la classe bourgeoise. Il est caractéristique qu'au milieu du XIX e siècle quand le tiers de la population de la France et la moitié de celle de l'Angleterre habitaient déjà les villes, ces données statistiques se réduisent à II pour 100 pour la Hongrie et à 7,1 pour 100 pour la Russie. Cependant, il ne serait pas juste de passer sous silence le fait que la majorité des habitants de Pest étant des étrangers, surtout des Allemands, notre bourgeoisie supérieure par le nombre à la bourgeoisie russe n'avait pas l'avantage de celle-ci d'être, dès son origine, une bourgeoisie nationale. Cette évolution sociale tardive s'accompagnait chez nous aussi sur le plan artistique d'une prédilection mar­quée pour le style dominant de l'époque, pour le classi­cisme qui en satisfaisant les exigences nouvelles de la transformation bourgeoise a donné, surtout dans l'archi­tecture et, en Russie, dans la sculpture, toute une série d'oeuvres de valeur qui n'étaient pas dépourvues de cer­taines caractéristiques nationales. La constatation que les villes de Saint-Pétersbourg et de Pest se sont cons­truites dans un esprit et style classiques, souligne l'existence d'une parenté très marquée. En étudiant la situation au début du XIX e siècle et rappelant certains témoignages contemporains, Simon Melier fait observer que seul Saint­Pétersbourg ait pu rivaliser avec Pest au point de vue de la rapidité de son évolution. Dans le processus de la transformation bourgeoise l'éveil brusque du patriotisme chez les deux peuples a été provoqué par les campagnes de Napoléon à cette différence de près qu'en Russie cela paraissait naturel, comme une suite logique et directe de l'union de toutes les forces de la nation, tandis qu'en Hongrie il a résulté plutôt de la déception de la noblesse hongroise après la fin de la conjoncture économique favorable en temps de guerre, laquelle déception est devenue la source des aspirations nationales qui se résumaient en ce mot d'ordre : Pour la Patrie et pour le Progrès ! Naturellement, en Russie l'ob­jectif principal de la lutte menée en faveur de la trans­formation bourgeoise sera le progrès. Les Russes veulent y parvenir de la même manière que les Hongrois : dans les deux pays l'activité politique sera précédée et préparée par des mouvements culturels. Que le pays fût gouverné par une dynastie étrangère ou bien nationale, le régime des­potique bannissait de l'arène politique toute pensée pro­gressiste et la contraignait à se réfugier dans la vie cultu­relle moins exposée et échappant plus ou moins à la surveil­lance policière 1 '. La communauté d'intérêts des Habsbourg et des Romanov 4 a été prouvée par les faits de l'histoire : par le mariage de courte durée du palatin József avec Alexandra Pavlovna en 1799', la Sainte-Alliance et la ré­pression en commun de la lutte pour l'indépendance hon­groise de 1848-49. L'organisation des forces nationales contre le souverain est liée dans les deux pays à la même date, à l'an 1825, dans la politique aussi bien que dans la littérature : en Hon­grie, la convocation de la première diète des réformes nationales ouvre la voie aux événements de 1848. Sur le sol russe, la première étape du mouvement de libération est marquée par l'opposition au despotisme des décabristes nobles. Cette même année, la fondation de l'Académie des Sciences de Hongrie annonce l'ouverture de l'ère des réfor­mes cent ans après la création de l'Académie russe. Le théâtre hongrois de Pest a ouvert ses portes 80 ans après celui de Saint-Pétersbourg. Dans la littérature hon­groise, le changement d'époque est annoncé par la publica­tion de la première épopée nationale, La fuite de Zalán ; dans la littérature russe, il est marqué, après la composi­tion des premiers chants d'Eugène Onéguine, par l'achève­ment de Boris Godounov. Comparées au romantisme natio­nal hongrois attiré par le passé, ces œuvres sont les pre­mières manifestations du réalisme littéraire alors que dans la peinture russe le réalisme manque ou n'apparaît que sous forme d'essais précoces, pareillement à la peinture hon­groise engagée timidement dans la voie qui la conduira, à l'époque suivante, au romantisme national. En Hongrie, l'enthousiasme qui s'était emparé des es­prits à l'époque des réformes, n'a pas suffi — malgré de nombreux projets — à mettre sur pied une académie cor­respondant à celle « des trois arts les plus importants » de Saint-Pétersbourg, fondée en 1757. La formation acadé­mique, la maîtrise du métier étaient quasi indispensables pour les artistes de l'époque malgré que les schémas de plus en plus rigides et immuables, ainsi que les règles entravas­sent plus qu'ils n'aidaient le développement des talents originaux. Les étrangers jouissaient de certains privilèges à l'Académie tsariste des Beaux-Arts, si bien qu'en 1802 il fut décidé d'accorder une priorité aux citoyens russes lors de la répartition des postes académiques et de l'attribu­tion des commandes. L'esprit académique n'était pas étranger à l'art hongrois non plus. Nos artistes se rendaient à Vienne dès qu'ils en avaient les moyens et ils y faisaient leurs études à l'Aca­démie des Beaux-Arts. Ainsi, dans les deux pays, les artistes qui représentaient des tendances nouvelles, natio­nales, étaient sortis des Académies. Cela fait comprendre pourquoi dans leurs œuvres les objectifs nouveaux, les

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