Arrabona - Múzeumi közlemények 5. (Győr, 1963)
Christian-J. Guyonvarc’h: Arrabona, Arabo-, Aravisci. Notes sur un toponyme celtique de Hongrie
une grande partie du matériel rassemblé par Holder est inutilisable. Mais, à cette réserve près, Arabo- est réellement attesté et l'on se doute que la géminée -rr- est une simple variante orthographique. Il faut corriger en Arabona et rapprocher de cette forme le nom d'un affluent du Danube d'après Ptolémée III, 8, 2: Κατ' *Αραβώνος ποταμόν εκεροηή, actuellement la Drinca (Holder III, 648), s'il ne faut pas lire: κατά [την] 'Ραβώνος τοϋ Τιοεαμοϋ έκτροπήν (éd. Didot, p. 443). Le thème se retrouve donc dans les anthroponymes, dans un hydronyme et dans un toponyme. L'allemand Raab, slave Raba (le magyar étant hors de cause!) viennent indiscutablement du celtique latinisé par aphérèse du a- initial avec accent tombant sur Arrábona. Mais il ne nous appartient pas de nous immiscer dans un domaine étranger au celtique. Le fait à retenir est la variété des emplois du terme a l'époque antique. Qu'une ville et un fleuve aient porté le même nom, cela est fréquent, au moins chez les Celtes (nous renvoyons au monumental travail de Max Förster, Der Flussname Themse und seine Sippe, Munich 1941) Mais les anthroponymes ne peuvent tous être attribués à des Celtes orientaux ou originaires d'Arrabona: il n'est pas question de penser à un substrat qui serait uniforme de la Narbonnaise à la Pannonié. Par prudence donc, et parce qu'il conviendra d'examiner tout le contexte étymologique, nous ferons abstraction au départ du principe, cher aux toponymistes, que les hydronymes sont antérieurs aux toponymes, non pas que ce principe soit faux — au contraire, nous allons vérifier une fois de plus qu'il est très exact mais à procéder ainsi on verse dans le pré —indo —européen, le préceltique et le prégaulois (cf. par exemple le livre récent de L. P. Flùtre, Recherches sur les éléments prégaulois dans la toponymie de la Lozère, Annales de l'Université de Lyon, éd. Les Belles Lettres, Paris 1957, où tout se tourne en roches, sommets, eaux, marécages, etc.), solutions de facilité qui éliminent d'emblée les possibilités du celtique, si réduites soient-elles. L'étude de suffixe -ona étant aussi à réserver malgré son intérêt parce que le sens n'en est que secondaire, encore qu'il semble bien avoir ici une valeur hydronymique, il reste donc *arab(o)-, thème qui a été senti partout comme celtique et que nous rapprocherons immédiatement du composé gaulois Ent-arabus (par ent-, préverbe augmentatif) lequel n'a, croyons nous malgré Holder I, 1441, rien de commun avec le latin inter et la préposition celtique inter, enter. Il faudrait expliquer Entar-abus par un datif pluriel n'offrant qu'un sens incohérent. Entarabus signifie „le très doux" et constitue un théonyime intéressant (voir Ogam VIII, p. 441). „Der Mittler" est une conjecture de Holder et rien de plus, nous ne la retiendrons^ pas. Il est usuel de rapprocher d'ailleurs de Arabus le gallois araf „doux, placide", arafhau „quiescere" (cf. Y Geiriadur Mawr, éd. 1961, p. 26b—27a). C'est ce que fait Holder lui-même et c'est ce qu'admettent les rédacteurs du Geiriadur Prifysgol Cymru III, p. 175b. La restitution du celtique commun serait alors *(p)arabo-s. La difficulté est qu'on ne voit aucun rapprochement valable en indo-européen, ni même en goidéliquej et que nulle part en celtique le suffixe -b- n'est courant (cf. par exemple à propos de l'hypothétique *kladibo- irl. cleitheamn, gall. cleddyf, bret. Meze „épée" J. Vendryes, Mélanges Ferdinand de Saussure, p. 309sqq. et H. Pedersen, Vergleichende Grammatik der keltischen Sprachen H, p. 29 qui reçoivent *kladijo-, avec chez Pedersen quelques réserves dues au mh irlandais). Devrons-nous nous contenter de traduire Arrabona par „(la rivière) douce, calme" et, pour tout le reste, dresser un constat d'ignorance devant un mot sans étymologie? ι Voyons si le côté ethnique de l'affaire est susceptible de nous éclairer. Il nous apparaît difficile de séparer, au moins en abordant le problème, Arrabona du nom de la peuplade Aravisci, Tacite, Germania 28: Sed utrum Aravisci in Pannoniam ab Osis, Gerrrwnorum natiane, an Osi ab Araviscis in Germaniam commiigraverint, cum eodem adhuc sermone, instituas, moribus utantur, incertum est, quia pari olim inopia ac libertate eadem utriusque ripae bona vnalaque erant; Ptolémée II, 15,2: Ev Ôè τοις ανατολικής άρκτικώ,αιοι μεν Ά ανίσκο,, μοσ β ινώτε οι 6ε Σκοροι,σκ. ι. Nous savons, que les Aravisci parlaient l'illyrien: Tacite Germania 43: Cotinos Gallica, Osos Pannonica lingua coarguit non esse Germanos (conf. eodem senmone Tacite Germania 28). Le nom des Aravisci est pourtant celtique, rien d'extraordinaire dans le Bassin des Carpathes, v. p. ex. les Scordisques illyrisés et thracisés Sträbon VII 3, 2; 3, 11. Appianos Illyr. 3, Florus III 4. 7 Arrabona 97