Szilágyi András (szerk.): Ars Decorativa 22. (Budapest, 2003)
András SZILÁGYI: Deux médailles commémoratives des années vingt du 19eme siecle. Remarques sur les compositions exécutées par Jean-Jacques Barre d'apres les esquisses de Louis Lafitte
- dans leurs poèmes saisissants ou dans leurs chroniques journalistiques pleines de verve. Bien entendu, il fallait veiller à entretenir la popularité du nouveau souverain, à renforcer cet enthousiasme apparemment consensuel, et la cour de Charles X en avait fait son principal soucis. Cette tâche n'était pas un défi uniquement pour le publiciste politique mais aussi pour les différents genres d'art visuels et décoratifs qui participaient également activement à cette action. Ce fut dans cet état d'esprit qu'apparurent (sur incitation ou commande tantôt officielles tantôt tacites des milieux gouvernementaux) un nombre inépuisable d'illustrations (gravures, lithographies...) représentant pour la mainte et unième fois le souverain sous tous ses aspects - du portrait de représentation au portrait de groupe - et, en tout premier lieu, la célèbre toile monumentale de François Gérard: Le roi couronné, Charles X, recevant les hommages de ses sujets 8 . Sans nul doute ce même état d'esprit est à l'origine de l'émission de la Médaille du Sacre en 1826. Toutefois, intervient ici un autre point de vue également. La cour attachait alors beaucoup d'importance à démontrer, à prouver, à faire entendre à l'opinion publique que le souverain, en matière de gouvernement du pays, ne se trouvait pas dans une situation d'isolement international. Au contraire : il fallait souligner le fait que les grandes puissances européennes - loin de regarder Paris avec animosité, aversion ou jalousie, comme tel en était le cas sous l'empire napoléonien - étaient tout à fait en phase avec les intentions déclarées par le nouveau gouvernement Bourbon. Tout comme leur convenait également le système politique et les tendances ultra-conservatrices héritées de l'Ancien régime et que le nouveau souverain incarnait, pour ainsi dire, en une seule et unique personne. La question se pose donc en ces termes: ces considérations ressortent-elles en quelque manière dans la représentation qui figure au revers de la médaille commemorative? Et si oui, en quoi se font-elles valoir? La composition mettant en scène plusieurs personnages, perpétue l'instant de la cérémonie du sacre durant lequel le cardinal De Latil - cardinal-archevêque de Reims, chef du clergé catholique de France - sacre souverain et bénit l'archiduc agenouillé devant lui en traçant sur son front le signe de croix avec des onguents bénis (fig. 10). L'instant à une forte résonance historique : ce souverain, désigné à l'origine, devient par cet acte symbolique, véritable roi en droit de porter dorénavant le titre traditionnel hérité de ses pères de Rex Christianissimus. Nous reste de cette cérémonie un nombre imposant de représentations graphiques d'époque, dignes de foi, immortalisant pour la postérité cet événement important qui se tint, en réalité, dans le chœur de la cathédrale de Reims en présence d'une fort nombreuse assistance. Si nous comparons ces illustrations à la composition en effigie sur la médaille nous obtenons des conclusions intéressantes : à côté des ressemblances et des solutions graphiques comparables, existe cependant une différence de taille. Pour ce qui est des ressemblances, sur la droite de la composition, nous retrouvons bien le cardinal De Latil entouré de toutes les personnalités dont la présence est de mise dans ce genre de représentation. Derrière le maréchal de Moncey (1754-1842), général en chef des troupes armées françaises, à l'extrême droite de la médaille, se profile la silhouette d'un homme de notoriété. Il s'agit de Louis Antoine, duc d'Angoulême (1775-1844), fils de Charles, qui, à l'instant même du couronnement, se voit «promu» au titre et à la qualité d'héritier au tône tout désigné. L'évêque de Soisson, Révérend Cimony, un des prélats en charge de la célébration de la cérémonie, vient compléter ce groupe de personnages placés sur la droite (fig. 12). Ce qui se distingue des autres représentations perpétuant le souvenir du sacre, c'est essentiellement le fait que sur les autres dessins, ces personnages de renom en tant que personnification de la dynastie, du sacerdotium et du regnum, - dont certains même symbolisent l'idée de légitimité, la force et la puissance de la royauté - ne sont généralement pas représentés regroupés mais sont plutôt disposés de part et d'autre du souverain, à sa gauche et à sa droite.