Folia Canonica 9. (2006)
STUDIES - Georges Ruyssen: Les positions des Eglies/Communautés ecclésiales en matiere de communicatio in sacris dans l'eucharistie
52 GEORGES RUYSSEN Si l’eucharistie a donc bien pour effet d’unir plus étroitement le fidèle au Christ,137 ce serait une erreur de ne considérer que le côté individuel, personnel de cette communion au Christ. Ceci serait plutôt la tendance des Communautés ecclésiales issues de la Réforme, insistant sur le fait que c’est le Christ qui invite à la Cène et que tous ceux, qui le confessent comme leur Seigneur et Sauveur sont aptes à être reçus au banquet, indépendamment de leur appartenance ecclésiale.138 La réception de l’eucharistie se prolonge au sein de la communauté avec les autres fidèles, du fait que nous sommes unis en Christ et entre nous. En effet, il ne s’agit pas seulement de la simple réception individuelle du Corps et du Sang du Christ eucharistique, mais également, à travers Lui, de l’insertion dans tout le Corps du Christ ecclésial. L’Instruction du SPUC de 1972 dit sans ambages: Aliment spirituel, qui a pour effet d’unir la personne du chrétien au Christ-Jésus, l’eucharistie n’est en aucune façon le moyen de satisfaire des aspirations exclusivement individuelles, aussi élevées soient-elles. De l’union des fidèles avec le Christ, Tête du Corps mystique, résulte l’union des fidèles entre eux. Sur la participation commune au pain eucharistique, saint Paul fonde l’union de tous les fidèles: “Puisqu’il n’y a qu’un seul pain, nous ne formons qu’un seul coips, car tous nous avons part à ce pain unique.” (1 Co. 10,17). Par ce sacrement “l’homme est incorporé au Christ et uni à ses membres”... Le besoin spirituel de l’eucharistie ne concerne pas seulement la croissance spirituelle personnelle, mais en même temps et inséparablement notre insertion plus profonde dans l’Eglise du Christ. (Instr. nos 3, b et 3, c) C’est précisément parce que l’eucharistie “incorpore au Christ et unit à ses membres”139 que la discipline catholique en matière de c.i.s. exige, en principe, plus qu’un simple désir, souhait ou aspiration pieuse personnels de la part du frère séparé qui demande la communion eucharistique. Il s’agit “d’un besoin de croissance dans la vie spirituelle, besoin d’insertion plus grande dans le mystère de l’Eglise et de son unité” (Instr. n° 4, b). 137 Suivant l’énoncé “'Huius sacramenti effectus... est adunatio hominis ad Christum” du Décret pour les Arméniens du Concile de Florence. Concile de Florence, Bulle sur l'union avec les Arméniens, Exsultate Deo du 22 novembre 1439, DS n° 1322. 138 La position catholique affirme qu’en effet, c’est le Christ qui invite à la Cène, dans la mesure où c’est lui-même, en la personne du prêtre, qui consacre et administre les espèces eucharistiques. Mais le Christ agit et invite à travers son Eglise et plus particulièrement à travers ses ministres ordonnés, Evêques et prêtres, auxquels a été confié de perpétrer et de transmettre le mémorial de la dernière Cène et de rendre présent le sacrifice de la Croix et la réalité de la Résurrection. Le Christ s’unit à son Eglise: dans ce sens “l’Eglise fait l’eucharistie”. 139 Suivant l’énoncé “Homo Christo incorporatur et membris eius unitur” du Décret pour les Arméniens du Concile de Florence. Bulle sur l’union (nt. 137), DS n° 1322. Citons également le n° 1396 du Catéchisme de l’Eglise Catholique: “Ceux qui reçoivent l’eucharistie sont unis plus étroitement au Christ. Par là même, le Christ les unit à tous les fidèles en un seul corps: l’Eglise. La communion renouvelle, fortifie, approfondit cette incorporation à l’Eglise déjà réalisée par le baptême.”