Folia Canonica 9. (2006)
STUDIES - Georges Ruyssen: Les positions des Eglies/Communautés ecclésiales en matiere de communicatio in sacris dans l'eucharistie
42 GEORGES RUYSSEN concedens/suadens. Comme le traduit Walter Kasper dans un langage très clair lors de son intervention à PÖkumenischer Kirchentag à Berlin en 2003: L’Eglise catholique applique sur ce point deux principes, tous deux importants: d’abord le principe du lien entre communion eucharistique et communion ecclésiale, qui exclut de façon générale la communion eucharistique “œcuménique”; et ensuite le principe que le salut des âmes est la loi suprême, principe qui admet des chrétiens non catholiques, s’ils sont bien disposés, à la communion eucharistique dans des circonstances particulières, en situation grave et sérieuse de détresse spirituelle.106 C’est donc pour préserver ou assurer le salut des âmes des frères séparés que la discipline catholique en matière de c.i.s. prévoit des cas dans lesquels ces frères doivent pouvoir avoir accès aux moyens de grâce, nonobstant le fait que l’admission aux sacrements, et par excellence à l’eucharistie — exprimant et manifestant l’unité de l’Eglise - requiert la pleine communion avec l’Eglise catholique.107 Ne pouvant pas réduire les deux principes, prohibens (en raison de l’unité ecclésiale) et concedens/suadens (en raison de la grâce à pourvoir), ni à l’un — on aboutirait à la communion “fermée” de type orthodoxe —ni à l’autre — ce serait la communion “ouverte” généralisée de type réformée — on constate par conséquent une triple tension dialectique au sein de la discipline catholique en matière de c.i.s.:-une tension qui se situe au niveau de la nature des sacrements: d’une part, comme moyens de grâce (gratia procuranda), d’autre part, en tant que signes de l’unité ecclésiale (significatio unitatis)',- une tension qui se situe au niveau de la célébration sacramentelle: d’une part, une dimension personnelle, d’autre part, une dimension ecclésiale de la célébration;- une tension qui se situe au niveau de la nature des sacrements et particulièrement de l’eucharistie: d’une part, l’eucharistie comme source ou moyen de l’unité à réaliser, d’autre part, l’eucharistie comme signe de l’unité déjà réalisée. Analysons en profondeur le rapport dialectique entre les deux principes régissant la c.i.s., à savoir le principe de la significatio unitatis (principe prohibens) et le principe de la gratia procuranda (principe concedens/suadens). i06Kasper, “L’identité” (nt. 48), 817. 107 “Pour le droit canon, ce qui compte c’est Salus animarum suprema lex (c. 1752/CIC). C’est ainsi que, d’après le droit canon, il existe des cas de situations particulières graves, où la communion eucharistique est possible.” Kasper, “L’engagement” (cf. nt. 46), 490.