Folia Canonica 5. (2002)

STUDIES - Dominique Le Tourneau: Le caractere personnel et territorial de la potestas des Patriarches Orientaux

LE CARACTÈRE PERSONNEL ET TERRITORIAL 91 toutefois une «solution de compromis».21 Or, jusqu’à présent, il ne semble pas que les synodes aient fait usage de cette faculté qui leur est reconnue. On peut le regretter. Pourtant, laissant son discours de côté, le pape Jean Paul II avait insisté ex abundantia cordis pendant une quinzaine de minutes sur son désir de faire tout son possible pour aider les Églises orientales de la diaspora. Il ne devrait pas être si difficile de parvenir à étendre les pouvoirs des patriarches en dehors du territoire de leur Église patriarcale, en suivant l’une des trois voies suivantes.22 En premier lieu, cela pourrait être réalisé au moyen de lois disciplinaires et de dé­cisions synodales prises par le synode des évêques de l’Église patriarcale et ap­prouvées par le Siège apostolique par l’intermédiaire de la congrégation pour les Églises orientales: ces lois et décisions auraient force de loi dans le monde entier, en vertu du canon 150 § 3. Ensuite, le canon 27 prévoit la reconnaissance non seulement expresse mais aussi tacite d’une loi de droit particulier qui dépasserait le cadre strictement territorial de l’Église patriarcale. Enfin, le législateur su­prême a rappelé l’importance du droit propre dans les Églises orientales, en pré­cisant: «Nous désirons que ceux qui jouissent du pouvoir législatif dans chaque Église de droit propre pourvoient très rapidement par des normes particulières, en tenant compte des traditions de leur propre rite ainsi que des dispositions du concile Vatican II».23 Ce sont d’autres dispositions de ce même concile qui méri­teraient d’être développées à partir de l’expérience des Églises orientales de droit propre. 2. Le développement des juridictions personnelles dans le droit canonique latin La constitution dogmatique Lumen gentium semble faire un rapprochement entre patriarcat et regroupement de diocèses en conférences des évêques.24 Cela «suggère que le génie oriental peut aider l’Église latine, non seulement à décou­vrir la signification ecclésiologique de la collégialité, mais à l’inscrire effective­ment dans la vie de l’Église».25 26 Tout en incitant à créer des structures pastorales non territoriales, mais rituelles, le concile de Latran IV avait interdit la coexis­tence de deux évêques ou plus dans un même diocèse, tamquam unum corpus di­versa capita, quasi monstruum.16 Mais le monde a évolué. Comme nous l’avons 21 G. P. Montini, Il Codice per le Chiese Orientali. Presentazione generale del Codex Ca­nonum Ecclesiarum Orientalium, dans Quaderni di Diritto Ecclésiale 4 ( 1991 ) 209. 22 Voir F. J. Marini, The Power of the Patriarch, New York 1998, 174-178. 23 Ioannes Paulus II, const, ap. Sacri canones, 18 octobre 1990, AAS 82 (1990) 1037-1038. 24 Voir Concile Vatican II, const, dogm. Lumen gentium, n° 23/b. 25 F. Frost, Patriarcat, dans Catholicisme, G. Jacquemet (éd.), X, Paris 1985 col. 802. 26 Concilium Lateranum IV, 30 novembre 1215, Constitutiones, cap. 9 «De diversis riti­bus in eadem fide».

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