Tátrai Vilmos szerk.: A Szépművészeti Múzeum közleményei 87. (Budapest, 1997)
EÖRSI, ANNA: Fuit enim Maria liber. Remarques sur l'iconographie de l'Enfant écrivant et du Diable versant l'encre
Ce livre représente originellement la sagesse divine. Il remonte au livre de sedes sapientiœ, que le Christ montre ouvert aux fidèles à partir du XIII e siècle. 73 La figure de l'Enfant assis sur le bras de la Vierge debout et lisant un livre ouvert n'est plus rare au début du XIV e siècle. 74 Ce livre symbolise la prescience de l'Enfant, qu'il s'agisse du Livre de la vie, de l'Évangile contenant son enseignement ou du plan de la Rédemption. 75 Les premières statues de l'Enfant écrivant sont nées de la modification de ce type. Il se peut qu'elles aient voulu représenter d'abord l'inscription par le Christ de noms dans le Livre de la vie, (hypothèse que l'on pourrait justifier en montrant que le sujet en question est apparu pour la première fois sur un monument funéraire, mais les preuves manquent à cet égard). A Arbois, à Hai et ailleurs, le motif apparaît sans aucun contexte funéraire. Certains ont soutenu que le Christ s'y serait servi d'un clou pour écrire dans le livre. 76 Quoi qu'il en soit, je pense que ceux qui ont conclu à partir des motifs de l'Enfant écrivant et de la Vierge à l'encrier à la prémonition de la Passion sont, dans ce cas, le plus proche de la vérité. Le Livre de la Vie de VApocalypse (III, 5 ; XVII, 8 ; XX, 12 ; XX, 15) a été considéré depuis saint Augustin comme celui de la prédestination ou de la prescience, et a été identifié à partir du IX e siècle avec le Christ lui-même. 77 Selon Caesarius de Heisterbach (f 1240), le « livre - Christ » fut l'œuvre de la Passion : les lettres y furent inscrits par des coups de fouet, les rubriques y furent enfoncées par des clous, les signes de ponctuation par des épines. 78 Les premières statues de l'Enfant écrivant sont à peu près contemporaines aux premières peintures, et ont été exécutées dans l'aire de rayonnement d'un même artiste : Beauneveu. L'acte d'écrire n'a pas ici le même sens, et le livre n'est pas la métaphore du corps de la Vierge. La pureté immaculée de la Madone est symbolisée maintenant par la fleur : c'est en se préservant du péché originel qu'elle devient digne d'être le récipient de la sagesse divine. 79 73 P. ex. Cologne, Schnütgen Museum, vers 1260. Voir Rhein und Maas. Kunst und Kultur 800-1400, 1-2, Schnütgen Museum, Köln 1973, vol. 2, pp. 446-447, fig. 1-4. 74 Voir p. ex. la statuette de noyer (?) provenant de l'ouest de l'Allemagne : Dortmund, Museum für Kunst und Kulturgeschichte. In Kunstschätze aus zerstörten Kirchen Westfalens, Ausst. 1948. Schloss Cappenberg über Lüne, Vorw. R. Fritz n° 38. 75 Sur Le Livre de la vie, voir p. ex. Keep, L., Buch (himmlisch), in RAC, II, hg. von Th. Klauser, Stuttgart, 1954, pp. 725-732; Schiller, op. cit., III, p. 177; Richter, op. cit., p. 87. Sur le livre représentant le plan de la Rédemption, voir Büttner, F. O., Mens divina liber grandis est. Zu einigen Darstellungen des Lesens in spätmittelalterlichen Handschriften, Philobiblion 16 (1972) pp. 92-126 (99). 76 Feigel, op. cit., loc. cit. ; Verdier, op. cit., p. 254, note 23. 77 Saint Augustin, La Cité de Dieu, XX, 15; Hrabanus Maurus, Allegória; in S. Script, PL. 112, col. 987; Walafrid Strabo, Glossa ordinaria, PL. 114, col. 745; Haymo, Expos. In Apoc, PL. 117, col. 1190; Hugo de Sancto Victore, De arca Noe, PL. 176, col. 636, 645; Bonaventura, Lignum vitœ, 12e fruit, 46, etc. Voir Richter, op. cit.fn. 33) pp. 87-88. 78 Dialógus miraculorum VIII, 35 : « Liber vitee Christus est [...] In pelle siquidem corporis ejus scripts erant litterae minores et nigras per lividas plagas flagellorum, litterae rubea; et capitales per infixiones clavorum, puncta etiam et virgulas per punctiones spinarum [...] ». Cité par Wattenbach, op. cit., pp. 208209. 79 Voir p. ex. Fulbert de Chartres, Sermo I de Nativitate Beatissimœ Virginis, PL. 141, col. 322; Levi d'Ancona, M., The Iconography of the Immaculate Conception in the Middle Ages and Early Renaissance, New York 1957, p. 54.