Radocsay Dénes - Gerevich Lászlóné szerk.: A Szépművészeti Múzeum közleményei 20. (Budapest 1962)
PANOFSKY, ERWIN: La construction de l'Argo en tant qu'allégorie platonicienne. L'iconographie d'un dessin mantegnesque vers 1500
LA (CONSTRUCTION DE L'ARGO EN TANT QU'ALLÉGORIE PLATONICIENNE L'ICONOGRAPHIE D'UN DESSIN MANT'EGNESQUE VERS 1500 Le style du dessin de Budapest (fig. 15) qui porte le n° 1770 s'accorde avec l'opinion du Musée selon laquelle il a été exécuté en Italie du Nord vers la fin du XV e siècle. Plus spécifiquement il rappelle les estampes et les dessins qui peuvent être groupés autour des gravures attribuées auparavant à Zoan Andrea. Telles sont par exemple les feuilles bien connues intitulées Virtus combusta et Virtus déserta. En d'autres termes le dessin est plutôt d'origine mantouais que padouan, et je n'hésiterais pas de désigner son auteur par le nom de «Disciple de Mantegna». Comme les gravures de « Zoan Andrea » et les oeuvres qui leur sont apparentées, le dessin de Budapest accuse un style que Mantegna avait développé un peu antérieurement (vers 1460—1470) et il pourrait même refléter une « invention » du grand maître lui-même. Son iconographie est pénétrée de l'esprit du classicisme savant et un peu trop conscient qui dominait l'activité de Mantegna pendant toute sa carrière mais qui avait atteint à son apogée lorsque le peintre s'associa aux humanistes Giovanni Marcanova et Felice Feliciano. Le sujet du dessin, bien que compliqué, n'est pas difficile d'identifier mais il est plus difficile de condenser sa signification dans une brève ligne de titre. Tout court : nous sommes en présence de la Construction de l'Argo, transformée en une allégorie platonicienne de la productivité humaine. Le bateau est en effet l'Argo et non, comme on pourrait croire, l'Arche de Noé. La preuve, en est en premier lieu le fait que sa proue porte un grand oeil, une allusion évidente à l'habileté de l'Argo de prévoir le futur, voire de la prédire par des paroles, et en second lieu la ressemblance peut-être plus qu'accidentelle qui existe entre le dessin de Budapest et deux reliefs romains, presque identiques, dont l'un est conservé au Louvre et l'autre à la Villa Albani (fig. 14) et qui représentent la construction du fameux navire. 1 Dans ces deux reliefs classiques le constructeur •— généralement identifié soit avec Argus, fils de Phrixus, soit avec Argus, gardien clairvoyant d'Io — est assisté par Pallas Athéna. Par contre dans le dessin de Budapest (et c'est ce qui lui confère un intérêt particulier) il travaille directement selon 1'« idée » platonicienne de l'objet qu'il est en train de construire. Cette « idée » est représentée naïvement, mais pourtant d'une manière convaincante, par le petit vaisseau planant dans le ciel : un « modèle » minime mais exacte du navire qui actuellement doit être construit, et qui diffère de celui-ci — comme c'est le cas pour toute « idée » — par l'absence de toute imperfection « subjective ». Tandis que le navire « matériel » n'est montré qu'en partie, le vaisseau « idéal » est montré intégralement. Tandis que le 1 R e i n a c h, S. : Répertoire des reliefs grecs et romains, IL Paris, 1912. p. 250, III. p. 133. — Un troisième exemplaire, pas mentionné par Reinach, nous a été signalé par le docteur I. Fenyő. Il est conservé au Musée Britannique à Londres et a été publié par Rohden, H. von et Winnefeld. IL: Architektonische Römische Reliefs der Kaiserzeit. Berlin et Stuttgart, 1911. pl. XXXII.