A Magyar Nemzeti Galéria Évkönyve 3. szám. (MNG Budapest, 1980)

LE TABLEAU D'ATELIER : « L'APOTHÉOSE DE LA RENAISSANCE » «L'Histoire de l'Art», «L'Apothéose de l'Art», « L'Apothéose de la Renaissance », tels sont les titres respectifs du thème du projet définitif ; comme nous l'avons déjà mentionné dans l'entrée en matière, ce projet représente un atelier de peintre avec des mo­dèles et des artistes — bien entendu, choisis parmi les plus grands de l'époque — dans la lumière de la « gloire » . 6 1 Le tableau qui, de par son sujet, peut être considéré comme le précédent le plus important, est celui de Courbet, peint en 1855 et représentant un atelier de peintre. C'est probablement sous son influence qu'en 1876, Munkácsy exécuta son tableau intitulé: « Dans l'atelier», qui montre l'artiste dans son atelier, pendant un court repos, près de son chevalet, avec sa femme à côté de lui; de par sa construction sévère, c'est l'un des plus beaux tableaux d'intérieur de Munkácsy, et dont la composition fut d'ailleurs exactement reprise par un de ses élèves, F. von Uhde, sous le titre : « Autopor­trait de l'artiste avec sa femme ». Dans la conception de son nouveau projet, il se peut que les tableaux des lunettes peints par Makart pour le décor de la cage d'escalier, aient donné à Munkácsy l'idée de « l'atelier », et abstraction faite des deux portraits en tondo, les artistes sont, dans ces tableaux, en relations étroites avec leurs modèles. Commençons par examiner le processus de transformation du sujet du tableau : c'est de nouveau le premier thème, connu seulement depuis peu par l'esquisse en couleur, qui apportera dans l'œuvre ulté­rieure de nombreux éléments, fort importants quant au contenu. 62 (Fig. 56). Il est surprenant que, malgré le changement de thème, de si nombreuses idées, bien entendu entièrement transposées, aient été conservées des conceptions antérieures. La « Femme », figure domi­nante de la composition, et restée à la place où elle était dans les études précédentes, est devenue modèle de peintre : droite sur une estrade, son attitude est celle de la Vénus de l'esquisse, près d'elle, un nu couché ; au milieu du tableau, à la place du laudateur, le vieux maître : nous savons déjà qu'il s'agit de Titien qui, tourné vers cette beauté, donne, en expert, des expli­cations à ses élèves — lesquels se trouvent à ses pieds — avec un large geste des bras. Dans l'atmosphère, au dessus des différentes figures qui flottaient, le génie de la Gloire est devenu le seul personnage symbolique du tableau, les autres étant des humains, plus exactement des artistes, à l'exception de la femme que l'on voit à gauche de Titien et de ses disciples. Bien qu'ici les personnages soient à peine reconnaissables, nous révé­lons leurs noms d'avance, étant donné que Munkácsy pensait certainement à eux : du côté gauche du tableau, devant une grande toile, un peintre est assis sur un écha­faud, il tient une énorme palette, c'est Veronese, avec un apprenti près de lui ; devant, deux figures parlent en marchant : l'une, à barbe blanche, nous paraît être Léonard de Vinci, l'autre sera plus tard Raphaël — ici elle semble avoir une autre signification — ces deux figu­res rappellent de loin les deux philosophes de l'École d'Athènes, de Raphaël ; enfin, à droite au premier plan, un groupe d'hommes avec Michel-Ange comme figure centrale. Contrairement aux projets précédents, ici le théâtre de l'action est une véritable scène régulièrement construite et géométriquement structurée. Derrière une balustrade sombre, tout à fait devant à droite, afin de décentrer l'espace dans toute la largeur du tableau, entre les limons genre socles sans ornements, un esca­lier ouvert conduit jusqu'à l'estrade, lieu principal de l'action. Évidemment cette transformation en une sorte de tableau scénique d'une simplicité Spartiate, a encore une fois soulevé la question du rapport entre l'espace donné et le tableau de plafond, et encore une fois actualisé le problème de l'illusion. Puisque pour le moment Munkácsy ne s'occupe pas d'introduire dans son tableau un cadre architectural particulier provenant de l'architecture réelle, (nous reviendrons encore à la découpure du champ du tableau) l'élargissement de l'espace du plafond à l'intérieur même du tableau, à l'aide de la perspective vue de dessous, se produit con­formément à l'image de la peinture de plafond classique et tout d'abord de celle de la Renaissance (et plus tard seulement du Baroque) d'où certaines formes fondamen­tales, telles l'escalier, les socles des colonnes, qui se présentent comme des modèles déjà acceptés. Les pre­miers essais, fort modestes, se bornent à la disposition oblique des quelques cubes architecturaux, aux deux bords latéraux du tableau, donc des deux limons (non symétriques) de l'escalier et des socles servant d'estrade aux modèles et, ce qui est le plus frappant, de la grande toile de Veronese, laquelle, outre le fait qu'elle soit fixée comme un mur sur le bord gauche du tableau, donne l'impression d'être vraiment inclinée vers l'avant. Les figures, cependant, ne sont pas encore représentées en raccourci. Comme on le voit sur l'esquisse, l'élargisse­ment architectural ébauché est repeint, sous la couche de peinture apparaissent, le long du bord droit du tableau, des édifices ou des éléments architecturaux penchés en raison de la perspective. A la place de ceux-ci — nous reviendrons plus loin à ce motif — nous voyons, peintes au-dessus des pentimenti, des branches qui s'inclinent du bord droit supérieur vers l'intérieur de l'espace. En ce qui concerne le « ciel servant de fond » de l'esquisse en couleur, il fait penser aux scènes de pay­sages rencontrées sur les projets précédents. L'idée d'un fond architectural ou plutôt d'un encadrement archi­tectural, qui s'est affirmée plus tard, est donc au début

Next

/
Thumbnails
Contents