Korner Éva - Gellért Andor szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Közleményei 5. szám (Budapest, 1965)
28. Gyula Derkovits (1894-1934) : Sur le bûcher. Détail. 1928. Derkovits Gyula (1894-1934): Máglyán. Részlet. 1928. Le premier — la Mangeuse de raisins (Szőllőevő) 19 — (Planche II.) est en même temps une des meilleures réussites appartenant à la série Nous deux. Il diffère des autres tableaux de la série en ce que sur ceux-ci la figure du peintre occupe le centre, tandis qu'ici, c'est le tableau peint par le peintre qui est au premier plan. Le peintre tourne le dos au spectateur, qui n'y voit que sa tête, trahissant par sa pose l'attentions outenue, et son vigoureux bras droit. Il tient un pinceau à la main, et — comme le chevalet dressé devant lui le montre — il travaille à son autoportrait. Ce visage; inachevé, déformé par les souffrances vécues, forme, pareil à un masque, le centre du tableau. A peine le regard effrayant des yeux vides a-t-il épouvanté le spectateur que le côté droit du chevalet finit par une coupe violente, et que l'arrière — plan s'étale, une assiette chargée de raisins et de pain, et la figure de la femme du peintre qui picore paisiblement les grains de raisin. Derkovits aimait cette construction à contrepoint. Sur sa toile Mon frère et sa femme (Bátyám és felesége) 19 " (Fig. 22) peinte en 1923, il oppose si fortement l'homme malade, maigre, aux yeux ardents, à la femme débordante de vie, avec sa robe opulente et ample que lors de la présentation du tableau au public, l'organisateur de l'exposition ému de la tension se dégageant de l'œuvre, lui donna le titre La Vie et la Mort. Le mathématisme rigoureux de la Mangeuse de raisins atténue un peu cette tension; à côté du portrait éloquent, d'une grande vérité, les autres parties du tableau sont dominées par l'équilibre de la répartition de l'espace. L'influence des principes de composition du cubisme synthétique se fait sentir sur le tableau. Il est à remarquer que Derkovits qui au début des années 20 tente d'employer les méthodes du précubisme, surtout dans ses figures — quoique cet emprunt dont les traces sont toujours faciles à suivre ne soit pas absolument conséquent — donnera à la fin des années 20 une solution intéressante et originale de la composition à l'aide de plans. Du point de vue du contenu — et c'est valable pour tout l'œuvre de Derkovits — il est de la première importance que chaque élément de la composition soit chargé d'une signification intellectuelle, tendancieuse. La Mangeuse de raisins nous montre un tableau ébauché, en l'opposant à l'entourage du peintre, mais en même temps en l'y reliant dans une unité inséparable. L'autoportrait qui suivait, apparaît dans un tableau. Le Musée des Beaux-Arts a fait prendre, au début des années 30, une photo enregistrée sous le titre de Nature morte 20 (Fig. 23.) sur l'inventaire de sa photothèque. L'originalité de cette toile, que nous ne connaissons que par cette photographie, est incontestable. La composition on est extrêmement intéressante et compliquée. Au premier plan, en vue plongeante, un dessus de table avec quelques journaux, et un plat de fruits. Sur la table, dans un miroir à support, nous apercevons le visage du peintre, et derrière, au mur, un paysage. A l'aide du miroir, l'artiste reflète les différentes parties de la chambre sur un seul plan, de façon que l'espace se trouvant devant et derrière lui, ainsi que lui-même ne forment qu'une seule nature morte. Je ne voudrais pas m'occuper longuement du rôle et de l'usage du miroir, puisque les chercheurs qui ont analysé les Trois générations 21 en ont donné toutes précisions nécessaires, mais je ne pourrais pas passer sous silence le fait que les trois plans de cette nature morte et leur réunion à l'aide du miroir préfigurent de trois ans la solution des Trois générations. A présent, nous nous bornons à examiner le rapport de l'autoportrait et des autres éléments dans la composition. Au point de vue du genre, ce tableau constitue un remarquable exemple au niveau européen des natures mortes au journal si fréquentes dans la peinture du 20 e siècle. En disposant les objets divers pour faire avec eux une image unique, le peintre, sûr de lui:il