dr. D. Fehér Zsuzsa - Kabay Éva szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Közleményei 2. szám (Budapest, 1960)

contraire l'envers de la fête, sa vanité, son aridité. Fripés par la besogne de tous les jours, les visages ne retrouvent pas leur plénitude pendant les réjouissances foraines ; d'où la dualité grotesque de ses tableaux de genre et le réalisme vigoureux de sa représentation psychologique. Il dépasse toutes les conceptions qui étaient en vigueur jusquedà dans la peinture de genre, en mettant dans ses tableaux toute la vitalité, toute la force élémentaire de sa personnalité. Il pénètre par tous ses sens le spectacle que lui offre le monde, il écoute, palpe et hume le monde et exprime ses décou­vertes en s'exelamant. U se réjouit de chaque détail avec une ardeur égale, et les détails de ses tableaux sont coordonnés et non subordonnés les uns aux autres. Ce caractère particulier de sa façon do voir détermine jusqu'à ses couleurs et ses tons, au mépris, parfois, des règles de la perspective selon lesquelles les couleurs de l'arrièrc-plan doivent s'estomper ; chez lui, une scène, même lointaine, se détache par ses cou­leurs, s'il la juge assez importante, sans choquer pour cela nos conceptions sur l'espace et la profondeur. Ce style pictural souligne encore la nouveauté de ses tableaux de genre populaires ; en effet, avant lui, le «genre» était arrêté à la peinture consécutive au natura­lisme subtil de Bastion Lepage. U semblait presque que le tableau de genre populaire fût démodé, inadaptable aux exigences de la peinture moderne. Il a fallu l'avè­nement d'un peintre du tempérament d'un Aba-Novák, dégagé du conventionnel, moderne jusqu'à la moelle des os, et original dans sa façon de voir les choses, pour surmonter ces difficultés et renouveler le genre. Cependant, la raison d'être de cette conception et sa vérité sont uniques : elles se rattachent à la personnalité de Vilmos Aba-Novák. De même que personne ne peut, sans risquer de tomber dans l'hypo­crisie, ou de paraître d'une gaucherie effarante, imiter la façon de voir d'un Breughel, de même, on ne peut calquer impunément un Aba-Novák. Son métier accompli, l'ardeur avec laquelle il aborde chacun de ses sujets, son courage dans l'innovation, voilà les principaux enseignements de son art, et le rôle essentiel que tiennent dans son art son tempérament et son humeur, nous engage à l'écouter s'exprimer lui-même sur la place qu'il pense occuper dans l'art hongrois. Dans son journal intime, retrouvé après sa mort, il a consigné, au sujet d'un passage qu'une histoire de l'art lui avait consacré : « Parler du romantisme pour introduire ceux de l'école de Nagybánya, c'est, certes, très habile. Mais ce qu'il (l'auteur) dit là est contraire à ce qu'il écrit à mon sujet. Il me place en quelque sorte en marge du système planétaire, oubliant qu'il existe dans l'histoire de l'art aussi, à côté de la conception classique du romantisme la conception d'un roman­tisme pénétré de la réalité, un « romantisme plus proche de la vie. » Un romantisme proche de la vie — voilà en quels termes simples et expressifs il caractérise son propre art. Ailleurs, il s'est écrié : « Si je vis par mes tableaux, c'est que je vis ! » U a transmis toute son ardeur de vivre; à son art, et aujourd'hui, dix-huit ans après sa mort, ses oeuvres redonnent la palpitation de la vie et rendent leur auteur immortel. (Pl. IV., fig. 31 —37.) Magdolna B. Supka

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