dr. D. Fehér Zsuzsa - Kabay Éva szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Közleményei 2. szám (Budapest, 1960)
vert qui couronne le sommet, fait l'impression d'un pan de roc immuable. Cependant il ne faut pas oublier que le tableau fut peint déjà en 1873 et que la perfection de la peinture d'aujourd' hui est loin de pouvoir soutenir la comparaison avec celle de ce tableau. Nos peintres feraient bien d'imiter la profonde dévotion de Szinyei. » Dans Művészeti Krónika (lő janvier 1905) Adniirafor écrit : « La constatation que Szinyei est un des plus grands peintres de notre siècle non seulement chez nous, mais aussi en Europe, a été une révélation poulies visiteurs de l'exposition. Celui qui eut beau chercher jusqu'à l'âge d'homme d'être reconnu, a trouvé la gloire quand il ne la disirait plus. Le plus grand mérite de ses tableaux c'est de posséder ce qui, dans la littérature, ne se rencontre que dans les oeuvres des plus grands et ce qui, en peinture, est plus rare encore : la force des choses vécues et la sincérité de l'impression. » Dans Budapesti Hirlap (8 janvier 1905) Dezső Malonyay fait une remarque intéressante : „11 est étrange que dans notre pays plein de vitalité, de saine gaieté et d'optimisme, ce soit justement une saine joie de vivre, exempte de toute trivialité et de toute sensiblerie, qui manque le plus à l'art. Pál Szinyei Merse est peut-être le seul artiste hongrois dont l'oeuvre respire, sans la fausser, cette joie équilibrée de vivre. Les couleurs avec lesquelles Szinyei fait naître cet effet heureux, sont à égale distance des bitumes sombres de l'école munichoise et des couleurs claires mais sèches de l'école du plein-air. Ses tableaux sont exempts de tout académisme. Sa conception l'éloigné également du réalisme tant forcé dans la seconde moitié du siècle dernier, quoiqu'il suive avec une sincérité ingénue les manifestations les plus intimes de la nature . . . Notre artiste aura sa place dans l'histoire de notre art mais non pas au même titre que la plupart de ses collègues, c'est-à-dire attaché à une époque déterninée. Il pourra arriver que certains connaisseurs trop retenus par les dates des tableaux de Szinyei resteront perplexes devant ces toiles. C'est à ce point que l'art de Szinyei se passe de toute date. U ne s'attache qu'à une seule chose : à ce qui est éternellement immuable. » Les rapports de Szinyei avec Böcklin font l'objet d'une étude minutieuse de Lajos Ernst, publiée dans le Catalogue de l'Exposition rétrospective du Salon National. De cette étude, retenons ce qui suit : «Si on regarde leurs photographies, surtout celles des années 70, on est tenté de prendre Böcklin et Szinyei pour des frères. La même taille puissante, la même tête sérieuse reposant sur de larges épaules les rendaient si ressemblants par l'extérieur aussi que tous ceux qui les avaient vus ensemble à Munich, étaient convaincus d'avoir vu des frères . . . (Dans ses souvenirs, István Gergely nous raconte que le peintre Gabriel Max rencontrant Szinyei à nouveau, en 1 !) 10, à Munich, après une séparation de 37 ans, se troubla complètement à sa vue car il crut au premier moment voir Böcklin, mort depuis 9 ans, s'avancer vers lui.) Böcklin est né à Bales, de parents de modestes conditions. Les habitants de la ville et de la région étaient, sans exception, de braves bourgeois laborieux, sans vie intérieure notable, mais tous marqués d'une religiosité sentimentale. Ils étaient continuellement à la chasse de la fortune, amassaient les écus et leur ambition la plus chère était de passer dans la ville pour des commerçants braves et raisonnables. Cet entourage explique l'enthousiasme ressenti par Böcklin pour la vie libre et sensuelle des anciens, car tous ceux qui vivent dans un âge de fer, cherchent une existence nouvelle, ou ils ont la nostalgie des temps passés, où, selon eux, le sommet du bien et du beau aurait été atteint. Böcklin était de ces derniers. Sous ce point de vue, Szinyei était son opposé. Habitué déjà dans la maison paternelle à l'aisance et à ce que la vie peut avoir de beau et d'agréable, il n'a jamais ressenti de nostalgie pour le passé ou pour une existence nouvelle. Il conçut donc et exécuta le plus naturellement du monde l'un de ses tableaux les plus beaux et les plus caractéristiques, le Déjeuner sur F herbe, qui représente une compagnie joyeuse comme il en avait pu voir souvent dans le milieu où il était né et où il avait vécu. U peignit ce tableau on 1872, à l'époque où il était très intimement lié à Böcklin et qu'il subissait le plus sensiblement son influence. En dépit dos ressemblances manifestes entre les deux artistes, il y aussi des différences remarquables, notamment en ce que Szinyei empruntait les sujets de ses tableaux à son époque et représentait par son art les beaux jours et les heures agréables qu'il avait lui-même vécus, tandis que Böcklin effarouché par tout ce que son époque avait d'ennuyeux et do repoussant pour lui, ressuscitait un passé déjà lointain qu'il peuplait non pas de dieux et d'hommes antiques, mais d'êtres mythologiques, de faunes, de pans, de nymphes, des génies des eaux et des bois silencieux ...» On peut dire qu'après l'exposition rétrospective de 1905, Szinyei était enfin un artiste arrivé. Le public; s'étonna d'entendre que ses tableaux avaient pu autrefois déplaire. Les critiques irrités s'indignaient d'apprendre qu'un tel artiste avait été passé sous silence pendant 20 ans et ils tempêtaient contre le règne d'une clique de peintres sans talent, contre les critiques pédants, particulièrement contre Gusztáv Kelety. Ce qui nous surprend, c'est que la majorité de ces critiques favorables à Szinyei, placent les paysages de Sáros au-dessus de tableaux comme la