dr. D. Fehér Zsuzsa - Kabay Éva szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Közleményei 2. szám (Budapest, 1960)

Mais il se trompait. Le tableau envoyé au Salon inter­national de Vienne en 1873, y fut si haut et si mai placé par vengeance personnelle qu'il ne put faire aucun effet. Mis au courant de ce qui s'était passé, Szinyei se rendit à Vienne et retira le tableau immédia­tement après l'inauguration. Tl eut gain de cause car les organisateurs du Salon se convainquirent eux­mêmes que celui qui avait si mal placé le tableau, était nettement prévenu contre Szinyei. Cet incident avait dégoûté Szinyei. Il retourna chez lui, se maria et vécut, sans peindre, retiré sur ses domaines de Jernye. Sa vie de famille lui causa aussi des déceptions car il n'y trouva pas ce qu'il cherchait. Cependant l'envie de peindre le reprenait, il se rendit à Vienne pour renouer amitié avec Makart et retrouver le milieu artistique dont il avait tant besoin. C'est là qu'il peignit l'Alouette et commença Rocoeo. Mais il ne put s'adapter au climat artistique de la ville impériale. Ses tableaux, le Déjeuner et l'Alouette, présentés au public viennois et exposés plus tard, en 1883, à Budapest aussi, ne lui valurent pas de succès décisif. Selon 2e critique d'un journal hongrois, à cette époque Szinyei aurait été atteint du délire colo­rant (delirium colorans). Sa santé s'étant ébranlée, il rentra donc dans son village où il vécut solitaire, sans toucher au pinceau. U semblait qu'il avait renoncé à jamais à la pein­ture, et il y aurait vraiment renoncé, s'il n'y avait pas eu ses amis, surtout Tivadar Zemplényi, pour l'arra­cher à sa léthargie et à sa résignation et pour l'en­courager à terminer ses tableaux commencés. U finit par se remettre à peindre et en 1894 il acheva Rocoeo, Oculi et le Ruisseau qu'il envoya, en compagnie d'une esquisse de paysage, au Salon d'hiver où ils eurent du succès et l'un d'entre eux, Oculi, fut acheté par sa Majesté. Fort de ce succès, Szinyei continua à peindre, mais peignant toujours d'après nature. Deux autres tableaux, Fonte de neige et Coquelicots, envoyés au Salon de cette année, ont été également bien accueillis. Il est à espérer que ses succès déci­deront Szinyei à continuer et si nous n'attendons pas de lui des compositions de grande envergure, nous gardons l'espérance de rencontrer désormais à nos expositions ses paysages sains et pleins de force.» Szinyei se montra plus sévère encore pour lui-même dans la réponse qu'il fit au questionnaire de l'En­cyclopédie Pallas. Il y écrit notamment : «Ses aptitudes avaient éveillé des espérances qu'il ne put remplir s'étant proposé des buts qui dépas­saient ses forces. A l'Académie, ses yeux s'ouvrirent vite, il apprit à voir la nature, il comprit que dans la natuie tout était autre que dans la nature représentée selon les bonnes règles de l'Ecole. Fort de cette découverte, il se proposa le but de représenter la grande nature selon sa conception personnelle, avec une fidélité honnête. Ainsi, il s'engagea dans une nou­velle voie de l'art, universellement reconnue aujourd' hui, puisque ses tableaux peints en 1868 sont déjà très proches, malgré leurs imperfections, du plein­air développé plus tard, sans que le peintre eût jamais vu les tableaux français de cette manière, capables de l'influencer ...» Le succès obtenu à l'Exposition du Millénaire, fut suivi d'un intermède politique. A compter de 1896, Szinyei représenta pendant 4 ans la circonscription électorale de Héthárs au Parlement et, quoiqu'il gar­dât le silence dans la respectable Chambre des Dé­putés, ce rôle politique l'empêcha de retourner à la­peinture. Mais aux élections de 1901 il fut battu et il se mit à fréquenter à nouveau les artistes dont la société lui manquait bien depuis les années passées à Munich. Il devint bientôt le centre de la vie artistique et, jusqu'à sa mort, on le voyait presque chaque jour entrer au Café Japán et s'asseoir à la table des artis­tes. Seuls les mois d'été passait-il à Jernye où il peignit ses derniers paysages. En 1901 il perdit la vue d'un oeil, mais ses amis qui n'étaient pas au courant de cette infirmité, ne s'en aperçurent point. Désormais il dut peindre le monde tel cpi'il le voyait d'un seul oeil: mais il le voyait mieux et plus beau que les autres ne font avec deux yeux. Enfin, en 1905, le Salon National organisa en son honneur une exposition où il put montrer presque toute son oeuvre, comprenant 96 tableaux. Cette expo­sition aurait dû avoir lieu plus tôt, mais l'occasion ne s'est pas présentée avant que Lajos Ernst ait pris la direction du Salon National dont il allait faire, pour le plus grand bien de notre art, le centre et le foyer des tendances modernes, en face de la Galerie d'Art de plus en plus conservatrice. Cette exposition retro­spective donna pour la première fois une idée d'en­semble sur l'évolution artistique de Szinyei. Elle intrigua non seulement ceux qui s'intéressaient à la peinture, mais elle éveilla aussi la curiosité d'un public plus vaste. La réhabilitation de Wagner méconnu était alors une affaire dont on parlait par­tout. Ainsi peu s'en fallait que Szinyei fût pris pour le Wagner hongrois à qui on devait rendre pleine jus­tice. C'est ce qui explique sa popularité exceptionnelle comparable seulement à celle de Munkácsy. Le vernissage fut non seulement un grand événe­ment du monde artistique mais aussi de la haute société. Les anciens collègues de Szinyei au Parle­ment y prirent part aussi, parmi eux le grand écri­vain Kálmán Mikszáth qui d'ailleurs n'avait pas l'habitude de fréquenter les expositions. U consacra à Szinyei un croquis charmant, se terminant ainsi : I'd

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