dr. D. Fehér Zsuzsa - Pásztói Margil szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Közleményei 1. szám (Budapest, 1959)

peint à Vienne, en 1924, pour montrer l'intensité avec laquelle l'art de Derkovits reflète et suit les changements intervenant dans la conception philosophique et le moi intérieur du peintre 73 . (Fig. 20.) Ici, les personnages de la composition hachée, en contraste et formant demi-cercle, ne sont plus des figures mélancoliques abstraites existant hors du temps, mais des prolétaires à l'âme déchirée auxquels la Mort fait entendre son violon grinçant. Les impressions de la grande guerre et l'expérience de l'écrasement de la révolution prolétarienne hongroise étaient déjà mûres dans l'âme de Derkovits et de­vaient s'exprimer nécessairement dans son art. C'est encore du vécu que traduit en image une autre toile qui est, d'ailleurs, la plus réussie, dans la composition et les formes de détail, de toutes les oeuvres de la période: une harmonie parfaite règne entre l'ensemble et l'état structural et naturel des corps. De ce point de vue, le nu de femme tenant une corbeille à la main, mérite une attention parti­culière : sa silhouette, d'une légèreté extrême et qui semble ondulante, et ses formes intérieures conçues dans leurs grandes lignes donnent une construction solide sans nuire en rien à la vitalité et à la beauté sensuelle du tendre corps féminin. La figure de la femme atteste manifestement que le caractère monumental du tableau n'est pas dû au moment mais aux dispositions innées dont le jeune peintre fait preuve dès le début et qu'il affirmera plus tard dans un style dépouillé de toute influence étrangère et devenu foncièrement le sien. Si les formes s'harmonisent heureusement avec le contenu et témoignent déjà d'un talent supérieur, les couleurs s'accor­dent moins bien ensemble. L'ocre orangée de la figure centrale assise sous une tente brun foncé et les ocres jaunes ombrées de reflets verts et roses des autres figures tranchent durement sur la couleur vert tendre du paysage clos, au second plan, d'une colline grise entre le fleuve et le ciel blanc, tirant sur le bleu. Ce coloris ne lui appartient pas encore en propre et on ne se douterait pas que le chromât isme devienne, un jour, l'élément le plus caractéristique et le plus suggestif de son art. Il se peut qu'ici il ne soit pas encore devenu maître de la couleur à l'huile. En effet, dans une variante à l'aquarelle, antérieure à la grande toile, il réussit beaucoup mieux à accorder les ocres tendres et profondes, les bleus et les verts avec l'atmosphère du thème 72 . Rappelons, en passant, un autre tableau à thème musical

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