dr. D. Fehér Zsuzsa - Pásztói Margil szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Közleményei 1. szám (Budapest, 1959)

leur rôle social, ils existent, pour ainsi dire dans le vide et, n'ayant pas le sens de l'ensemble, ils s'éga­rent souvent dans des régions irréelles et se dés­humanisent ; l'art ne s'adresse plus, trop souvent, qu'au cercle restreint d'une élite intellectuelle et l'oeuvre n'intéresse que les snobs vivant dans l'aisance. En Hongrie, à l'époque à laquelle apparaît Der­kovits, c'est-à-dire vers 1920, les différentes espèces d'«-ismes » n'avaient pas encore pris une grande extension et les tendances extrêmes n'avaient encore conquis que de très rares peintres. Au début du siècle et jusqu'à la fin de la première guerre mondiale, l'académisme fanfaron et le naturalisme vide de sens régnaient en maître chez nous et bénéficiaient seuls de la faveur de l'Etat. Nos artistes bourgeois progres­sistes, les meilleurs d'entre eux du moins, représent­talent alors véritablement des idées avancées et, en face de l'existence bourgeoise chargée de mensonges et de vices, ils ont insisté dans leurs oeuvres sur la nécessité d'une existence pure et saine et essayèrent d'exprimer une sorte d'innocence, la pureté originelle do l'âme, la profondeur des sentiments. C'était un humanisme abstrait, éloigné de la réalité sociale, une sorte d'affirmation panthéiste de la vie, cher­chant à reconquérir, sur la civilisation factice, le bonheur sans mélange de l'homme naturel — de l'homme nu, dans le sens matériel et spirituel du mot —, des premiers âges du monde. Leur oeuvres ne reflétaient que l'homme abstrait dans un état d'âme assombri ou s'abandonnant à l'extase, dans une athmosphère mystico-spiritualiste. L'homme actif de la vie réelle n'avait pas de place dans cet art. Les moyens adéquats d'expression de cette concep­tion philosophique teintée d'humanisme abstrait et de panthéisme, c'étaient les formes abstraites empruntées au Cubisme et les formules psychiques apprises de l'Expressionnisme. Ces moyens furent plus ou moins géométriques, respectivement excen­triques sur les tableaux de nos artistes, selon qu'ils étaient utilisés par des peintres qui sentaient l'école où transposés par des artistes de talent. Le caractère des oeuvres de ce genre fut déterminé également par le fait que l'artiste a vécu ces états intérieurs ou les a seulement simulés. En examinant de près le « Concert » de Der­kovits, le premier sentiment que nous éprouvons c'est la force suggestive de l'expérience vécue. Nous savons par les souvenirs de sa femme — que la na-

Next

/
Thumbnails
Contents