Tanulmányok Budapest Múltjából 13. (1959)
Mályuszné Császár Edit: A Budai Népszínház és közönsége = Le Théatre populaire de Buda et son public 261-314
cernèrent que les environs de l'église, car il était trop fatiguant pour les habitants du Château de Buda de descendre au théâtre et de la Ráczváros il était hasardeux et onéreux de s'y rendre dans l'obscurité sur le quai désolé du Danube. Le Théâtre Populaire avait un site bien plus favorable pour Pest ; face à Lipótváros, quartier le plus riche de la ville, à une distance accessible aux quartiers nommés Belváros et Terézváros, ce dernier en pleine formation. Le public qui aimait le théâtre ne s'était pas recruté des couches des plus humbles de la population urbaine. L'ouvrier, la couturière, la blanchisseuse n'avaient pas accès au Théâtre, ils manquèrent et de l'argent et du temps. Les artisans par contre s'y étaient rendus, même les plus pauvres sans distinction de nationalité, les Serbes moins souvent que les Hongrois et les Allemands, mais, si le drame lyrique avait quelque rapports serbes, aussi le Tabán et le Ráczváros se mit en route et les viticulteurs, jardiniers, bateliers étaient assis aux côtés des petits commerçants allemands et des bottiers hongrois dans le Théâtre. La bourgeoisie vivant dans l'aisance essayait de s'assimiler de son plein gré, consciente du fait que la prospérité du pays était inséparable de la prospérité de sa ville natale. Elle s'est rendue volontiers au théâtre pour y frayer la compagnie des nobles et des aristocrates influents. Le Théâtre nouveau a été accueilli avec enthousiasme aussi par les intellectuels, par un nombre d'écrivains débutants. Ces auteurs étaient dans la plupart issus de la classe nobiliaire, mais nombreux étaient parmi eux d'origine roturière. Ils ne cessèrent de louer Molnár. On est en droit donc de se demander les causes de la ruine d'un théâtre qui avait d'ennemis passifs, amis zélés, un directeur doué et une troupe pleine d'enthousiasme. La réponse est simple. Non seulement dans la capitale, mais aussi dans les provinces, non seulement les théâtres hongrois, mais aussi ceux de langue allemande se trouvaient au bord de l'abîme. La société en plein passage au capitalisme n'était pas assez riche pour pouvoir faire les frais d'un théâtre sans subventions. L'argent comptant était rare, les plaisirs du théâtre, avec des cartes bon marché de 30 à 40 kreutzers, dévorèrent d'importantes sommes même dans les derniers théâtres de province. Les aspirations héroïques de Molnár pour donner à la capitale un second théâtre hongrois et aux classes humbles un programme convenable ont été vouées à l'échec. Après le compromis austro-hongrois Molnár eut la chance d'ouvrir de nouveau son théâtre. Il n'était plus revêtu toutefois de sa qualité de directeur armé de plein pouvoir, il était seulement directeur technique placé sous l'autorité de la municipalité. Cette deuxième période de son activité n'est exempte des rivalités avec le Théâtre National ce qui était d'avance voué à l'échec, mais n'y manquèrent pas les conceptions grandioses de metteur en scène non plus. En été de 1868 il mit en oeuvre — dans l'Arène de Buda en possession hongroise déjà — ses expériences acquises à Paris : sous l'influence du Marengo présenté au Châtelet, il a mis sur scène une pièce intitulée « Campagne de Bem» à grand spectacle, avec emploi d'une foule nombreuse. En rehaussant le fond du décor, l'apothéose a été dominée par l'image du Mont Gellért. De même qu'auparavant, le théâtre est resté aussi après 1867 l'institution typique de la petite bourgeoisie, sa tâche aurait consisté à satisfaire au goût de cette classe, donc en mettant sur scène des drames lyriques populaires, même des opérettes. Molnár manquait du sens de l'économie, ne parvint jamais à mettre sur pied une troupe au moins médiocre avec un bon orchestre et à avoir des décors de belle apparance, ce qui sont indispensables pour la représentation d'opérettes. Les comédies et les drames d'une présentation bon marché n'avaient pas assez d'attraction, les autres théâtres de la capitale en offrirent meilleures. La municipalité de Buda, elle même dans une crise financière, a pris donc la décision de fermer le Théâtre Populaire de Buda et de vendre le terrain. Les conseillers municipaux croyaient s'acquitter de leur obligation de patriote ayant assuré de la place aux représentations hongroises dans leurs deux théâtres : nommés Várszínház et Színkör. 313