Scientia et virtus. Un commentaire anonyme de la Consolation de Boece. Introduit et publié par Sándor Durzsa (A MTAK közleményei 5. Budapest, 1978)

16 connaissance, à l'intelligentia, est ouverte par la philosophie. C'est l'intelli­gentia, en action réciproque avec' fides 1 qui donne à l'âme la capacité de par­venir à la connaissance totale. Mais même si l'âme reçoit de Dieu, par l'intermédiaire de l'intelligentia, des connaissances importantes, une large sphère des choses divines reste cachée pour l'intelligence. Ce sont les problè­mes du programme tracé par Anselme, le 'credo ut intelligam', qui se font jour dans ce texte, et les distinctions qu'on peut lire dans notre commentaire fournissent des données importantes à ce sujet. D'ailleurs, notre auteur n'oublie non plus à insister sur le rôle de la foi: "Sine fide nemo vere rationabilis est" écrit-il. (37) 5. Le commentaire du Budapest témoigne un intérêt apparent pour les questions relatives aux arts. Présentons ici quelques manifestations caractéris­tiques de cet intérêt. La phrase boécienne qui parle du vêtement de Philoso­phie déchiré par les mains d'hommes violants, est expliquée par Pseudo-Jean de la manière suivante: "Hic accipit violentiam vim inferentium hereticorum prave intelligentium... qui non habent perfectam scientiam'.' (38) Qui sont ces hommes violents selon l'interprétation de notre commentaire ? Son explication s'attache étroitement au milieu de la vie scolaire. Selon lui, sont violents, dans le domaine des arts, ceux qui veulent acquérir tel ou tel savoir sans l'assistance de professeurs, ou ceux qui ne s'efforcent pas d'assimiler parfaitement les connaissances, s'ils ont des maîtres. Il cite un exemple pris dans le domaine de la logique pour illustrer la connaissance incomplète. Il y en a qui connaissent la terministique, mais ne connaissent pas les juge­ments logiques; il y en a qui connaissent les jugements, mais non pas la syllogistique; il y en a qui connaissent quelques syllogismes, mais ne savent rien sur les autres parties de la logique. Il y en a enfin qui savent quelque chose de tout, mais comprennent peu de choses. Le commentaire sur le texte de la Consolation donne occasion à beaucoup de constatations intéressantes sur les arts, ainsi entre autres sur l'ordre de l'apprentissage des arts, que l'auteur appelle "artium artificium". Remarquons à ce propos que plusieurs autres auteurs du XII e siècles' occupent également de l'ordo discendi, entre autres Hugues de Saint-Victor et Gondisalvi. (39) Nous devons nous arrêter à la définition que notre commentaire propose d' 'ars', avec laquelle il explique l'expression ' indissolubili materia' de la Consolation. La définition est la suivante: "Omnis ars materiam habet rem naturaliter existentem et que non subiacet corruptioni". (40) Pour comprendre cette thèse, on peut trouver un appui en étudiant le passage correspondant de quelques sources contemporaines. Par exemple Pseudo-Jean dit à propos du même passage de Boèce: "Indissolubili vero materia dicuntur, quia etiam si deficiant qui eas capiant, ipsae tamen non pereunt. Licet enim pereat scientia, scibile tamen semper erit."(41) Nous trouvons une formula­tion analogue dans le Didascalicon de Hugues de Saint-Victor: "Dicunt quidam, quod illud, unde agunt artes, semper maneat."(42) Et nous approchons d'encore plus près l'explication recherchée en dirigeant notre attention sur le passage suivant de la théorie des sciences de Gondisalvi: "...ideo scientiarum

Next

/
Thumbnails
Contents