Alba Regia. Annales Musei Stephani Regis. – Alba Regia. Az István Király Múzeum Évkönyve. 22. 1982-1983 – Szent István Király Múzeum közleményei: C sorozat (1985)

Die Anjovinen in Mitteleuropa - Klaniczay Gábor: Rois saints et les Anjou de Hongroie. p. 57–66.

un nouveau chapitre dans i'histoire des l'exploitation idéologique des cultes des rois saints. Pour répondre à ces questions, il faut d'abord jeter un coup d'oeil sur les étapes diverses de l'évolution du culte des rois saints médiévaux. * La royauté sacrale par excellence — monarque divinisé, entouré d'une vénération religieuse, puis "relevé" d'un meurtre rituel — ne se trouve plus chez les peuples de l'époque médiévale chrétienne (voir EDSMAN, 1955). Et pourtant, les rites assurant la légitimité de l'autorité royale, les manifestations culturelles et, avant tout, les croyances relatives aux pouvoirs surnaturels du roi, en gardent beaucoup de vestiges.( 20 ) On peut y ajouter tels rites de consécration et tels emblèmes de souveraineté, sacrales qui, lors de la coronation, mettent le roi médiéval régnant "par la grâce de Dieu" au-dessus de tous ses sujets en le déclarant personne sacrée (voir SCHRAMM 1954—1956). Il y a aussi des croyances se perpétuant parmi les peuples convertis au christianisme, suivant lesquelles les membres des dynasties royales sont doués de puissance surnaturelle qui assure à leur peuple la victoire dans la guerre, la prospérité et la récolte abondante pendant la période de paix. Les peuples païens germaniques, Scandinaves et anglo-saxons justifiaient cette qualité extraordinaire qu'est le charisme du souverain par la descendance divine des dynasties royales (CHANEY 1970, 7—33). Évidemment, cette vue devait être abandonnée après la conversion au christianisme mais les souverains convertis à la foi nouvelle, et même les dynasties fondées par eux, ne se passèrent guère de prestige sacral. À côté des miracles autour de la conversion et des victoires de guerre remportées dans la défense de la foi chrétienne, ce prestige fut aussi affirmé par la vénération de quelques membres da la dynastie princière ou du fondateur même de la dynastie, comme des saints chrétiens. C'est à ce propos qu'a émergé la question jusqu'ici la plus discutée concernant la personne du roi médiéval: est-ce qu'il s'agit ici d'une réinterprétation chrétienne de la conception du charisme héréditaire dans la maison prin­cière ou d'une idée particulière de l'hérédité de la sainteté (Geblütsheiligkeit) lorsqu'un souverain et surtout les membres successifs d'une dynastie (rois, princes, princesses) sont canonisés tour à tour ou bien vénérés comme saints, même sans que l'Église l'approuve officiellement (HAUCK 1950)? La foi en la sainteté héréditaire semble appuyée d'un fait subséquent: à partir de XI e siècle, les membres des maisons royales française et anglaise se vantent d'une particularité de saints, la faculté thamaturgique. Non seulement ont- ils professé qu'ils étaient capables de guérir un certain type de malades, les scrofuleux, par l'imposition des mains mais encore ils pratiquaient cérémoniellement cette faculté, et chaque souverain accomplissait des (20) Sir John Frazer a attiré l'attention, avec beaucoup d'effet, sur le prolongement de la royauté sacrale au moyen âge (1905; 1922, 368—371). Le premier traitement d'importance de ce cercle de problèmes a été fait par Fritz KERN (1914). En ce qui concerne les idées récentes sur le charisme ger­manique et anglo-saxon, voir CHANEY 1970. prodiges afin de prouver sa puissance surnaturelle (BLOCH 1924; SCHRAMM 1939). Frantisek Graus, qui avait résumé dans une grande oeuvre de synthèse la période la plus ancienne du culte des saints médiévaux, c'est-à-dire l'époque mérovingienne, a nettement opossé l'opinion que cette prétention charis­matique ait survécu (GRAUS 1965, 313—334). Il a démontré, d'une façon convaincante, que non seulement il nous manque des preuves claires que ces notions charismatiques germaniques aient survécu à l'époque mérovingienne, mais en ce qui concerne les cultes des rois saints allégués comme preuve, leur étude approfondie multiplie en fait les contre­arguments. À parcourir les sources, les rois et les reines honorés comme saints pendant les VI e et VII e siècles n'obtinrent pas ce titre comme supplément sacral de leur souveraineté, au contraire. Ces légendes glorifient non pas le monarque mais l'ascète, l'homme de vie sainte priant sans cesse, le martyr innocent meurtri, et en ce qui concerne les reines il s'agit souvent des personnes saintes qui se retirent du monde et quittent leurs fonctions temporelles. En partie, cela aide à expliquer pourquoi ce ne sont point les principaux souverains mérovingiens — Clovis 1er, Guntram, Dagobert 1er — qui obtiennent le titre de saint mais leurs femmes et descandants moins impor­tants (GRAUS 1965, 390—433). L'autre contre-argument de Graus se rapporte à l'exploitation des cultes de rois saints: il n'y a point de renseignements qui montrent que les descendants des rois ou des reines saints auraient insisté sur le culte en vue d'une sainteté ou charisme dynas­tique. Pour la plupart, c'est le cloître ou l'église possédant les restes d'un roi saint qui le popularise (comme le fait l'abbaye Saint-Maurice dans le cas de Sigismond de Burgundié, le premier roi saint médiéval — GRAUS 1965, 397—398, voir Folz 1958) et d'autres monastères, lieux du culte font autant avec leur propre saint d'origine non­royale. Les observations faites par Graus rendent sans doute improbable que les rois honorés comme saints par les Mérovingiens aient incarnés la notion païenne du charisme héréditaire dans la maison princière. Cependant, ce raison­nement n'exclut point l'existence d'une telle idée à l'époque. Graus lui-même cite plusieurs légendes s'attachant aux souverains non canonisés (par exemple, Guntram et Dago­bert 1er — GRAUS 1965, 394—395, 399—401 ; Lixfeld 1972). La sacralisation de la royauté est évoquée par la fonction de protecteur de fécondité de l'un des rois du VII e siècle, Dagobert II (GRAUS 1965, 402—406; Folz 1963). Et finale­ment, en s'appuyant sur les sources écrites, Graus présente les vues des gens d'Église, des cultes religieux officiels et des légendes de saints comme argument contre la supposition que l'idée de charisme ait survécu. Néanmoins, tout ce qui en découle est que l'Église de l'époque mérovingienne — que ces croyances aient existé ou non — n'adopta point le concept de la royauté sacrale. En même temps, il est vraisemblable que les saints qui s'étaient produit dans les maisons princières franque, burgonde et wisigothe respecti­vement, aient contribué, à la longue, au renforcement du prestige sacral des dynasties royales. Même si le culte des saints n'était pas devenu, d'un moment à l'autre, le moyen conservateur delà royauté sacrale, au fil des temps, il s'atta­chait de plus en plus fortement à ce cercle de croyances. 61

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