Az Eszterházy Károly Tanárképző Főiskola Tudományos Közleményei. 2003. Sectio Romanica. (Acta Academiae Paedagogicae Agriensis : Nova series ; Tom. 30)

I. Littérature L AURENCE GHIGNY: Stratégies et littérature fin du XIX6 siécle en Belgique

Strategies et littérature fin du XIX 6 siécle en Belgique 9 á la fois les exigences d'indépendance du Jeune Royaume de Belgique et celles de la pensée universaliste frangaise dans la matiére culturelle. H me semble qu'il faut considérer cette formule lapidaire et imperative comme une premiere stratégie, qui peut-étre resume toutes les autres, de la part des acteurs qui seront les piliers de institution littéraire, artistique beiges ä la fin du XIX e siecle. Ce « soyons-nous », et ce qu'il implique au niveau de l'art (dans notre littérature, traitons de nos réalités : les villes, la pluie, le brouillard, les beffrois, les béguinages, les laminoirs. . ., affichons nos caractéristiques linguistiques : wallon, flamand, etc.), est apte ä satisfaire le jeune Etat beige en quéte de frontiéres plus symboliques et plus fortes que celles du territoire, les efforts d'indépendance artistique venant en quelque sorte appuyer et conforter l'autonomie politique. II s'agit lä de la lecture la plus évidente et la plus courante de ce leitmotiv de la jeune génération de 1880. Mais, il existe une autre lecture possible de ce « soyons nous » qui n'exclut nullement la premiere et qui vis er ait ä considérer que la formule par son cőté pluriel s 'integre tout ä fait ä la pensée universelle et unificatrice frangaise pointée plus haut. Car il faut insister sur le fait que ce « soyons nous » n'est pas « soyons Beiges », ou « soyons Flamands », « soyons Wallons ». La formule n'a pas été élaborée par la jeune génération beige de fagon ä la scinder clairement de la sphere artistique frangaise. Les écrivains beiges de cette époque n'iront d'ailleurs jamais dans le sens d'une séparation nette d'avec l'institution francaise, par exemple par la mise en place de prix nationaux beiges, d'une académie royale qui naitra seulement dans l'entre­deux guerres, etc. Car en définitive, pourquoi ce « soyons nous » ? Dans quel but prononcer cette formule qui se présente apparemment comme gratuite et aisée, mais qui, parce qu'elle est formulée, trahit justement une certaine difficulté ä étre et éventuellement une certaine réflexion stratégique quant á un devenir ? Le slogan « soyons nous » contient l'idée d'une pente naturelle qu'il conviendrait de suivre sans avoir rien ä faire pour cela, l'étre soi ne demande pas d'efforts et concerne tout le monde. Ainsi ce « soyons nous », slogan de toute une génération de la littérature beige, se situe dans une perspective írni versalis te, pluraliste chére ä la Erance, ce dont témoignent les nombreuses collaborations entre revues frangaises et beiges, les rencontres entre écrivains de l'Hexagone et du Royaume de Belgique. La pluralité contenue par le pronom « nous » s'accorde tout ä fait ä l'attitude de totalisation des moyens que la jeune génération beige va employer au niveau de la sphere culturelle. L'image donnée de la Belgique est alors, en accord avec la pensée frangaise, la plus totalisante possible. II s'agit de dire que la Belgique est l'union réalisée, par le temps et l'art, de

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