Sources du passé de Budapest 1686-1950 - Budapest Főváros Levéltára forráskiadványai 5.(Budapest, 1971-1973)
ans passés il fallait lutter plus d'une fois contre l'arriérisme et le conservatisme pour que la métropole de l'avenir se réalise. Ce sont surtout les deux dernières décennies, la période révolue depuis la reconstruction, qui sont pénétrées de cette lutte, pour ainsi dire à preuve de ce que le socialisme est le réalisateur approprié et digne des idées des meilleurs et que dans le régime des conseils une métropole satisfaisant aux prétentions socio-socialistes est en voie de construction. Nous sommes sûrs que les documents compilés sur la base de rigoureux principes de rédaction et avec une objectivité soigneuse, reflètent fidèlement les conditions socio-économiques et morales, ainsi que l'atmosphère de la période donnée. Les lecteurs (qui liront non seulement ce qui peut être lu dans les lignes, mais aussi derrière elles) pourront se rendre compte de la naissance de Vhomme budapestois qui vit parmi nous — peut-être précisément c'est nous qui le sommes. Tl caractérise la ville, il est caractérisé par elle. Sa prise de conscience a été encouragée par les courants radicaux bourgeois, le mouvement socialiste du tournant du siècle et du commencement du XX e , mais son caractère et sa mentalité exempte de complexes d'infériorité sont nés en majeure partie après la libération à la fin des années cinquante et au début des années soixante. Presqu'en même temps qu'en comparant notre ville avec d'autres, nous avons énuméré nos déficiences, nous sommes devenus plus riches d'une expérience très importante. Nous avons appris à nous connaître et à nous estimer. Déjà en 1914 Dezső Kosztolányi réprimanda ses concitoyens dans un de ses feuilletons : « Nous nous lamentons sans cesse de ne pas avoir de caractère... Ce n'est que parce que nous avons honte de notre caractère... Dieu m'en est témoin, nous n'avons aucune raison de rougir ». Et pourtant, les Budapestois ont souvent rougi. Ils ont pour ainsi dire, passé leur vie dans cette humiliation. Us auraient voulu être fiers de leur ville qui, cependant, ne fut mentionnée que dans un sens subordonné... «Vienne IJ », «Paris du bori du Danube » — « Ville au plus beau site de l'Europe »... Le nom de ses grands écrivains ne disait rien, restait étranger à ses hôtes, sa musique fut considérée comme exotisme, la ville même quelque peu méprisée. En vain s'efforçait-elle à argumenter : C'est ici que circule le premier métro du continent (puisque Londres n'est pas sur le continent), vers la fin du siècle passé il y avait déjà des usagers de téléphone dans la ville, c'est ici qu'avait travaillé Lóránd Eötvös, composé de la musique Béla Bartók... En vain parlait-il français, anglais, allemand, il ne pouvait occuper la place qui lui était due qu'en tant qu'individu et non pas en tant que bourgeois de Budapest. Il n'y avait rien à faire, nous sommes restés en arrière, sommes passés à Parrièreplan, ayant été réduits pendant de longs siècles à un rôle secondaire, subordonné. Peut-être est-ce la satire de nous-mêmes provoquée par le sentiment du rôle secondaire qui nous avait été conféré pendant des siècles qui est la base de l'humour de Budapest. Cet humour amer et intolérant, reparait de temps en temps — pour ainsi dire par auto-défense — et conserve la bonne humeur, le bon moral, des Budapestois. C'est par là que s'explique aussi le « cynisme » de Budapest, qui souvent n'est rien d'autre que le bouclier servant à protéger la susceptibilité des habitants de la ville. Car les Budapestois sont susceptibles et particulièrement curieux. Un bulldozer, une voiture