Szilágyi András (szerk.): Ars Decorativa 25. (Budapest, 2007)

András SZILÁGYI: Mercurius navigans. Un pendentif en forme de bateau provenant de la collection Esterházy

ments de l’histoire ‘récente’ d’Europe. Sa méthode de travail suit la pratique courante de l’époque: il se propose de présenter, véri­fier et commenter les diverses informations recueillies, et ceci sur un ton qui se veut objectif mais qui est souvent assez tendan­cieux. Le choix du titre - II Mercurio overo hi- storia de’ correnti tempi - est tout à fait tradi­tionnel et, si on le compare avec les titres d’ouvrages historiques, surtout de pério­diques, parus à la même époque, il semble plutôt conventionnel. D’autant plus étrange est la composition graphique du frontispice, qui représente Mercure, le messager de la mythologie classique, sous une forme inso­lite: en gouvernant de main ferme son superbe navire pareil à une carrosse d’apparat il semble être le personnage principal d’une scène de triomphe typiquement baroque. En effet, Mercure, en héros mythique, tri­omphe ici: ni la fureur de Neptune, ni les foudres de Jupiter - nuages sombres menaçants, éclairs foudroyants à l’arrière- plan de la scène - ne l’effraient, il ne se soucie point des figures qui voudraient le détourner de son but. Nec errât, nec horret - ni ne s’égare, ni n’a horreur (des difficultés), comme annonce l’inscription de la bande­role fixée au mât du navire. Dans un sens donc, il sort de son rôle traditionnel; il n’est plus le messager des dieux qui, grâce à ses attributs bien connus, ’traverse les airs’ mais, comme on le lit sur l’inscription de la voile gonflée, le Mercurio de Vittorio Siri, auteur de l’ouvrage. Ce Mercurio est un héros intrépide qui fait face aux dangers menaçant son entreprise et surmonte toute difficulté. De cette façon, il devient en quelque sorte le „demi-frère” d’une autre figure de Mercure: celle qui apparaît sur le cycle de fresques de la Villa d’Este de Tivoli près de Rome (1609) et en laquelle l’historien de l’art d’aujour­d’hui, tout comme les contemporains ayant vécu au début du 17èmc siècle, reconnaît l’au­toportrait allégorique du peintre Federico Zuccari.11 Il y a, en effet, une parenté ’spi­rituelle’ entre les deux figures de Mercure, à cette différence évidente près que, dans le cas de notre frontispice, ce n’est pas d’un cryptoportrait de l’artiste Giacomo Piccmi qu’il s’agit mais de la représentation figurée de la mission que l’auteur de l’ouvrage, Vittorio Siri s’est fixé d’accomplir. Probablement, la plupart des contempo­rains de Siri étaient de cet avis. Du moins ceux qui eurent l’occasion d’avoir entre les mains le second volume au frontispice orné du Mercurio, publié en 1647 et qui furent en quelque sorte touchés par cette chronique contemporaine qui fournissait une multi­tude d’informations (parfois confidentielles) et dont les prises de position témoignaient parfois d’une hardiesse hors du commun. Ceux qui apprécièrent le courage et la finesse dont l’auteur avait besoin pour recueillir, publier et commenter les diverses ’actualités’ portant sur des affaires délicates. En tous cas, nous pouvons affirmer avec cer­titude que cette conception de la mission de l’historien fut comprise et acceptée de tous ceux qui connaissaient bien les travaux de Vittorio Siri et surtout de ceux qui avaient une relation personnelle avec lui. Tel fut le cas, entre autres, de Miidós [Nicolas] Zrínyi (1620-1664), poète et chef de guerre, figure éminente de la littérature baroque hon­groise. Grâce aux recherches effectuées aux dernières décennies en histoire de littérature hongroise, leur relation et les documents de leur correspondance sont suffisamment mis en lumière.12 Une des preuves importantes de cette relation est la composition allé­gorique du frontispice ornant le recueil de poèmes de Zrínyi publié sous le titre Syrène de la mer Adriatique en 1651 à Vienne qui, outre son épopée héroïque Le Siège de Sziget, contenait des poèmes lyriques. (Fig. 5.) L’auteur de cette composition, le graveur 46

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