Szilágyi András (szerk.): Ars Decorativa 17. (Budapest, 1998)
Lőrinc VAJDA: Une tapisserie française du XVIe siecle. Le personnage du roi Salomon de l'Ancien Testament en tant que „modele" d'un cryptoportrait d'Antoine de Bourbon, roi de Navarre
LŐRINC VAJDA UNE TAPISSERIE FRANÇAISE DU XVI e SIECLE LE PERSONNAGE DU ROI SALOMON DE L'ANCIEN TESTAMENT EN TANT QUE «MODÈLE» D'UN CRYPTOPORTRAIT D'ANTOINE DE BOURBON, ROI DE NAVARRE Le Cantique des cantiques a appartenu quasiment dès les débuts aux textes canoniques de l'Écriture Sainte hébraïque. Si l'on tient compte du problème délicat qu'une poésie dont le premier degré est purement erotique devait poser à la théologie chrétienne, il est tout à fait compréhensible que son interprétation allégorique ait été d'une rare immuabilité et extrêmement répandue - pour ne pas dire exclusive. Les racines de l'interprétation allégorique s'étendent jusque dans la tradition juive; les bases - d'ailleurs déterminantes jusqu'à nos jours - en ont cependant été établies pour l'exégèse chrétienne par les homélies et commentaires d'Origène. L'interprétation du texte se fait chez lui sur trois niveaux interdépendants: le premier consiste en une explication basée sur la narration, c'est-à-dire le chant nuptial (épithalame) chanté alternativement par le fiancé /époux/, la fiancée /épouse/ et le chœur (les amis du fiancé et les compagnes de la fiancée), au deuxième niveau, l'interprétation est ramenée au Christ et à l'Église, et finalement, au Verbe Divin et à l'Esprit Saint. La méthode et les doctrines d'Origène furent reprises (sans pour autant être imitées) au Moyen Âge par Grégoire le Grand, mais l'exégèse médiévale du Cantique des cantiques atteint son apogée dans le sermon de Saint Bernard de Clairvaux. En effet, bien que ce dernier rejette déjà clairement la lecture historique, et qu'il remplace l'interprétation allégorique par l'exposition d'une signification morale, son argumentation reste indéniablement fondée sur des bases origéniennes. Il est important de mentionner également l'interprétation mariale, selon laquelle le mariage mystique conclu entre le Créateur et l'humanité se consomme dans la figure de la Sainte Vierge. Ce type d'interprétation prend ses débuts déjà au IV e siècle (notamment chez Saint Ambroise), mais n'acquiert une forme définie et systématique qu'à partir du XII e siècle (par exemple chez Rupert von Deutz). Bien qu'il existaient, parallèlement aux interprétations mentionnées plus haut, certaines tentatives de moindre conséquence de lecture littérale du poème de l'Ancien Testament (cf. les commentaires de Théodore de Mopsueste au IV e siècle, ou celles d'Honorius Augustodunensis au XII e ), on peut établir que l'exégèse du Cantique des cantiques fut définie dès le départ par une interprétation allégorique ou spirituelle-morale. 1 L'évocation du Cantique des cantiques dans les beaux-arts fut fondamentalement définie par l'interprétation théologique en fonction. La large majorité des représentations reflète donc les différents types d'interprétation allégorique décrits plus haut, bien que les exemples représentant une interprétation littérale de la narration se multiplient à partir du XV e siècle. De ce point de vue il faut, nous semble-t-il, clairement séparer les illustrations réalisées pour l'édition d'œuvres littéraires de tous genres appartenant à la philosophie morale ou à