Szilágyi András (szerk.): Ars Decorativa 17. (Budapest, 1998)
Lőrinc VAJDA: Une tapisserie française du XVIe siecle. Le personnage du roi Salomon de l'Ancien Testament en tant que „modele" d'un cryptoportrait d'Antoine de Bourbon, roi de Navarre
l'exégèse d'une part et les éditions de Bible illustrées de l'autre. En ce qui concerne le premier groupe, c'est l'identification traditionnelle VïrgoEcclesia ou Vir go-Anima qui demeure la plus répandue jusqu'à la fin du Moyen Age et, bien que l'identification de la fiancée du Cantique des cantiques avec la Sainte Vierge soit clairement présente dans l'exégèse biblique à partir du XII* siècle, le trésor symbolique n'en sera mis par les beaux-arts au sendee du culte de la Vierge que deux siècles plus tard. La Sainte Vierge constituera cependant toujours le thème central de cette représentation, tandis que les motifs-clés du poème biblique, tels le lys, le jardin clos ou la tour de David n'y figureront qu'en tant qu'accessoires iconographiques. Ceux-ci ne dépasseront pas leur statut «secondaire» même lorsque la représentation se trouvera complétée par telle ou telle brève citation rendant explicite et univoque l'association en règle générale tout simplement suggérée. Assez étrangement, la situation est complètement opposée dans le cas des illustrations parues dans les différentes éditions de la Bible, puisque certaines scènes du Cantique des cantiques y acquièrent un rôle indépendant. De surcroît, l'évocation, qui se détache de plus en plus des traditions assignées au préalable par l'interprétation allégorique, rejoint de plus en plus souvent une lecture historique et concrète du poème. Ces illustrations représentent souvent le fiancé et la fiancée dans une salle de trône, ou alors dans le hortus conclusus (le jardin qui constitue le décor traditionnel des compositions) en tant que roi et reine et en compagnie des amis du fiancé ainsi que des filles de Jérusalem, assistant «discrètement» à la scène dans l'arrière-plan. La tapisserie française du XVI e siècle, connue jusqu' à maintenant sous le titre Roi et reine, qui constitue l'une des pièces les plus belles et les plus souvent publiées de la collection du Musée des Arts Décoratifs de Budapest mérite une attention spéciale d'une part à cause de la particularité de sa composition, et d'autre part à cause du caractère mystérieux du texte de la banderole se trouvant au-dessus de la tête des personnages. 3 Il est certain que la clé de l'interprétation de la scène représentée sur la tapisserie se trouve dans le texte de la banderole, mais cette dernière n'a jamais pu être résolue jusqu'à présent. En effet, malgré l'abréviation CANT'7 inscrite au-dessus de la banderole, qui semble fournir une indication univoque concernant la source du texte cité notamment qu'il s'agit d'un passage du chapitre VII du Cantique des cantiques -, la mauvaise lisibilité du texte, le nombre de fautes d'orthographe ainsi que d'autres difficultés embarassantes auxquelles nous reviendrons plus tard empêchèrent l'identification du fragment en question bien que toutes tentatives aient été lancées de ce solide point de départ. Plus de la moitié des mots figurant sur la banderole semblent être identifiables à première Mie. En remplaçant par des points les parties illisibles et celles qui posent des difficultés de lecture, nous obtenons le résultat suivant: 0 ... le prinche Conbien son ... tes pas Je suis a mon bien ... Et ... moy ... son plaisir Un examen plus minutieux du tout premier fragment de la banderole permet de clarifier l'une des parties problématiques: en effet, le milieu du premier mot remplacé ci-dessus par des points de suspension a été «corrigé» au moyen d'une pièce rectangulaire de teinte légèrement plus pâle que la partie tissée qu'il remplace, et dont les bords supérieur et inférieur suivent exactement la ligne des fils de chaîne. Il est tout à fait imaginable que ce détail fut insérée lors d'un travail de réparation ultérieur de la part d'un «restaurateur» inconnu du XIX e siècle qui n'ait pas apporté