Folia Theologica 21. (2010)
Erdő Péter: Le rapport entre l'Eglise et l'Etat dans la théologie de l'Eglise Catholique
LE RAPPORT ENTRE L'EGLISE ET L'ETAT DANS LA ... 13 3. Développements au Moyen Age et dans les Temps Modernes La distinction entre le domaine religieux et mondain, déjà clarifiée à la fin de l'Antiquité, fut en partie effacée au début du Moyen Age sous l'influence de la pensée germanique et réglée seulement à la suite des conflits de la querelle des Investitures (1075-1122). Cette querelle n'était cependant pas un combat entre l'Etat et l'Eglise, mais plutôt un combat de compétence entre le pape et l'empereur en tant qu'autorités suprêmes d'une seule chrétienté17. Même si l'Eglise a revendiqué une certaine souveraineté aussi dans les choses du monde, dans le cadre de la théorie des deux glaives représenté par Boniface VIII dans sa bulle « Unam Sanctam », cette conception a été exprimée de façon beaucoup plus nuancée par Francisco Suárez et Roberto Bellarmino18. En parlant d'une « potestas Ecclesiae indirecta in temporalibus », on entend la possibilité d'une disposition ecclésiale dans les affaires du monde pour le salut des âmes (« ratione peccati »). Cette possibilité - qui ne concerne que les tribunaux - existe jusqu'à aujourd'hui. Dans le canon 1401 du Codex Iuris Canonici de 1983, on lit : « De droit propre et exclusif, l'Église décide :(...) de la violation des lois ecclésiastiques et de tous les actes qui ont un caractère de péché, en ce qui concerne la détermination de la faute et l'infliction de peines ecclésiastiques ». Pour expliquer correctement le point de vue ecclésial médiéval, il faut tenir compte du fait que le pouvoir de l'état au Moyen Age n'était pas sécularisé comme aux Temps Modernes, mais était conçu de façon sacrale-chrétienne. Un jugement moral avec l'autorité du magistère a nécessairement eu des conséquences dans le domaine de la vie politique et juridique. L'absolutisme et les Lumières se sont efforcés à soumettre l'Eglise à l'état et ont essayé de dissoudre l'Eglise dans l'état. Cela a enclenché un processus de réflexion qui a abouti à la rédaction du premier traité catholique sur le lus publicum ecclesiasticum. L'école de Rome du XIXe siècle a continué à développer cette idée fondamentale en parlant de l'Eglise en tant qu'une société parfaite. Bien sûr cela ne veut pas dire que le visage terrestre de l'Eglise est sans 17 Mantl, W., Kirche und Staat, 1352. 18 Cfr. par ex. Bellarminus, R., De potestate Summi Pontificis in rebus temporalibus, Romae 1610.