Tátrai Vilmos szerk.: A Szépművészeti Múzeum közleményei 85. (Budapest, 1996)
FÁY, ANDRÁS: Le dilemme d'une mise au jour. La restauration de VAutoportrait d l'artiste avec sa femme et son fils par Johann Kupezky
Son tableau représentant Michael Kriesinger à la Galerie nationale de Prague, par exemple, illustre bien que la reprise n'est nullement un phénomène isolé dans l'œuvre de Kupezky (figs. 12-13). L'examen radiographique effectué avant la restauration a mis en évidence des repeints : ainsi la figure masculine vêtue d'une armure portant casque et bouclier portait à l'origine un tout autre costume. L'histoire du tableau peut être aisément reconstituée : selon une note de 1830, le personnage qui y figure était bardé de fer. 15 Comme en témoigne l'inscription qu'elle porte, l'œuvre fut réalisée à Rome aux alentours de 1700. Cela prouve que le changement remonte bien loin dans le temps. Curieusement, la couche supérieure modifiée est moins visible aux rayons X que la couche sous-jacente, très riche en détails précis. Le degré de fini de cette dernière dépassait largement celui de la surface, au point que rien ne semblait justifier les modifications apportées. La radiographie révèle également la qualité de la matière picturale utilisée. La première couche de peinture a une absorption des rayons plus forte que la seconde, ce dont on peut conclure que Kupezky appliquait des couleurs claires et des pigments mélangés avec du blanc de plomb soit étendus en couche empâtée et épaisse, soit avec moins de liant et plus de pigment. 16 Il est donc particulièrement intéressant de s'interroger sur les repeints du triple portrait de Budapest, car ils ont apporté des changements à la représentation des proches les plus intimes de l'artiste et l'artiste lui-même. Pourquoi celui-ci n'était-il pas satisfait de la première version pourtant d'un fini parfait et de bonne qualité? Il est difficile de deviner les raisons inconnues qui le poussèrent à remanier une œuvre déjà achevée. Ne parvint-il pas à traiter dans un premier temps l'ensemble de la surface picturale et dut-il mettre de côté le tableau pour le reprendre un peu plus tard ? Dans la deuxième phase des travaux, eut-il l'idée de modifier des détails déjà élaborés, et la mise en place de nouvelles couches obligea le peintre de pousser plus loin? Ce qui est certain c'est qu'à l'état final du tableau - avant notre restauration donc - la figure de l'artiste s'intégrait mieux dans l'ensemble par un coloris plus sobre, plus puritain, moins voyant. Une telle modification pourrait s'expliquer par l'évolution de sa carrière et de son état d'âme. Au crépuscule de sa vie, ayant subi des événements tragiques et des pertes, Kupezky dut porter un regard différent sur sa famille et sur lui-même. Désireux de conserver quelque chose de «l'éclat» d'autrefois, mais aussi de cacher certains détails, avec le recul du temps, il vit peut-être autrement sa femme et il se vit aussi de manière différente. Le changement conserverait alors les traces de cette évolution. 15 Safafik, op.cit. (n.3), p. 124. «Porträt des Michael Kriesinger von Eckersfeld in Helm und Harnisch. Vielleicht es sich um das seinerzeit in Nürnberg, Gem.V280., verzeichnete Gemälde. Es kam später in der gräfl. Nostizschen Besitz, wie nachstehende Aufzeichnung im Protokoll obiger Gemäldegalerie vom Jahre 1830 beweist : Nr. 1084 Graf Josef Nostitz. Ölgemälde auf Leinwand. Porträt eines jungen Mannes mit Helm, Harnisch und Schild. Er halter die rechte auf der Brust, lebensgrosse halbe Figur, 2.10 x 4.10. Hinter dem Bild liest man : «Michael Kriesinger ab Eckersfeld , aetatis 23to ann. Pinxit Romae Kupetzky, Anno Domini 1700». 16 Le modèle a les bras croisés, il porte au cou une écharpe blanche tenant lieu de cravate, et un manteau orné semblable à une chemise. Sur la radiographie, le visage de la couche sous-jacente paraît également beaucoup plus vivant que celui du repeint.