Radocsay Dénes - Gerevich Lászlóné szerk.: A Szépművészeti Múzeum közleményei 30. (Budapest,1967)
GARAS, CLAIRE: Le tableau du Tintoret du Musée de Budapest et le cycle peint pour l'empereur Rodolphe II
Bohême, et c'est la statue d'Héraclès qui se dresse dans l'arrière plan du tableau allégorique de Hans von Aachen, peintre de la cour impériale, où on voit représenté le génie de la peinture avec les Muses. Sur la composition de Sustris, connue par la gravure de Sadeler, glorifiant la régence de Maximilien de Bavière on voit Héraclès qui choisit entre la vertu et le péché, avec en haut les dieux de l'Olympe et dans l'arrière plan les Muses dans un bois faisant de la musique aux côtés de la Vertu. Le poète Boissard représente dans son «Parnassus cum imaginibus Musarum» (Francfort 1601) Héraclès comme le Protecteur des Muses tenant la lyre (fig. 32). 30 Les Habsburg qui se sont considérés comme les héritiers immédiats des empereurs romains, ont, depuis l'ascension de la dynastie, donc le règne de Maximilien vénéré Héraclès, l'idéal de l'imperator, comme leur symbole spécifique. 31 Il était particulièrement fréquent de faire allusion à Héraclès en rapport avec l'empereur Rodolphe, et rien ne semble plus naturel qu'on ait choisi pour un cycle exécuté pour lui le mythe d'Héraclès comme sujet de la représentation. Mais, autant que la figure d'Héraclès est populaire et fréquente dans la peinture de la Renaissance tardive, autant rare et inhabituelle est la série de scènes qu'on rencontre sur les tableaux peints par le Tintoret pour l'empereur. Nous sommes ici en présence de représentations curieuses, presque uniques, et le caractère insolite des sujets prouve que le peintre a travaillé selon un programme spécial qui lui était imposé. La détermination du programme, l'expression de son contenu allégorique étaient dues sans doute à un conseiller humaniste très calé dans la littérature, qui, selon toute vraisemblance, avait utilisé pour point de départ une ou plusieurs sources littéraires. 3- Nous n'avons, jusqu'à présent, découvert qu'une seule source littéraire qui contenait la série intégrale des scènes représentée par le Tintoret, et c'est l'<<Ercole» de Gregorio Giraldi, paru, en 1557, à Modène. Les détails particuliers et la forme spéciale des noms portent tous à croire que c'est de ce poème, écrit également pour un prince, que l'auteur du programme et le peintre aient puisé le sujet des diverses scènes. On voit figurer chez Giraldi la légende de la genèse de la Voie Lactée et de la création du lys, tel que l'avait représenté le Tintoret sur le tableau de Londres. 33 Jupiter planant dans les hauteurs met le petit Héraclès sur le sein de Junon dormant. La mère des dieux réveillée en sursaut repousse l'enfant qui, cependant, a déjà bu du lait qui lui donne l'immortalité. Les gouttes de lait qui coulent de son sein se transforment dans le ciel en étoiles, la Voie Lactée, et sur la terre en lys (fig. 27). 34 La représentation ayant pour sujet l'enfance d'Héraclès et en même temps son immortalité, est suivie d'une scène d'amour : la scène d'Héraclès avec Iolé et puis celle du faune qui 30 C h y t i 1, K. : Die Kunst in Prag zur Zeit Rudolf II. Prag, 1904 ; P a n o f s k y, E. : Hercules am Scheidewege. Leipzig, 1930. 31 B r u c k, G. : Habsburger als Herculier. Jahrb. der kunsthist. Sammlungen in Wien, L. 1953, p. 191. 32 «Jedes Werk musste, um dem Kaiser zu gefallen, einen Sinn haben, der dem profanen Betrachter entging und sich nur dem Eingeweihten enthüllte». V. S c h w a r z e n f e 1 d, G. v.: Rudolf II. Der Saturnische Kaiser. München, 1961, p. 97. Un des conseillers principaux en matière d'art de l'empereur était Ottavio Strada, fils de Jacopo Strada. C'est à lui que revint le plus souvent la tâche d'établir le sujet des représentations emblématiques et allégoriques. Des relations entre le Tintoret et Ottavio Strada témoignent le portrait de Strada peint en 1569 (Amsterdam, Rijksmuseum). 33 Lili Gregori Giraldi Opera Omnia. Lugduni Batavorum, 1696, I, p. 573. 34 M a n d o v s k y, E. : op. cit., p. 88, cite la Geoponica, un ouvrage botanique d'origine byzantine, éditée, en 1538, à Venise, et la médaille de Tommaso Rangoni, comme ayant inspiré le Tintoret en représentant la genèse de la Voie Lactée et du lys. Ces motifs étaient assez généralement connus ; un tel motif a figuré dans la publication d'emblèmes d'Alciati, très populaire, et cela en rapport avec les bâtards, et les enfants adoptifs, comme emblème de l'amélioration de leur sort. (V. Omnia Andreáé A 1 c i a t i V. C. Emblemata. Roma, 1602, p. 656. «In Nothos» CXXXVIII.