Radocsay Dénes - Gerevich Lászlóné szerk.: A Szépművészeti Múzeum közleményei 21. (Budapest 1962)
PIGLER, ANDRÉ: Notices sur quelques portraits néerlandais
des siens disparus, en le montrant au spectateur ! Un exemple particulièrement éloquent de cette coutume est le portrait, conservé à Berlin, d'Amélie de Solms par Willem van Honthorst, où la dame représentée tient le portrait oval de son mari disparu, le duc Frédéric-Henry d'Orange. Le Musée des Beaux-Arts de Budapest conserve lui aussi un tel tableau flamand, le grand portrait de famille de Cornelis de Vos (fig. 40), où le mari, sans doute dans le cercle de sa seconde femme et de ses enfants, tend vers le spectateur le petit portrait en buste de sa première femme. * Nous avons mentionné le portrait de famille de Gonzales Coques (fig. 42), cette splendide représentation d'un citoyen de qualité anversois (peut-être Jacques vanEyck), de sa femme, de ses deux fils adultes, de ses trois filles à marier et de son secrétaire. Malgré son format relativement réduit, ce tableau est un véritable chef-d'oeuvre de l'art du portrait représentatif flamand. Pourtant, ce n'est pas à sa haute qualité artistique qu'il faut attribuer les nombreuses répliques faites d'après celui-ci : l'artiste l'a lui-même répété une fois, et il se peut qu'aussi ses aides d'atelier l'avaient plusieurs fois copié. Nous avons connaissance de trois ou de quatre répliques plus ou moins fidèles (Leipzig, Paris, etc.). 13 Le nombre des exemplaires correspond bien au nombre des jeunes membres de la famille, si on en déduit un fils, qui, comme son costume permet de conclure, a choisi la carrière ecclésiastique. On suppose donc à juste titre qu'en dehors du premier exemplaire exécuté pour les parents — à notre avis c'est le tableau de Budapest, — une copie a été faite pour chaque enfant, destinée à mentenir la pensée et le souvenir de la solidarité familiale pour les temps où ils entreront dans une nouvelle communauté conjugale. Le nombre considérable des répliques et des variantes est un phénomène qu'il convient d'observer dans ses rapports contemporains. A en juger d'après les costumes, et, selon la date de l'exemplaire de Leipzig, nous sommes en présence d'une représentation exécutée dans les années 1650. En ces temps-là les commandes en plusieurs exemplaires des portraits de famille était une coutume qui — mutatis mutandis — rappelait la mode des photographies de l'époque contemporaine. Le Musée des BeauxArts conserve deux tableaux de Nicolaes Maes, portant les figures assises vues jusqu'aux genoux de Jacob Trip, commerçant de Dordrecht, et de sa femme Margaretha de Geer. Cex tableaux ont été peints dans les mêmes années que le chef-d'oeuvre de Coques. Le fait que le commerçant avait commandé son portrait et celui de sa femme aussi à Maes, puis à Jacob Gerritsz. Cuyp et à Rembrandt, 14 ne peut être expliqué autrement que les vieux époux ont voulu laisser à chacun de leurs enfants un souvenir d'eux-mêmes. Les phénomènes démontrés sur des tableaux du Musée des Beaux-Arts, ou en rapport avec ceux-ci, sont assez évidents. Le fait qu'ils ont pu jusqu'à l'heure actuelle échapper à l'attention des historiens d'art, est dû sans doute aux rapports seulement indirects qu'ils ont avec les propriétés artistiques des créations en question. Ils découlaient plutôt des coutumes sociales de la bourgeoisie et ils les accompagnaient. Mais c'est justement en tant que phénomènes sociaux qu'ils ne seront peut-être pas négligeables pour une histoire synthétique de l'art du portrait néerlandais, si un jour elle sera écrite. ANDRÉ PIGLER 13 Catalogue de 1954 de la Galerie des Maîtres Anciens. Texte, pp. 121, 122. 14 Hofstede de G r o o t, C. : De portretten van het echtpaar Jacob Trip . . . « Oud-Holland » XLV, 1928. pp. 255 — 264.