Hedvig Győry: Mélanges offerts a Edith Varga „Le lotus qui sort de terre” (Bulletin du Musée Hongrois des Beaux-Arts Supplément 1. Budapest, 2001)
CLAUDE VANDERSLEYEN: Les peintures minoennes de Tell el-Dab'a (Avaris) et l'hypothese d'un mariage princier?
révèle des contacts certains avec une civilisation extérieure à l'Egypte: une hache dont un côté de la lame est orné d'un griffon; un poignard où la transition entre le manche et la lame est constituée par une tête de taureau, de face, tête dont les cornes enserrent la lame à son départ; sur le bandeau qui suit l'axe de la lame, on voit, d'un côté, un lion poursuivant un jeune taureau, tous deux en "galop volant", scène que "regardent" quatre sauterelles en file. 14 De tels décors ont fait penser au monde égéen. 15 Le cercueil dans lequel on a trouvé des armes et des bijoux d'Amosis et quelques objets appartenant à son prédécesseur Kamosis était celui d'une reine appelée Ahhotep. Le visage de cette reine, tel qu'on le voit sur son cercueil, est étonnant de vitalité, de joyeux épanouissement. On a cru que cette Ahhotep-là était la mère d'Amosis, laquelle s'appelait aussi Ahhotep. Dans une grande stèle (Caire CG 34001), le roi Amosis consacrait trois lignes à un bel éloge de sa mère qui l'avait aidé à faire face aux difficultés d'un règne où il avait fallu rétablir l'autorité pharaonique après un siècle d'une éprouvante occupation hyksos et d'une lente reconquête. Cette reine recevait, sur cette stèle, le titre de "souveraine des rivages des Haou Nebout" . On était tout à fait convaincu jadis que ces Haou Nebout étaient les Grecs; comme le 16 e siècle avant J.C. paraissait un peu tôt pour que les Grecs se manifestent dans l'histoire 16 et comme la Grèce était loin, on a pensé plutôt aux Égéens, voire aux Cretois. 17 Le visage au sourire si pétillant de cette reine Ahhotep 18 a fait penser à certains aspects, si neufs, de l'art crétois, où les femmes ont de grands yeux éveillés. De l'ensemble de ces indices, on conçut l'idée d'une intervention crétoise pour aider Amosis à expulser les Hyksos, intervention due au fait que la mère d'Amosis, épouse de Séqénenré, aurait peut-être été elle-même - pensait-on " Images de la hache : cf. M. Saleh - H. Sourouzian, Die Hauptwerke im Ägyptischen Museum Kairo. Offizieller Katalog. Mayence 1986, n° 121; du poignard: H. Schäfer - W. Andrae, Die Kunst des alten Orients, Berlin 1925, p. 297; J. Leclant et alii., L'Empire des Conquérants, coll. l'Univers des formes, Paris 1979, fig. 270. rs II n'est pas impossible que ces armes aient été fabriquées à une époque où les Hyksos étaient encore à Avaris car le signe de la lune, dans les noms Amosis et Ahhotep écrits sur divers objets trouvés dans le cercueil de la reine Ahhotep (Tlttns et i r h-hlp où le mot i r h est rendu par l'image de la lune), se présente sous la forme d'un croissant dont les pointes sont tournées vers le haut et dans le creux duquel s'aperçoit le disque lunaire; cette forme est attestée encore en l'an 18 du régne; une nouvelle forme du signe existe au moins dès l'an 22. La prise d'Avaris a probablement eu lieu entre ces deux dates (cf. Cl. Vandersleyen, L'Egypte et la vallée du Nil, II, Paris 1995, pp. 215-216). "' Le terme Haou Nebout apparaît d'ailleurs déjà sous l'Ancien Empire, près d'un millénaire plus tôt: cf. par exemple au temple funéraire de Sahouré (Sethe, Urk. 1, 169) ou encore dans les Textes des Pyramides, (; 629b, 1631, etc. 17 Dans son étude exhaustive sur les Haou Nebout, J. Vcrcoutter, Les Haou Nebou, BIFAO 48 ( 1949), a pu montrer que ce terme n'avait jamais désigné des Égéens (cf. sa conclusion, pp. 201-202); sur leur exacte localisation, cf. ci-après, note 25. " Cf. la figure mentionnée ci-après, note 23.