Pogány Ö. Gábor - Csengeryné Nagy Zsuzsa dr. szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Évkönyve 1. szám. (MNG Budapest, 1970)
mais, comme vous le voyez, j'ai beaucoup à faire, etc. (Vous connaissez bien déjà les lettres qui commencent ainsi.) Mais maintenant au sujet ! Dans votre dernière lettre vous m'avez demandé de continuer à vous soumettre, de temps en temps, mes essais poétiques. Tout d'abord je vais immédiatement satisfaire votre désir et je joins à ma lettre une légende que j'ai écrite, au cours de l'hiver, sur Varbre de Màtyéis. Lisez-la. L'arbre de Mátyás As-tu vu, peut-être, parmi les rochers de Buda, l'arbre de Mátyás sur les flancs de la colline János? Ou t'en a-t-on parlé? Le pauvre, il s'est effondré, il n'en reste que le tronc, mais la mort ne nuit pas à son souvenir. Écoute donc sa légende. Jadis, le roi Mátyás de grande renommée qui si longtemps jouit de la vue de ce paysage, partit ci la chasse joyeusement ; mais, fatigué de la poursuite du gibier et l'obscurité l'empêchant de voir, il se reposa au pied de l'arbre. Comme il avait coutume, il suspendit son arc à une branche, posant sa tête sur le bras droit il s'assoupit. Dans son rêve, il vit son peuple grand, ses armes faisaient trembler la moitié du monde, elles étaient tachées de sang, mais jamais de souillure. Ijes Turcs cruels reprirent vie mais son bras brisa leur force et le péril disparut. Lui, il voyait le fruit de ses fatigues et la prospérité dans les belles marches de son pays. Notre roi s'en réjouissait si grandement. Pendant qu'il rêvait ainsi sous l'arbre, un courrier se présenta devant lui et il se réveilla. « Sire, empresse-toi, Le Turc vient, les Hongrois sont en péril, Accours au secours de ton peuple. » Et laissant là son arc, le sang bouillonnant dans ses veines, le roi se précipite avec son armée vaillante sur le Turc et ayant sauvé son pays de ces hordes sauvages, son chef se couronna de lauriers. Et pendant que le Hongrois sauvait son pays, tu aurais dû voir l'arbre orgueilleux dédaignant de toute sa hauteur ses compagnons . . . Mais le Turc occupant Buda, l'arbre, hélas, se fendit en deux, et depuis, à cet endroit, il périt. Maintenant, je vais vous parler un peu de moi, de mes distractions. Avant-hier dimanche et le samedi d'avant, monté à cheval, je suis allé aux courses ; hier, j'ai assisté à un concours de canotage; tout cela m'a bien amusé. Les détails, vous pouvez les lire dans les journaux, c'est la raison pour laquelle je ne vous en dis rien. Mais, concernant le concours, je dois vous dire que Pabló n'a pas gagné parce que son canot était très mauvais (je devais vous dire ces choses surtout j>ar égard à mon tonton) . Et que Dieu vous bénisse, mon bon monsieur Keleti. Tout le monde, à commencer par Papa qui, ce matin, est parti pour Szenttornya jusqu'à Mariska, en un mot, toute la famille et aussi monsieur Vécsey vous envoient leurs salutations et moi je, suis votre élève reconnaissant Lorand élève de VI e Vous devez connaître cette sorte de signature usitée da?is les livres scolaires. IV. Le 24 janvier 1868. Cher Monsieur Kelety, avez-vous déjà été à Heidelberg? Et avez-vous vu le vieux Bunsen? Deux choses qui valent la peine de faire un grand voyage. . . et je ne doute pas qu'au cours de l'été prochain tous les deux nous pourrons admirer ces beautés. Heidelberg n'est pas merveilleux, Bunsen n'est pas beau, mais il y a en chacun d'eux quelque chose qui remplit d'une douce satisfaction celui qui peut voir quotidiennement l'un et toucher Vautre. Et cette douce satisfaction provoque l'appétit et le reste ne peut manquer. Répondant à votre question, « quel mal peut-il y avoir », je vous dis que je ne peux même m'imaginer quelle sorte de mal pourrait-il y avoir à Heidelberg. Si je voulais parler de l'emploi de mon temps, je devrais diviser la semaine en jours et les jours en heures et je pourrais mettre dans ces carrés des noms illustres; ceux de mes professeurs : Bunsen, Kirchhoff, Herzl, Helmholtz. Le soir je passe au Musée et de là au restaurant « Goldenes Ross ». Ce Goldenes Ross n'a pas son pareil, il n'y a pas de cure Kneipe, pas de bière, seulement du vin et beaucoup de juifs et quelques belles juives. La vieille juive épaisse, assise dans son fauteuil près du poêle, est la sœur de Berthold Auer-