Pogány Ö. Gábor - Csengeryné Nagy Zsuzsa dr. szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Évkönyve 1. szám. (MNG Budapest, 1970)
60. Gusztáv Kelety (1834-1902) : Lu maisonnette de plaisance dite Karthausi. Vers 1860 Kelety Gusztáv (1834—1902): A Karthausi-lak. 1860 k. de dessin, Károly Kelety. Son visage et sa tête sont de forme allongée ; l'expression du visage et surtout celle des yeux sont trop rêveuses pour un enfant de dix ans. Nous serions tenté d'attribuer cela à la mode ou à la conception romantique du peintre, si nous ne nous rappelions pas une lettre de József Eötvös écrite en I860 7 et adressée à son fils alors âgé de 21 ans et faisant ses études à Koenigsberg : « Personne ne sait mieux que moi que tu es poète sans écrire de poèmes. Tu es poète par tes idées et par ton tempérament et, sous ce rapport, tu es bien mon fils comme; par plusieurs autres qualités, bonnes ou mauvaises. » Cette analyse de l'enfant explique beaucoup de choses quoi qu'elle concerne la vie intérieure et non pas l'extérieur du modèle. Nous pouvons en croire le père, auteur du Chartreux (Karthausi) ce roman psychologique très profond, que cette rêverie apparaissait en effet, quelquefois, sur le visage de l'enfant. D'ailleurs l'enfant de dix ans avait déjà, malgré son jeune âge, une personnalité assez complexe. D'après le témoignage de ses lettres, il apprenait des langues étrangers et faisait de l'escrime 8 , collectionnait, comme il le disait lui-même, des médailles anciennes 9 , composait des poésies qui n'étaient ni meilleures ni pires que celles de ses compagnons et en plus 10 , il se sentait déjà irrésistiblement attiré par la nature. C'est dans ces années passées dans la villa à Svábhegy que Loránd Eötvös commençait à s'adonner au tourisme sous la direction de son père 11 , qu'il s'est épris d'enthousiasme pour les montagnes si bien qu'il garderait cette affection jusqu'à sa mort et qu'il entreprendrait, à l'âge de soixante-sept ans, l'ascension du Lomnitz 12 . Kelety, consciemment ou instinctivement, place son élève dans le milieu qui lui convient le mieux, en l'entourant de montagnes, de rochers et d'arbres sur le bord d'un lac. Le fîiet à papillons et le papillon attaché à la tunique bleue deviennent des symboles, ceux de la nature donWenfant, séduit par elle, cherchera plus tard infatigablement à pénétrer les secrets. Et pour compléter cette analyse, ajoutons que deux ans après l'exécution de ce portrait, en hiver 1860, le jeune Loránd Eötvös sera mêlé dans son école à une affaire politique inspirée par l'esprit national de la lutte d'indépendance de 1848. Il devra uniquement à la bienveillance de ses professeurs de s'en tirer sans trop de mal, comme une lettre de son père adressée le 6 avril à Imre Mikó nous l'apprend 13 . A ce portrait s'ajoute la série d'aquarelles que Gusztáv Kelety, précepteur chez les Eötvös, a peintes de leur villa à Svábhegy, dans les dernières années 1850.
