dr. D. Fehér Zsuzsa - Pásztói Margil szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Közleményei 1. szám (Budapest, 1959)

53. Gyula Derkovits (1894-1934): Le prêtre Lőrinc. 1928-29. Derkovits Gyula (1894-1934) : Lőrinc pap. 1928-29. à celle des couleurs, mais dans l'élévation de la pensée intellectuelle et poétique, la composition lyrique et les moyens d'expression d'ordre supérieur aussi. Derkovits est de la race des grands poètes lyriques qui utilisent des métaphores subtiles et des symboles à la fois simples et pertinents pour communiquer leurs sentiments et leurs pensées. Le thème de ses tableaux, ainsi que celui de l'oeuvre analysée, a le plus souvent un caractère dramatique évident, mais il le traduit presque toujours sous une forme lyrique. Ce qu'il veut exprimer — et cela peut être un sujet grave —, il le dit généralement en mode mineur, pour nous servir d'une comparaison musicale. Cepen­dant, son langage lyrique n'est jamais obscur. Il a son franc parler et ce qu'il dit est toujours clair, direct et sans épuivoque. Sa voix rappelle parfois — dans le dessin et l'art graphique surtout — le claquement d'un fouet. Dans les études critiques consacrées à l'analyse de son art, on a fait souvent usage du terme de « constitution lyrique » (terme emprunté à la critique littéraire) pour désigner le caractère de son individualité picturale. L'expression est juste et peut être appliquée très bien à Derkovits parce que dans ce qu'il exprime, même s'il s'agit d'un thème des plus généraux — il parle toujours (directement ou indirectement) de [lui-même, de ses sentiments les plus personnels, mais ils les généralise, c'est-à-dire à travers son propre destin, il reflète chaque fois celui du prolétariat et du peuple opprimé en général, et réciproquement. « L'Ordonnance » apporte un té­moignage éloquent à ce que nous xenons de dire. L'expulsion des malheureux qui n'avaient pu payer leur terme, était un phénomène habituel dans la Hongrie de Horthy. Le logement, aussi misérable qu'il soit, est l'unique refuge du travailleur, il lui sert de « base d'opération » dans sa lutte pour le pain de chaque jour. Dans le cas de Derkovits, il assurait les conditions de la création artistique aussi, comme le rappellent les symboles du chat et de l'oiseau. Le pouvoir d'Etat bourgeois savait très bien que l'expulsion était un moyen des plus effi­cacies pour intimider le peuple en effervescence. On sait qu'il n'a pas eu pitié du peintre. Derkovits devait prendre sa revanche et il l'a fait. Le « Marchand de poissons » 8(i , (planche en cou­leurs, III.), exécuté en 1930, en porte le témoignage. Le lyrisme de Derkovits, lorsqu'il attaque l'ennemi directement, s'exprime par le ton du mode majeur. La satire mordante de ce tableau est amère comme le fiel du poisson et tranchante comme le couteau dans la main du marchand. Le peintre ne représente pas ici, en effet, un marchand de poissons quelconque, mais il figure la classe capitaliste elle-même comme il l'a fait dans les toiles « l'Homme au téléphone » et la « Dame » dont nous avons déjà parlé mais, cette fois, le contenu est plus détaillé. Pour étudier de près le talent extraordinaire qu'il a de créer des types et voir la méthode qu'il suit, il faut examiner les esquisses de dimension réduite dont la veuve de Derkovits a fait don au Musée en 1956. Ce sont des croquis rapides pris sur le vif, au cours de ses allées et venues par la ville, et fixés sur des bouts de papier grands comme la main et qui se tiennent bien dans le creux de la main. 87 Dans l'un de ses albums de croquis de toute petite dimension, il y a un dessin figurant la tête d'un marchand de poissons des halles à casquette de cuir caractéristique et, en bas de l'esquisse, quelques noms de poissons : «Soles, Crevette, Langouste, Harcsa (Silure) ». Sur le tableau noir indiquant les prix et placé dans le fond du tableau, on lit: «Silure, Brochet, Truite, Carpe, Sterlet ». Derkovits connaissait sans aucun doute très bien le terrain. Si l'on compare entre elles les deux figures de marchand de poissons, la différence saute aux yeux : le dessin représente un marchand petit bourgeois tandis que la figure de la toile est

Next

/
Oldalképek
Tartalom