Scientia et virtus. Un commentaire anonyme de la Consolation de Boece. Introduit et publié par Sándor Durzsa (A MTAK közleményei 5. Budapest, 1978)
9 dans notre commentaire, comme chez Pseudo-Jean, la perfection morale est fortement mise en relief. Citons les thèses qui s'y rapportent: "Philosophia specie perfectionis sue allicit homines sapientes" /édition de Silk: 7, 18-19./; "Omnes perfecti eidem innituntur [philosophiae], a qua quidem tota eorum perfectio consistit" /7, 33/; "Cum sublimioribus id est perfectioribus sublimiora loquitur et disputât" /13.12/. Comme le commentaire de Budapest, Pseudo-Jean emploie également le terme de "alienatio mentis": "Qui vero stupore deprimitur, alienationem mentis videtur habere" /23,19/. Des phrases qui concordent parfaitement: Pseudo-Jean: "Delatrasse id est irrationabiliter locutus fuisse"/53,1-2/; dans le texte de Budapest: "Delatravi id est irrationabiliter locutus sum". PseudoJean: "Cuius frenis etc. Id est cui domino vel duci servire est regnare" /54, 21-22/; dans le texte de Budapest: "Cuius agi frenis etc. Sensus est: cui servire regnare est." Comme nous l'avons déjà signalé dans nostre introduction, le commentaire ne se rapporte qu'au premier livre et au début du deuxième livre de la Consolation. Notre auteur inconnu glose toutes les phrases jusqu' à la quatrième prose du premier livre, puis, dans la suite, ses explications se rattachent à des endroits sélectionnés et accompagnent le texte original avec de grandes lacunes. Les passages choisis pour être expliqués du deuxième livre sont déjà très espacés et 1' auteur se contente parfois de donner un résumé du mètre qui suit au lieu de l'expliquer jusqu'à la fin. Sa méthode de travail est déterminée aussi par son objectif qui consiste à donner en premier lieu une analyse du contenu de la Consolation et non pas à faire une analyse métrique des vers et stylistique de la prose. Cette méthode est d'ailleurs courante dans les commentaires, car en ce qui concerne l'analyse métrique de la Consolation, on faisait appel à l'ouvrage de Loup de Ferrières qui s'y rapporte ou bien on y renvoyait le lecteur intéressé. Malgré son programme annoncé, notre commentateur s'étend longuement sur l'explication des expressions "carmen" et "mesti modi" à l'occasion du premier chant de la Consolation. Il vaut la peine de porter notre attention sur certains termes techniques qu'il emploie dans ce passege. L'adjectif "poetrica" par exemple dérive du substantif "poetria", terme qui fut employé déjà par Remi dans son commentaire sur Martianus mais qui ne devint généralement usité qu'au XII siècle. Gondisalvi mentionne ce terme dans le contexte suivant dans son ouvrage sur la classification des sciences: "Poetica sive poetria a poemate, instrumento scilicet suo, dicitur.. ."(15) L'art poétique de Jean de Garlandia a pour titre également "Poetria" et, dans un de ses manuscrits d'Italie du XII siècle, l'ouvrage int. De universitate mundi de Bernard Silvestre porte également le titre de "Poetria". (16) Dans notre manuscrit, le commentaire et la glose — que le moyen âge distinguait bien comme genres — entrent également en jeu. Les explications de texte pris aux sens strict, qui ne sont souvent que des énumérations de synonymes, se mêlent à de nombreux développements plus longs et de nature autonome au fur et à mesure des problèmes posés par le texte, selon le jugement de notre auteur anonyme. Ce procédé n'est pas neuf dans les commentaires sur la Consolation. Cette méthode fut portée à son plus haut degré de perfection par