Tátrai Vilmos szerk.: A Szépművészeti Múzeum közleményei 87. (Budapest, 1997)

EÖRSI, ANNA: Fuit enim Maria liber. Remarques sur l'iconographie de l'Enfant écrivant et du Diable versant l'encre

en même temps une croix arborescente, avec un pélican à son sommet et le Christ crucifié, dont le sang est recueilli dans une coupe par des anges. L'on est naturellement amené à penser que le sens symbolique de l'Enfant écrivant complète celui du Christ sur la croix. Ce dernier représente la Rédemption ; le premier, l'Incarnation. La façon dont la banderole étroite s'enroule autour de la Mère et du Fils, et les doigts de la Vierge divisés cette fois entre le rouleau et le sarment (cf. la Madone du livre d'heures de Bruxelles) rappellent la métaphore du Dieu s'inscrivant dans le sein virginal. 81 Au début du XV e siècle, plusieurs Vierges ont été taillées en Bourgogne (probable­ment à Dijon), où la Vierge et l'Enfant tiennent ensemble une large banderole. A mon sens, le rouleau symbolise aussi dans ces cas le corps de la Mère de Dieu. Sur une Madone de Claus Sluter-dont nous ne disposons que des copies, l'original étant perdu (fig. 23) -, l'Enfant Jésus est couché sur la hanche gauche de sa mère au lieu d'être assis sur son bras. 82 Il tient le bout enroulé du rouleau à sa droite, tandis qu'il désigne de l'index de sa main gauche la large banderole embrassant le corps de sa mère. La Vierge serre son enfant de sa gauche contre son corps, tout en posant à son tour la main sur le rouleau. Bien que la formule soit différente - ou plutôt plus simple -, l'intention de l'artiste fut la même que celle des peintres de la scène de dédicace du livre d'heures de Bruxelles et de la Madone de la « Korbgasse » : la Vierge tient dans la même main le rouleau, symbole de son propre corps, et l'Enfant dans lequel s'est incarné le Verbe. 83 L'idée en question - à savoir que le Logos incarné s'inscrit dans le corps virginal reçu de la Vierge - est exprimée didactiquement, mais en même temps transposée en « scène de genre » par la Madone de l'église paroissiale d'Einruhr (vers 1500). 84 Le large rouleau est posé directement sur le sein maternel. Assis sur le bras droit de la Vierge, l'Enfant nu le ramène d'une main sur le sein de sa mère, et y écrit de l'autre. La Vierge se sert des deux mains pour tenir et pour serrer contre elle-même l'Enfant et le bas du rouleau. 81 Une statue gardée au Hessisches Landesmuseum de Darmstadt, originaire elle aussi de la région du Rhin moyen (Heuchelheim, début du XV e s.) représente une autre variante de l'Enfant écrivant (Schiller, op. cit., I,p. 33, fig. 44). On y voit la Vierge debout sur le lion de la tribu de Juda {Genèse XLIX, 9), d'où il s'ensuit que le livre entre les mains de l'Enfant est celui scellé de sept sceaux de VApocalypse V, 5. 82 Francfort, Liebieghaus Museum Alter Plastik, Inv. n° 36; Corsaint; Paris, Musée de Cluny. Voir Maek-Gérard, M., Nachantike grossplastische Bildwerke Bd. II. italien. Frankreich, Niederlande 1380­1530/1540, Liebieghaus, Francfort-sur-le-Main, Melsungen 1981, pp. 129-130, Cat. n° 63, avec la bibliographie des ouvrages consacrés à ce sujet. 83 Les gestes d'écrire et de désigner sont équivalents dans ce cas. Voir p. ex. Exode XXXI, 18; Jean VIII, 6, 8, etc. Voir aussi la Vierge à l'Enfant, Dijon, Musée des Beaux-Arts, et sur cette œuvre : Quarré, P., Höhepunkte Burgundischer Bildhauerkunst im späten Mittelalter, Würzburg 1978, 33 (p. 72). Une autre Vierge debout, similaire à celle-ci, se laisse également ramener à un original slutérien : le Christ montre ici au spectateur un large rouleau étalé. P. ex. celle de la rue Porte-aux-Lions de Dijon, transférée au Louvre; Vesoul, coll. part. Zurich, Kunsthaus. Voir Schmoll gen. Eisenwerth, J. A., Die burgundische Madonna des hamburger Museum für Kunst und Gewerbe und ihre Stellung in der Sluter-Nachfolge, Jahrbuch der Hamburger Kunstsammlungen 6 (1961) pp. 7-28, fig. 6, 7 et 8. Voir aussi ibid., fig. 16 représentant la Madone de Saint-Jean-de-Losne : la Vierge a un livre ouvert dans sa gauche, et son enfant assis sur son bras droit tient un long rouleau devant le corps de sa mère. 84 Parkhurst, op. cit., fig. 15.

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