Tátrai Vilmos szerk.: A Szépművészeti Múzeum közleményei 87. (Budapest, 1997)
EÖRSI, ANNA: Fuit enim Maria liber. Remarques sur l'iconographie de l'Enfant écrivant et du Diable versant l'encre
Wiese de Sœst. Dispensatrice d'indulgences, elle attira bientôt des masses de pèlerins et devint l'ornement majeur des processions. Les supérieurs de la Wiesenkirche la transportaient avec ostentation à l'anniversaire de la consécration de la cathédrale dédiée à saint Patrocle, fête principale de la ville où chaque paroisse défilait avec son trésor le plus précieux. Les deux Madones à l'encrier de Westphalie sont pour ainsi dire les représentations picturales « modernes » de la statuette de culte. Le Christ habillé y croise aussi ostensiblement les jambes, mais le livre à sa main gauche est remplacé par un rouleau. D'un geste peu naturel, la Vierge courbe en arrière son poignet (seulement l'un des deux cette fois) et montre au spectateur sa paume où la pomme a cédé la place à l'encrier. A mon avis, le peintre a reçu pour tâche de transposer en peinture - sous une forme plus « moderne » - le thème de la statuette, et il a recouru à la Vierge à l'encrier du livre d'heures du Maître de Bedford pour représenter avec plus de réalisme le poignet renversé de Marie et les jambes croisées du Christ. Le message de la statuette et des tableaux est identique : la sagesse divine s'est incarnée dans un corps humain mortel. C'est tout ce que l'on peut avancer comme preuve sur la parenté spirituelle entre la célèbre statuette et les panneaux, à moins qu'on ne veuille prendre en compte l'existence de plusieurs œuvres similaires. Il est toutefois certain, à mon avis, que la genèse des deux tableaux est liée à la ville de Sœst. Le bouclier de saint Patrocle, protecteur de la ville, est orné d'un aigle couleur d'or aux ailes étendues et regardant à gauche sur un fond noir, et ce même oiseau apparaît encore sur le sceau et dans les armoiries de Sœst. 70 Cet animal héraldique signifie que la ville s'est placée sous la protection de l'Empire germanique. Les trois aigles couleur d'or sur fond noir, qui ornent la couronne de la Vierge de Budapest, et le motif à aigles du fond d'or du panneau de Berlin portent à croire que les deux tableaux ont été exécutés pour des commanditaires de Sœst. VI. La Vierge debout à l'Enfant écrivant dans la sculpture Parmi les statuettes représentant l'Enfant écrivant, la plus ancienne dont nous disposons a été exécutée un peu plus tôt que la miniature la plus ancienne qui nous soit parvenue. La Vierge de la chapelle dédiée à la Madone de l'église Saint-Juste d'Arbois a été vraisemblablement taillée entre 1375 et 1378 dans un atelier de Tournai (fig. 20). 71 La Madone apparaissant entre deux anges du portail sud de la basilique Saint70 Schwartz, H., Die Stadtsiegel von Sœst, Sœster Zeitschrift 67 (1954) pp. 9-12 ; Deus, W-H., Ikonographie des hlg. Patroclus, Sœster Zeitschrift 70 (1957) pp. 39-74 (45-77). 71 Die Parler und der schöne Stil 1350-1400. Europäische Kunst unter den Luxemburgern, 1 -6, Köln 1978, vol. I , p. 61. (J. A. Schmoll gen. Eisenwerth). Sur le premier exemple proposé par Squilbeck (op. cit.. p. 129), la Vierge de St. Trond (vers 1360), l'Enfant n'écrit pas, mais a un livre ouvert devant lui. Selon l'auteur, la Vierge tiendrait un encrier à la main. Didier, R.- Henss, M.- Schmoll gen. Eisenwerth, J. A., Une Vierge tournaisienne à Arbois (Jura) et le problème des Vierges de Hal. Contribution à la chronologie et à la typologie, Bulletin monumental 128 (1970) pp. 7-113. Sur la page 98, les auteurs se réfèrent à la pierre tombale gravée d'Amaury Dupont (t 1430) et de Jeanne de Bailli (t 1358) à Saint-Nicolas de Tournai, dans laquelle ils voient un exemple précoce du type iconographique en question. Or au lieu d'écrire, l'Enfant Jésus montre un livre ou un papier au spectateur.