Radocsay Dénes - Gerevich Lászlóné szerk.: A Szépművészeti Múzeum közleményei 30. (Budapest,1967)
HARASZTI-TAKÁCS, MARIANNE: Compositions de nus et leurs modeles
le plus souvent sous le prétexte de sujets bibliques qui, dans le dernier quart du XVI e siècle, s'est de plus en plus répandue, n'est donc pas l'invention du maniérisme, elle a, au nord et dans le midi, des racines profondes. Et dans les territoires allemands on voit, à côté des figures de Dürer, aux proportions parfaites telles des statues, les nymphes et les Venus gauchement sensuelles de Lucas Cranach dont les modèles rappellent plutôt les filles de bain (Bademädchen) du moyen âge finissant 18 que la déesse de l'amour. Le public commence à s'intéresser aux compositions compliquées demandant une vive imagination et de grandes connaissances historiques et mythologiques. Le déluge, le massacre des innocents, l'enfant prodigue, le festin des dieux, l'âge d'or, le jugement de Paris, la Diane au bain, Céphale et Procris, sont autant de sujets, autant de variantes. Pour représenter ces sujets, les gravures, les dessins et les copies de tableaux italiens de la Renaissance ne fournissent plus suffisamment de modèles. L'artiste plus exigeant ne peut utiliser le même groupement qu'une ou deux fois, et non dans n'importe quelle oeuvre. Mais la goût a lui aussi changé, et il fallut trouver un nouvel inspirateur et non un modèle proprement dit. Nous avons vu que l'amalgame des figures italiennes et des paysages néerlandais mélangeant les éléments de la nature, a donné naissance à des compositions lourdes et disparates. Il était besoin de modèles qui, dans l'esprit du maniérisme et correspondant à l'intérêt humaniste, puissent être utilisés dans les représentations d'histoires compliquées dont le contenu était difficile à démêler et qui témoignaient des connaissances anatomiques du peintre. Ce modèle était donné — toujours sous une autre forme — tant dans les Pays-Bas qu'en Italie. Il ne fallut que le trouver. En analysant les gravures de Dürer ou de Lucas van Leyden, représentant des nus on se rend compte combien ces figures, faisant presque l'effet de statues, sont plastiques et avec quelle précision anatomique elles sont dessinées. Ces figures réunissent l'idéal de la beauté à l'italienne reposant sur les traditions antiques, et la manière méticuleuse de l'art nordique. La gravure de Dürer figurant Adam et Eve, les couples de nus et les figures de femmes personnifiant les vertus, de Lucas van Leyden, exécutées dans les années 1530, rappellent indiscutablement les mannequins de bois taillées avec un soin méticuleux, desquels c'est pour la première fois A. Weixlgärtner qui a constaté qu'ils durent servir de modèle à Dürer non seulement pour ses études des proportions du corps, mais aussi pour ses représentations de nus. 19 Weixlgärtner, dans son article soulevant pour la première fois cette question, a prouvé, en apportant nombreux arguments, que Dürer a, dans quelques dessins représenté des mannequins aux membres mobiles, et aussi d'autres dessins lui permirent de déduire que le peintre a travaillé d'après ces mannequins de bois. L'illustre savant a reprit ce sujet un demi siècle plus tard et, en prenant en considération les publications entre-temps parues, a rassemblé toute une collection de mannequins de bois qui, selon l'opinion unanime des chercheurs, furent confectionnés dans la première moitié du XVI e siècle dans les pays allemands. 20 A l'intérieur des mannequins en forme d'homme ou de femme se trouvait un mécanisme très compliqué qui fonctionnait à la corde et par lequel on pouvait bouger non seulement les têtes et les extrémités, mais aussi les doigts et les orteils des poupées, même dans certain cas leur lèvre inférieure. La charmante paire de mannequins, publiée aussi 18 Une telle fille de bain figure dans les études de nus de Pisanello. Publié par M e d e r, F. J. : Die Handzeichnung. Wien, 1919, p. 395, fig. 155 ; Sur un dessin de Dirck Vellert, ibid. p. 396, fig. 156, et dans les manuscrits traitant de la vie du roi Venceslas. 19 W e i x 1 g ä r t n e r, A. : Dürer und die Gliederpuppe. Beiträge zur Kunstgeschichte Franz Wickhoff gewidmet. Wien, 1903, p. 86. 20 Weixlgärtner, A. : Von der Gliederpuppe. Göteborgs Kunstmuseum Arstryck. 1954, p. 39.