Szilágyi János György - Kaposy Veronika szerk.: A Szépművészeti Múzeum közleményei 4. (Budapest, 1949)
MARIE KÁLMÁN: Le centenaire des «Lutteurs»
est, par suite de la souplesse du modelé, des raccourcis hardis, des nuances bien réussies, une bravoure de métier, mais c'est un travail d'atelier par excellence, fait à l'éclairage d'atelier, qui contraste avec le vaste champ aux couleurs transparentes, les arbres baignées de lumière, le ciel clair, en somme, le fond tout entier. Ce que Delacroix écrivit à propos des Baigneuses, peut donc s'appliquer à juste titre aux Lutteurs. Cependant, malgré les blâmes que l'on ne cesse point de leur adresser, les Lutteurs sont, justement par leur dissonance et par la rencontre de leurs éléments hétérogènes, une composition originale et caractéristique de l'oeuvre ou, plus exactement, d'une certaine période de l'évolution artistique de Courbet. Plasticité et pittoresque, voilà les deux tendances qui, sans se fondre, se mêlent dans cette oeuvre avec la hardiesse souvent brutale de Courbet. Les auteurs d'études monographiques, Meier-Graefe en particulier, mentionnent souvent ce dualisme et constatent que des périodes plastiques et des périodes pittoresques alternent dans l'oeuvre de Courbet et qu'il arrive même que ces deux tendances se font jour dans la même composition. 15 Il est certain que cette tendance à la plasticité dans la peinture, de même que l'utilisation de dimensions souvent outrées (et cela à l'époque où les tableaux de petites dimensions étaient à la mode) tirent leur origine de l'aspiration insatiable de Courbet à parvenir à peindre des tableaux pleins de vie, capables de produire l'impression intense de la réalité absolue. C'était son aspiration d'artiste la plus élevée et c'est pour la réaliser, pour atteindre dans la peinture à un effet plus réel, plus monumental que Courbet recourut à la mise en oeuvre plastique. Notons tout de suite qu'en cela il n'est point isolé dans l'histoire de la peinture : de grands maîtres, des écoles entières même avaient professé, avant lui, des idées identiques. Il suffit peut-être de citer un seul nom, celui de Michel-Ange ; la composition des Lutteurs révèle que Courbet avait étudié à fond le grand maître italien à l'art de qui il voua, comme de nombreux témoignages l'attestent, une grande admiration. 16 Outre Michel-Ange, les Espagnols, surtout Zurbaran l'attirèrent également et son attachement à la peinture espagnole qui avait tout autres motifs que ceux du culte de ses contemporains (parmi eux les peintres de Barbizon) pour les peintres espagnols, fait mieux comprendre certaines caractéristiques de son art. Sous ce rapport il ne serait point dénué d'intérêt de suivre la ligne du développement de la peinture qui nous ramène de Courbet, passant par Zurbaran, jusqu'au Caravage. 17 Dans son journal, Delacroix compléta son opinion sur Courbet d'une remarque intérressante en disant que l'analyse de la composition de notre peintre «se rattache à la question de l'accord des accessoires avec l'objet principal, qui manque à la plupart des grands peintres». 18 Partant de cette remarque de Delacroix, MeierGraefe constate que la réalisation de l'accord en question atteignit une haute perfection dans la pratique de plus d'un artiste ou plus d'une école, alors que la peinture elle-même dégénérait et que cette dégénérescence se mesurait justement à l'emploi de méthodes Conventionelles, à l'utilisation de recettes courantes et il oppose à juste titre Courbet aux artistes de cette espèce. En effet, dans plusieurs 15 Meier-Graefe, J. : Courbet. Munich, 1921. 18. «Die nach Plastik strebende Perioden liegt also innerhalb der malerischen. . . Es wiederholt sich hier das Umgekehrte der Erscheinung die wir bei den Portraits Davids und zumal Ingres' beobachten, die in die der Plastik zueilende Ausdehnung mehr oder weniger isolierte, malerische Tendent hineintragen.» "Genthon, I. : op. cit. 17-18. 17 Courbet étudia longuement au Louvre l'une des plus belles oeuvres de Zurbaran, «Les Funérailles de Saint Bonaventure». 18 Delacroix: op. cit. II. 160.
