Hedvig Győry: Mélanges offerts a Edith Varga „Le lotus qui sort de terre” (Bulletin du Musée Hongrois des Beaux-Arts Supplément 1. Budapest, 2001)
CHRISTIAN JACQ: La conciliation des contraires comme aspect fondamental de la pensée égyptienne
Atoum, qui tire de lui-même sa substance créatrice pour la manifester sous la forme d'une dualité: "Atoum crache l'air lumineux (Chou), il expectore le feu créateur (Tefnout) et il place ses bras derrière eux comme action de l'énergie vitale (ka)." 4 Ces "deux grands dieux d'Héliopolis" convoient Pharaon en barque et le guident, Chou derrière lui et Tefhout devant lui: c'est le roi qui devient alors le troisième terme. 5 Un autre texte rapporte les paroles d'Atoum : "C'est ma fille vivante, Tefnout, elle sera avec son frère Chou. "Vie" est son nom à lui, "Maât" est son nom à elle. Je vivrai avec mes deux enfants, je vivrai avec mes deux oisillons, car je suis au milieu d'eux, l'un d'eux étant à mon dos, (l'autre) à mon ventre. Vie est à l'état d'inertie avec ma fille Maât, l'un étant à l'intérieur de moi, l'autre autour de moi. Je me suis levé sur eux deux, leurs bras étant autour de moi. " 6 On ne saurait mieux décrire le processus de conciliation d'une dualité créatrice. Tout en gardant leur identité divine, certaines forces créatrices, comme Atoum, Ptah ou Neith, sont à la fois "père et mère" 1 et concilient donc la dualité fondamentale dans leur personne symbolique. 8 Les dieux peuvent également s'unir entre eux: "On dit, par exemple, Sobek-Rê, et cela signifie que ces dieux sont unis, remarque S. Morenz. Il ne s'agit pas d'une union statique, donc essentielle et durable, des deux divinités, mais d'une interpénétration dynamique qui ne met en cause l'indépendance et la liberté de mouvements ni de l'une ni de l'autre". 9 Le fait que le ressuscité s'identifie aux "deux âmes" (baouy) 10 lui permet d'avoir le contrôle de la parole (medou) u et de Pétoile-zW. 12 J. Berlandini évoque "l'union par embrassement de l'âme de Ré et de l'âme d'Osiris à Mendès ou à Bousiris, suscitant l'entité gémellaire de Baouy/Bafy/Baoufy, en compagnie de ses deux poussins Harendotès et Horus Mekhentyirty, euxmêmes volontiers assimilés aux piliers-^WV 3 ' Pyr 1652c-1653a. 5 Cf. C. Jacq, La Tradition primordiale de l'Egypte ancienne selon les Textes des Pyramides, Paris 1998, p. 180. * CT II, 32b-33a, trad. S. Bickel, La cosmogonie égyptienne avant le Nouvel Empire, OBO 1 34, Fribourg - Göttingen 1994, p. 50. S. Morenz, La Religion égyptienne. Essai d'interprétation, Paris 1962, p. 49. * Un exemple parmi tant d'autres : "Que s'éveille Tefnout en paix, avec toi, en son nom de Menhyt-Nebtou, les deux oiselets de Rê étant (ainsi) réunis en un seul être." (S. Sauncron, Les fêtes religieuses d'Esna aux derniers temps du paganisme, Esna V. Le Caire 1962, p. 89). 9 S. Morenz, op. cit. (note 7), p. 189. '" CT IV, 276a : "Je suis ses deux âmes "; CT IV, 280a: "Je me transforme en ses deux âmes ba ". Voir E. Otto, Die beiden vogelgestaltigcn Scelenvorstellungen der Aegypten, ZÄS 77 (1942), p. 78-91. " CT VI, 330d: "le bâton (la parole) est dans ma main en tant que celui des deux âmes (ou: grâce aux deux âmes). " 12 CT VI, 330j: "l'étoile iad est dans ma main en tant que celle des deux âmes (ou : grâce aux deux âmes)" " J. Berlandini, Problématique des monuments du secteur de la chapelle de Séthi I à Memphis, in: Memphis et ses nécropoles au Nouvel Empire, Paris 1988, p. 28.