A Magyar Nemzeti Galéria Évkönyve 3. szám. (MNG Budapest, 1980)

qui suit — appelée grand carton — la tête peinte très en détail, celle d'un jeune homme aux cheveux bruns dans la force de l'âge, ne présente aucune ressemblance avec Munkácsy (Fig . 104). Ce n'est que sur le tableau de plafond terminé (Fig. Ill), que nous retrouvons les traits caractéristiques de Munkácsy dans la forme de sa tête et dans ses cheveux gris. Faut-il vraiment penser au maître ? C'est ce qu'affirment des biographes : son con­temporain liges, et Végvári. 75 Ainsi, il est logique de penser que la figure de la jeune femme est celle de Ma­dame Munkácsy. Cependant on ne peut constater la ressemblance ni d'après les portraits faits par Munkácsy, ni d'après celui peint par Makart, ni d'après les pho­tographies qui sont restées. Nous ignorons pourquoi l'artiste a renoncé au motif de la mère qui, depuis le début, remplissait un rôle si important. (En 1881, Mun­kácsy fut durement frappé par le sort : son unique enfant, une fille, mourut peu de temps après sa nais­sance. Sans doute ne nous trompons-nous pas en pen­sant que son attachement à l'idée de la maternité, même après de longues années, doit être en relation avec ce douloureux souvenir.) Au-dessus de la figure féminine, l'obliquité dominante des colonnes accouplées se termine dans la coupole par deux putti dont les antécédents remontent fort loin. Le putto ailé, du côté gauche de la coupole, suit exac­tement la direction de l'arc-doubleau qui est derrière lui, en même temps que celle de la colonne qui est en des­sous et que celle du bord clair de la toile qui est à côté, laquelle a enfin trouvé sa forme, sa grandeur et sa con­sistance. Nous rencontrons en outre un phénomène in­téressant : les projets précédents montrent combien Munkácsy avait peiné pour en fixer la forme. Des dessins plus anciens et déjà le projet Wertheimer réunissent l'un à côté de l'autre (ou plutôt l'un au-dessus de l'autre) deux essais, il en est de même de l'esquisse Friedmann (Fig. 71 et 79). Il semble que cette double conception, ce jeu avec deux solutions, se soit tellement renforcé dans le subconscient du maître, qu'il en naquit enfin une idée artistique fructueuse. Maintenant on voit, jeté sur l'échafaud, une grande draperie rouge-brun qui res­sort au-dessus de la toile, et qui, de côté, prend une di­rection encore plus oblique (pareillement aux essais pré­cédents). Le peintre avait sûrement besoin de cette draperie pour que le tableau dans le tableau se charge d'une plus large signification, pour que son bord anté­rieur soit encore mieux mis en relief, pour que le bord supérieur ne coupe pas si brusquement la corniche qui est derrière et pour atténuer l'effet produit par la con­struction perspective débordant trop sur le premier plan (par les trop longues lignes parallèles à la colonne se trouvant au bord du tableau). Au cours du dévelop­pement qui va suivre, ces tendances ne feront que se renforcer, et non en dernier lieu avec l'inclinaison de la toile — rendue nécessaire tout d'abord au point de vue de la perspective et, comme nous le savons, conçue pour répondre aussi à la réalité — laquelle communique une vie suggestive particulière : en un mot elle apporte au tableau un mouvement extraordinaire. Le projet de Vienne, en ce qui concerne le contenu et chacune des figures, de même que sous le rapport du comportement des groupes figuratifs, s'est remar­quablement précisé, nous pouvons même dire que, dans l'ensemble, il a pris sa forme définitive. La transposition de l'esquisse en une forme nette, plus exactement dans l'essai d'une forme nette, demande qu'il y ait concor­dance et réalité. Maintenant les personnages sont, jusqu'à un certain point, dotés de leur texte, lequel les façonne de l'intérieur. Le pathos a diminué, le ton du dialogue a baissé, les gestes sont devenus plus souples ; tout ceci contribue à perfectionner l'ensemble, à atteindre à un degré plus haut de vérité, de validité générales, tout en apportant une différenciation nuancée. Un exemple ca­ractéristique nous est donné par le développement du groupe de peintres qui est au milieu : le jeune élève qui dessine et le vieux maître, Titien, aux gestes délicats, tous deux observant attentivement le modèle, consti­tuent une unité fermée ; comparé avec le dessin 19/26, Fig. 90, qui correspond encore à la variante Friedmann, le développement est particulièrement net. Un autre exemple nous est fourni par le groupe debout à gauche qui consiste en la figure massive de Léonard de Vinci, un rouleau à la main, et en celle de l'agile Raphaël qui porte le carton à dessins — la belle esquisse 20/60 (Fig. 91) semble en être l'antécédent direct - ou bien la nouvelle confrontation de Veronese avec l'énorme toile (la feuille 80 du cahier 20 (Fig. 92) montre trois variantes finement nuancées du peintre au profil fuyant ou la tête cachée par l'épaule, puisque vue d'en dessous) ou enfin Michel-Ange qui maintenant est plus enfoncé derrière la balustrade : on pourrait dire qu'il ne fait qu'un avec elle, pourtant il se détache du plan du tableau et, la tête appuyée sur la main droite, il la tourne vers le public. De même, les deux figures nues ont été subtile­ment transformées : le nu de dos, couché, qui sur l'es­quisse 22/23 présentait des mouvements anguleux, d'une manière naturaliste encore crue, a pris maintenant une attitude détendue — le buste légèrement relevé en courbe douce, appuyé sur le bras — allongé dans une position déviant quelque peu de l'horizontale de la couche, les jambes presque complètement étendues (précédemment, elles étaient repliées) ; quant au nu debout, il est naturel que sa courbure vers le milieu du tableau suit, confor­mément aux exigences de la perspective, la colonne de la loge, en même temps que, par le contre-jeu délicat des deux bras, il présente une autre courbure vers l'intérieur — ce geste signifiant une sorte d'abandon, d'offre de soi — et constitue, grâce au voile rouge qui se soulève

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