A Magyar Nemzeti Galéria Évkönyve 3. szám. (MNG Budapest, 1980)

l'éclairage insuffisant — par qui d'autre le peintre aurait­il été mis en garde dans ce sens ? — s'avérèrent non fondées lorsqu'on enleva l'échafaudage. Amener la lu­mière fut, de la part de l'architecte, une réalisation de maître, bien qu'en vérité il n'y eut point de lumière di­recte dans la cage de l'escalier étant donné que son pre­mier étage est entouré d'arcades, ce qui exclut toute source de lumière directe. Cependant, par les trois grandes fenêtres hémicirculaires qui, à droite et à gauche, s'ouvrent sur les deux cours et dont les dimensions cor­respondent à celles des arcades intérieures, la lumière pénètre abondamment des deux côtés dans la galerie : lumière réfléchie venant des deux cours, mais aussi lumière directe venant des hautes fenêtres, concentrée sur le dallage de marbre clair et allant directement frapper le plafond. Le caisson est éclairé dans son entier par la lumière qui pénètre des deux côtés et par celle qui, venant d'en bas, est dirigée vers le tableau. Dans la mesure où, plus haut, nous avons considéré que le caisson était destiné à servir d'encadrement au tableau de plafond (délimitation qui, nous nous en souvenons, fut longtemps en contradiction avec les conceptions de Munkácsy), nous serions maintenant enclin à voir dans l'idée d'une « lumière venant d'en haut » sans fenêtre, d'un éclairage de source inconnue, la conception appa­rentée à une coupole, vu l'ingéniosité avec laquelle l'effet du tableau — déjà clair picturalement — a été accru grâce à l'art de l'éclairage. A côté de la lumière — nous l'avons déjà mentionné — on a aussi fait appel à la couleur pour que, en tant que pièce principale couronnant l'espace impérial, le tableau de Munkácsy soit le mieux mis en valeur. L'épaisseur de l'encadrement du caisson offre sur sa largeur et dans son profil, une couleur d'un gris froid (la large bande mé­diane est d'un gris plus foncé rehaussé de blanc) ; quant aux ornements en stuc (frise godronnée et perlée etc.) et en premier lieu l'encadrement de feuilles, lourd et touffu, avec extérieurement une bande grise en croisillons, ils sont dorés. Mêlé à l'or, nous voyons le gris froid sur les courbes des arcs-doubleaux qui aboutissent au caisson, tandis que dans les espaces entre les voûtes latérales (ceux-ci ont également un encadrement gris) domine, avec l'ornementation or, un beige plus chaud qui prélude à l'or des douves latérales, au fond des tableaux des lu­nettes de Makart et à la pompe de la décoration murale — de conception tout à fait différente - qui se trouve en dessous. La couleur grise de l'encadrement, laquelle par sa froideur constitue un heureux contraste avec les cou­leurs chaudes du tableau, est particulièrement raffinée dans les valeurs de ses tons. Autant que possible les nuances sont claires, pourtant, c'est seulement de l'en­tourage imperceptiblement ombré, que les parties claires du tableau tirent leur pleine luminosité, tandis que les parties se trouvant dans une fine pénombre derrière la clarté qui les encadre, prennent un certain recul en tant que contraste sombre. Les quatre marches inférieures par exemple, qui sont ombrées, tranchent remarquable­ment sur le cadre clair par leur ton plus chaud, tandis que dans le groupe de marches qui vient au-dessus, et dans la continuation en largeur de l'escalier, le blanc froid de la couche où le nu est allongé, de même que certaines autres parties, telles le balcon sur le bord droit du ta­bleau, la toile qui penche en avant, du côté gauche, et les nuages tout en haut, éclipsent par leur brillant accentué l'encadrement du caisson et le plafond de la cage de l'escalier. Afin de mieux faire comprendre ce dont il s'agit, il faut aller visiter le Naturhistorisches Museum, qui est en face, et établir une comparaison : là, un travail de même valeur a été effectué dans des conditions archi­tecturales analogues, mais dans un tout autre esprit ; il fallait, dans le même cadre, intégrer le tableau de Canon : « Le cycle de la vie ». La composition de Canon, avec ses nombreux personnages et son dynamisme, est un tableau d'un genre tout à fait différent. En un mot, nous dirons qu'il y manque les vifs contrastes de lumière et de couleur que nous trouvons dans le tableau de Munkácsy. Le coloris y est déterminé par la couleur des chairs des différents nus qui s'accrochent les uns aux autres ; des corps rougeâtres, brunâtres, blanchâtres, jaunes, noirs, parmi lesquels, à l'exemple de Rubens, vibrent ci et là de petites taches, celles des vêtements multicolores qui produisent bien un effet de couleurs, mais très général et dépourvu de point culminant. Le manteau rouge du vieillard constitue l'unique tache de couleur vive qui aurait pour but de souligner la partie centrale, mais elle n'éclaire pas non plus et manque de netteté et de légè­reté. Quant à la couleur blanche, elle n'est utilisée que sporadiquement dans le tableau, en outre, elle est re­léguée à l'arrière-plan et largement « recouverte ». Enfin l'ensemble du fond est constitué de nuages gris et gris­bleu. Ainsi, puisqu'à ce tableau manquait la clarté lumi­neuse du blanc, il fallait créer un autre contraste avec l'encadrement, bien qu'ici aussi le fond de l'encadrement soit du même gris froid et que la lourde guirlande de fruits, extérieure, soit également dorée. En ce qui con­cerne la dorure des baguettes d'ornement qui se trou­vent dans les parties plus profondes du caisson, on re­marque, en comparaison du Kunsthistorisches Museum, une certaine limitation, surtout entre les profils gris de l'encadrement du caisson : on y voit une série de bandes claires, blanches ; une telle bande suit extérieurement la guirlande de fruits dorée, elle produit un effet extrê­mement intéressant à côté du tableau, elle est en même temps une bordure qui avive les couleurs et une transition consciente avec l'espace environnant. Le programme dé­coratif, et dans notre cas le programme du coloris, est, conformément à la destination du Naturhistorisches Mu-

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