Csengeryné Nagy Zsuzsa dr. – Doroghyné Fehér Zsuzsa dr. szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Évkönyve 2. szám. (MNG Budapest, 1974)

RAPPORTS ENTRE L'ART HONGROIS ET L'ART RUSSE DANS LA PREMIÈRE MOITIÉ DU XIX e SIÈCLE Quand nous parlons des rapports qui ont existé entre la peinture russe et la peinture hongroise, nous ne man­quons jamais d'évoquer le nom de Mihály Zichy qui avait passé la majeure partie de sa vie en Russie dans la seconde moitié du siècle dernier. Je voudrais mettre maintenant à côté de lui tous les artistes hongrois qui avaient joué au début du XIX e siècle un rôle de précurseurs dans l'établissement de ces relations artistiques entre la Hon­grie et la Russie. Nos relations dans le domaine de la peinture, surtout dans l'art religieux remontent encore plus haut, au Moyen Age. Sans m'attarder à l'examen des rapports dynastiques et diplomatiques (Endre I er et Yaroslav le Sage, Mathias I er et Ivan III) je mentionne seulement le fait que le royaume de Hongrie avait une importante minorité slave et que les églises orthodoxes étaient, dès la fin du XVI e siècle, en possession d'icônes exécutées par des maîtres russes. L'une des plus belles, datant de la deuxième moi­tié du XVI e siècle et due à un des maîtres de l'école mos­covite, nous la trouvons à l'église serbe de Budapest. Ces icônes, œuvres d'artistes russes, en possession des églises orthodoxes de Hongrie provenaient pour la plupart de dons. Une réplique de l'icône de la Vierge miraculeuse d'Akhtirsko par exemple a été offerte à la chapelle Saint Naum de Miskolc par la Tsarine Catherine II à l'occasion de son voyage en Hongrie en 1782. Les relations d'importance vraiment historique entre la peinture russe et la peinture hongroise et la parenté de leurs tendances sont à observer pour la première fois au XIX e siècle. L'évolution historique et sociale qui a déjà créé dans les pays d'Europe occidentale un art na­tional proprement dit, apparaît dans la Hongrie féodale et chez les peuples voisins seulement au début de ce siècle. En Russie, la peinture profane s'affirme déjà au siècle précédent. Mais, à l'exception du portrait, les différents genres du panneau ne commencent à se développer qu'au XIX e siècle après que les objectifs purement décoratifs ont été relégués au second plan. L'évocation de quelques faits concrets suffit à montrer qu'en plus de la divergence des traditions artistiques, la vie artistique elle-même a évolué dans les deux pays au XIX e siècle à un rythme différent et que les conditions du développement n'y étaient pas les mêmes. L'enrichissement des collections d'oeuvres d'art des tsars se poursuivait régulièrement à partir du début du XVIII e siècle. Leur importance est prouvée par l'intérêt que leur portaient les peintres hongrois vivant en Russie (ainsi, Lipót Kerpel par exemple a demandé et obtenu deux fois la permission de visiter les salles de l'Ermitage). La Galerie de peinture du Musée National Hongrois dont les collec­tions provenaient du don de Pyrker, s'est ouverte seule­ment en 1846. A Saint-Pétersbourg il a été fondé, déjà en 1801, une Association libre des amateurs des lettres, des sciences et des beaux-arts, tandis que la Société d'art de Pest n'a été créée qu'en 1839. A partir de 1797, l'Aca­démie tsariste des Beaux-Arts organisait une fois tous les trois ans des expositions qui présentaient aussi des œuvres d'artistes hongrois. 1 A Pest,la première exposition d'œuvres d'art digne de ce nom a eu lieu en 1840. En Russie, on ren­contrait déjà en 1770 des marchands d'objets d'art; dans notre pays, c'est seulement au début du XIX e siècle que quelques marchands d'antiquités allemands se sont établis. A Saint-Pétersbourg, il paraissait déjà en 1807 une revue d'art, le Journal des Beaux-Arts. En Hongrie c'est en 1818, dans la deuxième année de la revue Tudományos Gyűjtemény (Répertoire scientifique) que l'on a pu lire le premier cour­rier des beaux-arts. En Russie, Belinski publie déjà ses critiques d'art animées d'un esprit démocratique quand en Hongrie Imre Henszlmann insiste, dans son Parallèle, sur l'importance du caractère national que l'art doit avoir. En faisant connaître ces écarts que l'on constate dans l'évolution respective de l'art dans les deux pays, nous devons insister sur le fait qu'ils sont attribuables à l'action de forces diverses et qu'ils sont déterminés par elles. En Russie, l'existence d'un État national indépendant a favorisé, déjà au XVIII e siècle, l'organisation de la vie artistique, mais la survivance du féodalisme a éliminé de l'évolution la tendance bourgeoise qui aurait pu encourager un mouvement populaire national. Ainsi, au lieu d'un art national authentique, nous ne pouvons parler que d'un art créé dans un État national absolutiste sur le modèle reçu de l'étranger. Dans notre pays, remarque Gábor O. Pogány 2 , les pre­miers signes de l'existence de l'art accompagnent la mani­festation d'aspirations sociales plus générales. L'épanouisse­ment de l'art hongrois est la conséquence directe de l'union des forces de la nation. Les tendances bourgeoises ont fait leur apparition en même temps en Hongrie et en Russie grâce à l'initiative d'une noblesse instruite et éclairée, séduite par les idées du siècle des lumières.

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