Csengeryné Nagy Zsuzsa dr. – Doroghyné Fehér Zsuzsa dr. szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Évkönyve 2. szám. (MNG Budapest, 1974)

voir la collection de ses tableaux et surtout ses figures d'ouvrier. Il semble qu'il est un peu sous l'influence de Steinlen, mais il s'exprime avec courage — ce qui commande notre respect — sans bluffer comme le font, hélas, assez souvent nos jeunes qui ont fait le voyage de Paris. » 32 Ce sont ces comptes rendus et d'autres du même ton qu'Egry a pu lire dans les journaux. Il a dû avoir le sen­timent d'être l'objet de l'attention générale. Tout cela s'est passé deux semaines à peine avant la publication dans les journaux des critiques sur l'exposition des Huit. Des opinions contraires ont vu le jour. Les Huit ont été loués et aussi blâmés. Il est vrai qu'ils soulevaient des problèmes plus actuels que les huit artistes de la Maison de l'Art. Ils s'inspiraient des maîtres de Pavant-garde française ou allemande. Ils ont choqué les défenseurs des traditions. Les nouveautés apportées par l'art d'Egry pa­raissaient plus modestes, plus raisonnables. Elles n'ont pas fait scandale et en même temps les œuvres exposées avaient plus de fraîcheur et plus d'actualité que le manié­risme des artistes habitués de la Galerie d'Art et du Salon National à qui on doit attribuer la rupture survenue dans la vie artistique hongroise. Cette situation était pour beaucoup dans le succès remporté par Egry à l'exposition de la Maison de l'Art. Nous venons de passer en revue dix ans environ (1901­1909) constituant la première période de l'activité du jeune peintre. Nous en avons encore presque autant à étudier. Nous ne nous arrêterons pas maintenant à leur examen, mais connaissant les résultats acquis par le peintre au cours de ces années, nous affirmons sans risquer de nous tromper que le comportement humain, la conception de l'art et la manière d'Egry ne se sont pas modifiés sensiblement pen­dant ce temps. Il continuait de donner de beaux exemples de son attachement au prolétariat, il créait ses figures d'ouvrier monumentales en 1910 et 1911 (Planche II). Dans ces œuvres il s'efforçait de découvrir les lois de la composition constructive et de la division de l'espace alors qu'il s'attachait à exprimer dans plusieurs compositions de grande dimension l'impression faite sur lui par les grèves politiques, de caractère révolutionnaire, de 1912. Une de ces œuvres, le Symbole, mériterait d'être étudiée à part. Après 1912, comme chez la plupart de nos artistes progressistes, chez lui aussi un arrêt subit s'est produit. Puis, il est parti à la guerre. Sur ses tableaux peints pendant ces années désastreuses, il essayait de faire la synthèse organique des principes relatifs à la structure et à l'expres­sion. Il faisait des recherches, des essais, vivait — souvent malade — dans la misère que sa maman chérie partageait avec lui. Il convient de mentionner ici la communauté d'idées existant entre lui et János Nagy Balogh. A une autre occasion, nous étudierons ce que leur manière aussi a de commun. Pour terminer, nous insistons à nouveau sur sa solitude, sur son abandon à lui-même. Nous venons de voir qu'il n'appartenait à aucun groupe, à aucune chapelle. La Maison de l'Art a présenté ses œuvres au public et le reconnais­sait comme sien. Pourtant, en étudiant les journaux de l'époque, des notes personnelles et d'autres documents, nous n'avons relevé aucune trace de la solidarité d'Kgry avec le programme de la Maison de l'Art, ni avec ses camarades qui y exposaient en même temps que lui. Nous n'avons pu trouver l'embryon d'une tentative de former un groupe sur la base de la communauté des tendances de style. 34 Nous estimons beaucoup Károly Lyka pour l'aide qu'il a accordée au peintre bien que cette aide ait été limitée. Quant à l'enseignement qu'Egry a pu tirer des œuvres de maîtres hongrois ou étrangers, il ne peut nulle­ment diminuer l'importance de ses propres conceptions. Il n'était stimulant qu'au cas où il était propre à aider le peintre à trouver l'expression convenable à ses grands problèmes sociaux. L'époque où Egry a fait son apparition dans la vie artistique hongroise demandait de moins en moins le « grand thème » à ses artistes désireux de renouveler l'art ; elle n'était sensible qu'au progrès accompli dans le domaine du style. En Hongrie c'était les Huit qui en ont donné l'exemple le plus convaincant. Pour Egry, la traduc­tion concrète de sa pensée, l'idée qu'il s'efforçait d'exprimer n'étaient jamais moins importantes que le problème de la forme, de la manière. (Quand, en 1910, il faisait des cari­catures pour la revue de Frigyes Karinthy et de Béla Paulini, il donnait à ses dessins un caractère moralisateur, si bien que ces compositions n'entraient pas dans le style de la revue.) La pensée à exprimer, le contenu du tableau, lui étaient toujours fournis par ses propres expériences de la vie. Il l'a affirmé lui-même plus d'une fois. Ses efforts en vue d'arriver à une composition construc­tive du tableau très visibles surtout dans les œuvres nées vers 1910 l'apparentent aux Huit sans que l'on puisse parler de leur influence. Il diffère plus nettement d'eux par l'expression concrète du contenu. Et dans ce domaine il se distingue des autres artistes aussi. Dans les œuvres des peintres de l'école de Gödöllő il a pu trouver des exemples de la représentation, de l'apothéose même du travail et du travailleur, mais leur art trop stylisé et mystifié rappelant l'art préraphaélesque lui était certainement trop étranger. (Notons que l'art de Gulácsy riche d'éléments préraphaé­lesques est différent de celui des peintres de Gödöllő. ) Il n'ap­prouvait non plus les tendances des disciples de Munkácsy dont les tableaux trop littéraires et surchargés d'effets dramatiques dans un style naturaliste ne réussissaient pas à appliquer à leur époque et avec la même intensité le style réellement dramatique de leur modèle. Après avoir peint par tons purs pendant quelques années, Egry de son côté a définitivement abandonné la manière du grand maître. Nous avons déjà parlé des rapports d'Egry avec les peintres

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