Pogány Ö. Gábor - Csengeryné Nagy Zsuzsa dr. szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Évkönyve 1. szám. (MNG Budapest, 1970)

98. Lajos Vajda (1908-1941) : Masque comprenant un paysage intérieur. 1936 Vajda Lajos (1908—1941): Maszk belső tájjal. 1936 enfermant les deux têtes. La composition nous donne le même sentiment de plénitude que la nature morte aux assiettes au-dessus des maisons. Les motifs longtemps mûris s'unissent de la même manière dans les deux ta­bleaux. Parmi ces motifs, seul le symbole cimetière revient inchangé sur d'autres tableaux à sujets divers, évoquant presque imperceptiblement un monde légèrement différent. Ce rappel d'une existence différente s'affirme plus vigoureu­sement et aussi plus clairement sur un autoportrait de Vajda (Fig. 95.), sur celui qui porte, inscrite au front, une sorte de devise sur le sens de laquelle on ne peut plus se méprendre : le symbole de la mort sous forme d'un crâne placé sur les deux os en croix. L'œil grand ouvert, le peintre nous fixe, le sentiment amer du vide exprimé par les commissures des lèvres. Le regard, l'attitude et les vêtements sont la simplicité même. 11 a un peu l'air d'un prophète avec, sur le front, la vision de l'avenir; il n'y a en lui ni peur ni pitié pour lui-même ou pour les autres, seulement une attention profonde. Comme si ses pensées apparaissaient sur son front ou, pour mieux dire, une idée abstraite à portée universelle de la destinée. L'artiste subit ce sort, cette conscience et son visage paraît être marqué par le sentiment d'une certitude amère. 11 porte au front le motif cimetière comme un diadème, de même que les madonnes des icônes russes portent l'étoile se dessinant sur les voiles. Vajda étudiait, analysait pour lui-même, dans ses dessins, la structure des icônes sans que celle-ci ait essentiellement influencé sa propre composition. Ce qu'il a emprunté aux icônes russes, ce n'était pas leur structure mais l'ambiance de certains tableaux. Les figures revêtues de manteaux som­bres, ayant les mêmes silhouettes aux tons foncés, apparais­sent comme des ombres nettement marquées qui, pour la plupart, sont strictement dessinées de front. Leur visage oval bien délimité paraît souvent encadré de la chevelure comme d'une auriole sombre, il est sombre comme celui de la Vierge des icônes ; des rides se dessinent sous les yeux leur servant de cadre on soulignant, en approfondissant le regard attentif. L'autoportrait dans le style eles icônes ou h Autoportrait aux lys (Fig. 96.) donnent l'un et l'autre l'impression immédiate d'une icône de même que l'Auto­portrait aux doigts levés (Fig. 97.), sur lequel les deux énormes doigts font penser au geste qui nous est familier grâce aux icônes, geste qui avertit, prévient et interdit. Dans l'œuvre de Vajda, la période des autoportraits dans le style des icônes est celle de la maturité, d'une évolution harmonieuse où tout ce qu'il avait déjà exprimé par des dessins superposés a définitivement acquis des formes pures. La pure majesté des icônes apparaissait dans cette vie déjà morne comme une dernière parole. Ce n'est pas cette majesté qui marquera l'avenir, mais plutôt ce geste avertissant et menaçant de la main gigan­tesque. Dans l'œuvre de Vajda nous ne pouvons pas suivre à la trace les périodes qui se succèdent, la série des com­positions qui naissent l'une de l'autre, chacune apportant un élément profondément nouveau. Pourtant, il serait nécessaire de le faire pour expliquer le changement qui, en

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