dr. D. Fehér Zsuzsa - N. Újvári Magda szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Közleményei 4. szám (Budapest, 1963)
37. Jenő Gyárfás (1857—1925): Tête d'étude pour le tableau Le roi Ladislas V prête serment. 37. Gyárfás Jenő (1857—1925): Tanulmányfej az V. László esküjéhez. Le roi a juré à László Hunyadi: Je jure par le ciel, Je jure devant Dieu Que je ne chercherai jamais A te nuire. Ce fait prouve amplement que le peintre était animé d'esprit d'opposition dans son dessein aussi bien que dans la façon dont il entendait exécuter son oeuvre. Le champ du tableau et sa composition sont pour ainsi dire calqués sur ceux de la Confrontation avec la dépouille de la victime qui répète à son tour une composition assez banale. Dans le champ d'une église gothique, vu légèrement de côté, les marches conduisant à l'autel forment un angle oblique avec la ligne de fond. L'ostensoir placé sur un support recouvert d'une nappe blanche devant l'autel, constitue le sommet de la partie éclairée du tableau. Partant de là et descendant en bas, sont groupées les figures comprises dans un triangle allongé; la nef est bien mise en relief par la longue ligne des manteaux et des capes traînant sur le plancher. L'éclairage vient de deux sources: la lumière du dehors entrant par la fenêtre et la lueur du cierge enveloppent de leurs rayons lumineux la nappe blanche du support et la figure du roi à genoux; la lumière blanche et la lumière aux reflets d'or se mélangent et à leur rencontre elles se fondent en un gris tendre. Ce double jeu des lumières est encore compliqué par le gris de la fumée d'encens qui s'étale en couches superposées. Il saute aux yeux que Gyárfás y cherchait à créer une atmosphère intime plus difficile à obtenir que la solution des problèmes d'éclairage assez simples de la Confrontation avec la dépouille de la victime. Le même enrichissement du langage pictural de l'artiste est à constater aussi dans quelques détails d'une beauté exceptionnelle. La tête du jeune Mathias par exemple s'entrevoit mystérieusement à travers le voile de sa mère, Erzsébet Szilágyi. A notre avis, tout le tableau prouve clairement que Gyárfás, en l'exécutant, poursuivait des buts artistiques très élevés. La conception psychologique du tableau est elle aussi, très intéressante. La disposition des personnages y est claire, même compte tenu des deux figures mal dessinées du coin gauche qui semblent étrangères au tableau. Les regards ne se concentrent pas sur un même point, sur un point focal pour ainsi dire, mais ils sont partagés entre le roi agenouillé, vu en face, et les Hunyadi, ou bien ils fixent le sol. Ce fait suffit à lui seul à nous faire sentir le dissentiment violent qui sépare les protagonistes. Le roi, en prononçant le serment, ne lève pas les yeux au ciel, ne les fixe pas non plus sur l'ostensoir, son regard hagard se perd au loin. Le prêtre en chape et en mitre n'élève pas le crucifix qu'il tient dans sa droite; il le laisse retomber. Tout cela exprime la même idée que les vers de Petőfi: la violation du serment est imminente. Ainsi le tableau nous apparaît comme une composition à la fois picturale et psychologique. Présenté en 1896 à l'exposition nationale organisée à l'occasion du millénaire de la Hongrie, il y fut considéré comme «une oeuvre de grand art ». Le critique contemporain, Gusztáv Keleti parle de lui en ces termes: «Composition irréprochable à tous les points de vue quoi qu'un peu théâtrale; un grand nombre de détails, préparés par des études scrupuleuses et tenus, sur le tableau, dans un bel équilibre, témoignent d'une grande maîtrise du pinceau malgré certains signes de fatigue de la touche que nous attribuons au manque de pratique. Il est dommage que Gyárfás, sur l'avenir de qui nous avions autrefois fondé, à juste titre, de grands espoirs, ne soit représenté à l'Exposition que par cette seule oeuvre. La présentation de quelques-unes de ses compositions antérieures aussi aurait été d'un rare enseignement pour lui aussi bien que pour le public et elle aurait pu, encore une fois, confirmé l'avertissement que l'on donne aux peintres, de ne pas s'éloigner pour longtemps des centres animés de la création artistique, car