dr. D. Fehér Zsuzsa - N. Újvári Magda szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Közleményei 4. szám (Budapest, 1963)

à la pointe, le papier absorbe l'encre de Chine. L'artiste n'a qu'à enlever l'huile de paraffine à l'aide d'un papier buvard et d'un fer à repasser chaud. Le dessin reste sous la forme de fines marbrures, délicat comme celui d'une gravure sur l'acier. En parlant des illustrations de Berény, Lajos Kassák constate dans la revue Ma (Aujourd'hui) du 15 août 1917 que les deux compositions les mieux venues de la série sont, à son avis. Le pont et le Pêcheur se penchant en dehors de sa barque (Fig. 15). Cette dernière prise en elle-même est, grâce à son caractère massif et monumen­tal, une oeuvre intéressante donnant une nouvelle di­rection à notre art graphique. Anna Lesznai souligne, elle aussi, dans le numéro de juillet 1917 de la revue Nyugat que les illustrations de Berény sont parfaitement adaptées aux besoins do ce petit théâtre de marionnettes sans perdre pour cela quoi que ce soit de leur originalité. Après sa démobilisation, Berény a ouvert une école de peinture privée à son domicile de la rue Városmajor. La lettre d'un de ses anciens élèves ncvis renseigne sur le caractère de cette petite académie: 68 (Autant que je sache, cette école était la première de ce genre en Hongrie bien que certains peintres y aient déjà ouvert des écoles de peinture. Mais cellesc-i étaient dirigées par des artistes démodés, inféodés à la classe dirigeante qui manquait de goût, tandis qu'à l'école do Berény, élèves et maître ai­maient et étudiaient ensemble Cézanne, Van Gogh et les autres grands maîtres français du XIX e siècle, ne se souciant guère de Benczúr et de ses modèles et inspirateurs ennuyeux. C'était une école intéressante et passionnante avec ses 6 ou 8 élèves tous épris de l'école de Paris. . . Róbert faisait un excellent professeur, alors il travaillait encore avec assiduité et il travaillait avec nous. Le tableau qu'il peignait dans ces temps-là a dû se perdre à cause de ses dimensions inusitées puisque c'était une toile mesurant 200 cm sur 600. Les peintures de ce genre s'appelaient alors des compositions. Róbert exécutait ce tableau, le plus grand qu'il ait jamais fait, au pastel et non pas à l'huile. Je me rappelle avec précision qu'au cours de son travail, il fixait aussitôt les parties achevées avec une solution de caséine diluée. La composition représentait des figures di­verses en plein air. Les hommes y étaient représentés avec des muscles ronds d'un style baroque, les femmes aveient des formes moins accusées et la couleur de leurs corps était plus claire que celle de leurs compagnons. Cette composition monumentale me plaisait alors beaucoup; elle m'imposait. Il va sans dire que Róbert ne l'a jamais achevée. . . » C'est également en 1918 que Berény a fait le portrait d'István Varró, un de ses amis les plus intimes. (Fig. 16). Les lettres auxquelles nous référons dans la présente étude, sont en la possession de ce même István Varró qui s'était mis en rapports avec les contemporains de Berény établis à l'étranger et qui avait réuni tous les renseignements indispensables à la connaissance de l'oeuvre du peintre. C'est également lui qui nous renseigne dans une lettre sur les circonstances ayant concouru à la naissance de son propre portrait. Il écrit: «Dès que j'ai fait sa connaissance, j'avais toujours le vif désir de me faire peindre par lui. . . Je ne lui ai posé aucune condition au sujet de l'exécution du portrait. Il s'est saisi d'un carton, a esquissé rapide­ment la composition telle qu'il venait de la concevoir tout en me l'expliquant: Je te mets dans ce fauteil, au premier plan de la bibliothèque. Tu asl'air d'y voir avec les yeux de l'esprit une muse grave, c'est-à-dire habillée, comme tu veux, et je la dessine derrière toi, à gauche, plongée dans la lecture d'un livre. Plus au fond, à droite, la salle ouvre sur une terrasse, au-delà de laquelle on aperçoit de l'eau et la ligne des collines fermant l'horizon. Sur la terrasse, une muse frivole, c'est-à-dire nue, se peigne les cheveux ...» C'est une conception Renaissance, ai-je remarqué tout bas. Tant pis, a-t-il répondu et s'est mis tout de suite au travail. Il a travaillé à ce tableau du 26 février au 21 octobre 1918 avec des temps d'arrêt plus ou moins longs. Pour les deux figures de femme destinées à l'arrière-plan du tableau, il a fait de nombreuses études d'après le modèle. L'arrièreplan se trouvait déjà exécuté dans tous ses détails tel qu'il l'avait conçu, quand un jour où je lui posais à nouveau, assis dans le fauteuil aux bras dorés, il a fait la remarque suivante: «Tu ne me demandes même pas pour quand le tableau ? «Il sera terminé quand tu l'auras signé » — lui ai-je répondu en reprenant une de ses expressions habituelles. Et tous les deux nous avons éclaté de rires. Ce jour là il n'avait pas son dynamisme ordinaire; il a travaillé longtemps au tableau sans desserrer les dents, puis il m'a subitement appelé pour me le montrer. Il était prêt. J'étais très surpris parce que je devais constater que le fond fabuleux avait disparu sous une sorte de rideau terne. Gà repsntir était certainement dû à son mécontente­ment de ne pas voir la réalisation de sa conception ori­ginale. Il y a fait brièvement allusion et nous n'avons plus parlé du portrait ...» Le 23 février 1919 le journal Világ (Le Monde) consacre un écho à l'école libre de peinture de Berény: «Nous appre­nons, écrit-il, que Róbert Berény, le jeune peintre de talent a ouvert à Buda, rue Városmajor, une école libre de peinture. La révolution mettra fin, sans doute, dans les arts aussi au règne des anciennes cliques et nous sommes en droit d'espérer que les nouvelles tendances progressistes pourront librement s'y manifester. A ce point de vue l'école de Berény aura une belle mission à remplir dans l'évolution future des beaux-arts hongrois. Le programme de l'école montre que le jeune directeur en est conscient ...» Une autre information concernant l'école date déjà du 15 avril 1919, sous la République des Conseils: «Le di­rectoire des Beaux-Arts avait décidé de doter le pays de plusieurs écoles des beaux-arts. Il a chargé le peintre Robert Berény de la direction d'une de ces écoles fondée

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