dr. D. Fehér Zsuzsa - Kabay Éva szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Közleményei 2. szám (Budapest, 1960)

quelque chose est facile, mais le but véritable de la peinture c'est la transsubstatiation de l'objet . . . Le Déjeuner est un poème plongé dans l'atmosphère pure de la peinture. Cette juissance du monde qui trans­figure devient tout naturellement un acte solennel et séduisant. Ce caractère solennel naturel place Szinyei au-dessus de nombreux grands peintres de sa généra­tion. U brille d'un éclat plus intense que ces derniers qui se sont égarés dans les labyrinthes de la représentation picturale tandis que lui, il a atteint les sphères célestes. Chaque nation et chaque époque a de ces grandes toiles qu'est le Déjeuner. Rafael, Giorgone, Watteau, Bou­cher, Nain, Chardin, Millet, Corot, Manet, Renoir ont mérité, par certaines de leurs oeuvres, cette estime toute particulière dont nous honorons aussi le Déjeuner de Szinyei. A mon avis, le trait commun à tous ces tableaux, c'est un charme à la fois tendre et viril, une conception heureuse de la vie, une profondeur sereine et attrayante qui ouvrent le coeur. Ces tableaux sont riches d'une humanité éternelle qui resplendit toujours à travers les styles et les siècles pour illuminer d'une lumière extraordinaire ceux qui les contemplent. Ce qu'ils ont en propre en dehors de leur contenu pictural et des problèmes résolus, c'est un trait séduisant, la sérénité du coeur. Cette disposition si rare chez l'homme a une prédilection pour la vie calme et harmonieuse, elle évite les problèmes ardus, mais elle sait donner aux tâches les moins importantes un caractère de fraîcheur joint à la séduction. Lire telle nature fait rayonner autour d'elle la sérénité. Le peintre doué de cette nature ne peut choisir le thème le plus modeste sans nous faire ressentir cette disposition heureuse. Cette humanité sereine et attrayante se manifeste dans les plis d'un volant de robe, dans l'accord de deux couleurs, dans la pose tranquille, détendue d'une tête, et pour revenir à notre Déjeuner, elle se manifeste aussi dans la démarche légère des deux promeneuses sur la colline, au fond du tableau, dans le champ de blé frémissant d'une couleur vert cendré sur la crête, en un mot, elle se révèle dans les détails les plus infimes. Cette sérénité toute humaine se mêle aux autres éléments du tableau comme le parfum à l'arôme des épiées. Un homme de cette nature est capable, par la chaleur rayonnante (h; son coeur, de nous faire connaître des secrets. Il convainc les incroyants et son influence se prolonge dans la société. » Dans son ouvrage « Genie und Irrsinn im unga­rischen Geistesleben », Madame Szirmay, née Ilona Pulszky, s'occupe de la constitution physique 1 et psychique de Szinyei. En étudiant ses origines, elle constate que ses parents avaient des tempéraments différents : son père était un schizothyme, sa mère par contre était une personne vive, enthousiaste, un bel esprit, Szinyei, lui, était un pykiiisehzykdo­thyme par excellence, le type du génie sain mais qui, malgré sa virilité, était enclin au découragement, ce qui est démontré par sa retraite après l'insuccès de ses tableaux. Zoltán Farkas débute par cette constatation que l'art de Szinyei naquit et se développa libre de toute influence. Le peintre était matériellement et intellec­tuellement aussi indépendant. Pour lui, aussi bien que pour Manet, la peinture ne fut jamais une néces­sité et il sut conserver sa liberté artistique ne faisant partie d'aucune école. Le \ éri table critère de la gran­deur du peintre, c'est la force créatrice qui se dégage du Déjeuner sur Vherbe et de ses autres oeuvres de jeunesse. Si un spectateur qui comprend la peinture 19. l'ai Szinyei Merse (1845-1920) : Étude au crayon pour le Déjeuner sur l'herbe. Szinyei Merse Pál (1845-1920) : Rajz­tanulmány a Majálishoz.

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