dr. D. Fehér Zsuzsa - Kabay Éva szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Közleményei 2. szám (Budapest, 1960)
en tant que documents précieux d'une inspiration supérieure. » Avec la fermeture de l'Exposition du Millénaire, le rideau tomba sur le troisième acte du drame du Déjeuner sur Vherbe. Le sort qui l'attendait, était digne de sa carrière : il alla se reposer dans les dépôts de la Galerie de la peinture au Musée National. Il y resta dix ans, grâce à la Direction de la Galerie, loin des yeux du public comme il l'avait été à Jernye, grâce à son auteur. Personne ne le réclamait, personne ne voulait le voir, pas même en 1901 quand il obtint d'un jury composé de Lenbach et d'Uhde, la grande médaille d'or de l'Exposition Internationale du Glaspalast. Les catalogues parus d'année en année faisaient état des oeuvres d'art achetées par le Musée ; les tableaux des jeunes peintres de l'école de Nagybánya finirent par conquérir les salles de la Galerie, le Déjeuner continuait de rester dans les caves et ce fut seulement en 1906 qu'il eut l'honneur d'être exposé au Musée. On ne comprend pas les motifs de cette mise à l'écart si préjudiciable à l'évolution du goût artistique du public et à l'éducation de la nouvelle génération d'artistes. Par bonheur, l'omission du Musée fut corrigée par la maison d'édition Könyves Kálmán qui répandit non seulement en Hongrie, mais aussi dans le monde entier, les reproductions en couleurs du Déjeuner et d'autres tableaux de Szinyei. Ainsi, peu à peu, on se rendit compte qu'il y avait un tableau hongrois de valeur, intitulé Déjeuner sur Vherbe. Mais le jury officiel était encore loin de reconnaître la véritable importance de cette toile et, en 1900, ce n'est pas le Déjeuner qu'il envoya à l'Exposition Internationale de Paris, mais la Fonte de neige qui y obtint une médaille d'argent. Szinyei découragé autrefois par l'échec à tel point qu'il s'était retiré et avait abandonné le pinceau pour de longues années, ne se grisa pas maintenant du succès. En 1895, dans une autobiographie écrite pour Sándor Nyáry, il fait une autocritique très objective : «... alors l'école de Piloty était au comble de sa gloire, elle réunissait des élèves très doués, tels que Makart, G. Max, Lenbach, Defregger, Leibi, Benczúr et d'autres illustres artistes. Ce milieu exerçait une grande influence sur le jeune peintre tout en le paralysant aussi, puisqu'il lui faisait sentir ses faiblesses parmi des géants, d'autant plus qu'il n'était pas très doué pour représenter les formes et qu'il devait se donner du mal pour bien dessiner. U ne faisait rien de bon et l'hiver se passa pour lui en gestation et en essais stériles. Mais l'été arriva et les rayons chauds, dorés du soleil inondèrent la forêt de chênes et attirèrent dans la nature le jeune homme découragé derrière les fenêtres d'un atelier morne dont il était las. Aller là oû tout est beau, tout brille de riches couleurs ! Ses yeux s'ouvrirent. U prit conscience de soi, il apprit à voir la nature. Il se rendit compte que seul l'imitation de l'effet des couleurs correspondait à son talent. Il renonça définitivement aux essais stériles de faire des compositions historiques suivant les bonnes règles conventionnelles de l'Académie et se décida à reproduire tant bien que mal, mais totijours honnêtement, la nature telle qu'elle apparaissait à ses yeux. Cela donna naturellement à ses tableaux quelque chose de choquant et de gauche ce qui les empêchai de remporter du succès auprès du grand public. Ils réussirent tout au plus à éveiller la curiosité de quelques camarades peintres. Son premier tableau, le Faune, peint en 1868, porte encore l'empreinte de l'académisme, mais celui qui l'a suivi en 1869 et qui représente une jeune dame avec un enfant sur un gazon vert, est une oeuvre toute personnelle et, malgré ses défauts, toute proche du plein-air, manière très à la mode plus tard à Pari«. Ces deux tableaux ont été peints à l'école de Piloty. il faut dire à son éloge que Piloty ne découragea point son élève, il l'encouragea même à suivre hardiment une voie qui n'était pas celle du maître. Quant aux élèves de Piloty, ils étaient les premiers à lui prodiguer des éloges mélangées toutefois de plaisanteries bon enfant comme celle d'Heinrich Lossow qui disait de lui : «Ja, der Sinei mit der senkrechten Wiese» (Oui, Szinyei avec son pré en verticale). En 1869 il quitta l'école de Piloty et loua un atelier à Munich. C'est là qu'il peignit Szinye, rm paysage en style réaliste représentant la plaine hongroise et un couple d'amoureux dans une meule de foin. S'il n'avait pas été vendu en Amérique, ce tableau mériterait d'être exposé parce que le pein-air y est déjà complètement développé. En 1870 la guerre le fit rentrer à Jernye où, dans la maison paternelle, la vie aisée et les distractions qu'elle offrait, le détournèrent de la peinture. En 1872 il retourna à Munich où, sous l'influence du milieu artistique et d'amis dévoués, il reprit le pinceau. C'est alors qu'il peignit parmi d'autres tableaux, la Cabine de bain qui eut du succès à Munich et remporta plus tard, malgré sa simplicité, la médaille de bronze «Für Kunst» de l'exposition internationale de Vienne, en 1873. Dans ces temps, il se lia avec le célèbre peintre Arnold Böcklin qui s'intéressait à lui et l'encourageait à intensifier plus énergiquement encore son coloris. C'est alors qu'il composa le Déjeuner représentant par des couleurs vives, une compagnie désinvolte en excursion, installée à l'ombre d'une forêt, sur le gazon vert d'une colline baignée de lumière intense. Le tableau eut un grand succès à Munich et Szinyei crut que sa réputation était faite.