dr. D. Fehér Zsuzsa - Kabay Éva szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Közleményei 2. szám (Budapest, 1960)
revient également à Szinyei, découvert maintenant et pourquoi seulement maintenant, Dieu seul le sait. Les tableaux de plein-air de Szinyei sont merveilleux ! Quelles couleurs justes et fraîches ! Quelle simplicité non recherchée, quelle réalité ! Parmi tous ses paysages, c'est VAlouette qui nous a le mieux plu. (S'il n'avait pas peint cette alouette ! Ce n'est pas une alouette, c'est un casoar !) Son tableau principal, le Déjeune?' est également splendide, c'est dommage que la désinvolture affectée du personnage étendu à plat ventre au milieu du tableau, nous l'appelle l'affectation du naturalisme. Les peintures : Fonte de neige, Rococo, Coquelicots, sont également belles. » U n'est pas superflu de citer une voix dissonante. Un critique d'art qui signe Guy écrit dans Alkotmány (21 mai 1896) : «Avant de nous occuper des oeuvres des dix dernières années, mentionnons Pál Szinyei Merse, peintre oublié et remis à la mode. « Ce jeune titan >> plongeait déjà dans les années 70 dans cotte mer aux couleurs vertes et violettes que les critiques à longue barbe appellent plein-air. Tant que le bon sens a dominé dans la peinture, Szinyei n'avait aucune chance de réussir : mais le voilà qui prend sa place parmi les plus grands de nos jours, grâce à l'appui des symbolistes et des extrémistes du plein-air qui ont accaparé l'empire du pinceau et de la palette. Nous ne sommes pas fait pour nous enthousiasmer de ses toiles semblables aux enseignes mal exécutées des marchands de couleurs et nous ne comprenons pas l'exigence de ceux qui réclament la grande salle pour les oeuvres de Szinyei. L'exposition retrospective est une assez bonne place, je dirais même une trop bonne place pour lui. » Dans son compte-rendu de l'Exposition du Millénaire, Gusztáv Keleti aussi jugea bon de faire amende honorable pour son expression « delirium colorans ». Il écrit à la page 246, tome IX du grand ouvrage de Matlekovics —Szterényi, dans Millième anniversaire de la fondation de VÉtat Hongrois : « Nombreux sont les peintres qui se sont essayés aux différents genres de la peinture et avec un plein succès. Parmi eux, citons les plus connus, Lajos Bruck, Róbert Nádi er, Döme Skuteczky et, pour ne pas aller plus loin, Pál Szinyei Merse, ce peintre qui s'est montré si ingrat envers son talent et sa science de la peinture, en se retirant pendant vingt ans et en réapparaissant maintenant comme député. U fera du bien partout, vu son patriotisme et son esprit cultivé, mais il pourrait faire mieux d'après nous, qu'il nous soit permis de le dire sincèrement, s'il revenait résolument à la vie artistique. Ses beaux tableaux pleins de fraîcheur, inconnus aux peintres de la nouvelle génération et qui ont valu à notre collègue au Parlement les honneurs dus à son talent de précurseur et de représentant distingué du plein-air, ont été rangés à bon droit, en raison de leur date, dans l'exposition rétrospective. Ces tableaux frais ont les mêmes couleurs lumineuses que les toutes dernières toiles du peintre et cela prouve que le talent créateur et le talent d'observation de Szinyei, au lieu de se rouiller pendant la longue période d'inaction, ont encore mûri comme le bon vin dans la cave. Il est assez rare de voir un pareil élan de l'esprit, une force aussi résistante des sentiments que ceux démontrés par chacune de ses oeuvres exposées. Le Faune peint il y a presque trente ans, puis le Déjeuner sur Vherbe et VAlouette à peine moins anciens, sont des tableaux tellement frais, comme s'ils venaient de quitter le chevalet du maître ; les toiles exécutées l'an dernier, la Fonte de neige, Oculi, Rococo, sont les oeuvres les plus colorées, les plus fraîches, les plus exquises et en même temps les plus instructives de notre Exposition. Nous devons mentionner cela comme un fait des plus curieux et des plus réjouissants de l'histoire de notre art. Ces tableaux devaient inspirer à plus d'un de nos peintres le désir peu chrétien de voir Szinyei échouer bientôt dans la politique et quitter le parti libéral pour revenirtri omphalornent dans l'Association des artistes hongrois. Nous serons nous aussi de ceux qui applaudiront à ce changement. Mais, pour finir, mentionnons encore quelques-uns de ses tableaux exposés. Le portrait du père de l'artiste remporte du succès par son intimité toute familiale. U a une bonne facture aussi, ce qui lui donne une valeur peu commune. Les deux derniers tableaux, Fonte de neige et Le long des rives du ruisseau, se rangent parmi les plus belles perles du paysage hongrois moderne.» Les critiques parues dans la, presse montrent que sinon le public, au moins les amateurs d'art et les critiques étaient déjà capables de comprendre le plein-air. Dans le cas du Déjeuner sur Vherbe, la date de sa composition, ce chiffre de 1873, fit autant d'effet que le tableau lui-même. Les jeunes peintres de l'école de Nagybánya eux aussi firent ressortir cette date et profitèrent du succès de Szinyei pour justifier leurs propres aspirations. En général, ils considéraient Szinyei uniquement comme leur précurseur et ils faisaient sincèrement leur mea-culpa pour l'avoir méconnu pendant 20 ans. Mais personne d'entre eux ne s'enfonça dans l'étude de son art, personne ne se rendit compte que le Déjeuner était un de ces chef s-d'oeuvre qui sortent de la hiérarchie banale des oeuvres d'art, tout comme les chefs-d'oeuvre de la littérature et de la musique, pour prendre leur place dans le trésor de l'humanité en tant que manifestations solennelles de l'esprit humain, exprimant la pensée, le sentiment d'une grande communauté,