dr. D. Fehér Zsuzsa - Kabay Éva szerk.: A Magyar Nemzeti Galéria Közleményei 2. szám (Budapest, 1960)
nismc quoique ces toiles rendent la nature on ne peut mieux. Nous étions incapables de dire pourquoi elles nous plaisaient, mais elles plaisaient beaucoup. Les critères que notre terminologie nous fournissait, le dogme du naturalisme, celui du réalisme, le dessin, la couleur, la bonne exécution, s'étaient révélés insuffisants pour faire comprendre ces tableaux comme ils le sont en effet pour expliquer tout autre chef-d'oeuvre. Nous connaissions bien la formule qui veut que Part soit la nature plus l'homme, mais nous voyions qu'elle manquait de précision, qu'il fallait que l'homme y soit la marque et la mesure de la personnalité. Aujourd'hui je remplacerais cette formule par une autre en disant que le chef-d'oeuvre n'est autre que la nature plus le génie. » (Magyar Művészet, 1938. année XIV, p. 65.) Cependant ce n'étaient pas seulement les jeunes peintres de la future école de Nagybánya qui s'enthousiasmaient alors pour les tableaux de Szinyei. La plupart des artistes, la presse, même les milieux officiels prenaient part à la jubilation générale qui suivit la découverte du Déjeuner sur Vherbe. Le Musée National acheta ce tableau pour la somme de 1.800 forints et les autres tableaux aussi, Y Alouette, la Fonte de neige, le Ruisseau, trouvèrent acquéreurs. Le 31 mai, la nouvelle suivante parut dans Magyar Hírlap : « L'élite des peintres et des sculpteurs hongrois vient de fêter un artiste de génie, Paul Szinyei Merse, qui, après 25 ans de retraite, a exposé des oeuvres brillantes à l'occasion du Millénaire. Nos artistes se trouvaient presque au complet vendredi soir, dans les salles du restaurant Vampetieh, pour saluer le maître. Szinyei Merse remercia avec émotion les artistes réunis pour cet accueil spontané et chaleureux et provoqua un enthousiasme général en déclarant qu'encouragé par la confiance de ses collègues, il allait reprendre le pinceau. Cette déclaration est très importante pour le développement de l'art national parce que Szinyei dont l'acitivité a été si longtemps paralysée par des circonstances particulières, peut être considéré à bon droit comme le précurseur génial de notre art moderne. » C'est la presse qui reflète le mieux le changement survenu depuis 1883 dans le goût du public et l'évolution du goût artistique de l'époque, à partir de cette date. Károly Lyka écrit dans Festi Napló (année 1896, nos 6 et 19) : « Dans la génération des années 70, période la plus plate et la plus anémiée de l'art hongrois, nous ne voyons qu'un seul peintre marchant de l'avant comme un réformateur et le prophète d'une nouvelle époque picturale. Je viens de nommer Pál Szinyei Merse, cet artiste de grand talent opprimé alors par les mêmes tracasseries d'un art officiel auxquelles nos jeunes talents sont aujourd'hui exposés. C'est en 1873 que Pál Szinyei Merse peignit le tableau qui aujourd'hui encore empoigne les visiteurs du Salon par sa fraîcheur et son intimité charmante. A l'épocpie où les peintres enduisaient de bitume leurs toiles, personne n'avait l'idée d'apprécier la. nature et la poésie de ses tonalités et de ses couleurs. Si, au lieu de débuter chez nous, Szinyei avait débuté à Paris, sa nouvelle conception de l'art lui aurait assuré une place eminente dans l'histoire de l'art, parmi les talents les plus originaux de la peinture. Restant chez lui, il a dû se résigner à ce que son talent exceptionnel ne soit découvert que 23 ans plus tard et que lui-même soit tardivement salué avec le respect le plus sincère de la nouvelle génération d'artistes devant presque exclusivement son évolution à cette conception sobre et sincère de l'art que Szinyei avait en vain préchée à sa. propre génération. Mais le public hongrois peut maintenant se battre la poitrine et faire son mea culpa en présence du tableau de plein air de Szinyei. Et dire que cette presse qui a rendu célèbres une centaine de politiciens infatués d'eux-mêmes, n'a su reconnaître à la même époque ce poète-peintre à qui nous devons ce magnifique tableau ! Cette peinture peinte il y a vingt ans, passe aujourd'hui pour l'oeuvre la plus remarquable de tout le Salon. Tous ceux qui sont sensibles au charme nouveau se dégageant de ce tableau comme une fraîcheur printanière, se rappelleront certainement avec mépris les critiques qui passèrent sous silence le peintre ou se moquèrent grossièrement de lui en se permettant des plaisanteries au goût du boulevard. C'est une histoire lamentable que celle du silence d'un si grand talent, mais, malheureusement, elle ne sera pas la dernière dans l'histoire de notre art national. » Dans Fővárosi Lapok Tamás Szana écrit que « la figure la plus intéressante de l'exposition du Millénaire est celle de Pál Szinyei Merse. Il y a plus de vingt ans cpie le peintre fit sensation à l'Académie munichoise avec ses tableaux de plein-air, en déclarant la guerre à cette fausse manière de peindre qui pesait alors comme un cauchemar même sur les talents les plus riches. Les artistes l'applaudirent, mais le public et la critique réservèrent un accueil froid à ces nouvelles aspirations. Habitués aux mensonges bien présentés dans la peinture, ils ne purent se familiariser avec l'art de Szinyei, ennemi de tout maquillage de la vérité et représentant sur ses toiles la nature telle qu'elle se présentait à son oeil et à son tempérament d'artiste. Car Szinyei était à la fois un réaliste et un poète exprimant des sentiments par des paysages justifiant ainsi le critique français selon lequel le bon paysage reflète un état d'âme. >> 2 * 19